De la rédaction d'une tribune sur les réparations, à la découverte d'un nouveau variant de Covid-19, en passant par e lancement de la campagne des 16 jours d'activisme, l'actualité de cette semaine a été dominée par la lutte contre les violences basées sur le genre. Le Desk Femme vous propose un retour sur ces faits marquants avec Mamy Kahambu Kitsa.
Bonjour Madame Mamy Kahambu et merci de nous accorder de votre temps. Pouvez-vous nous parler de votre parcours ?
Mamy Kahambu : je suis coordinatrice de la plateforme Synergie des femmes pour les victimes de violences sexuelles SFVS, une organisation qui milite pour la promotion et le respect des droits humains en général et ceux de la femme victime de violence sexuelle en particulier. Je coordonne aussi le mouvement des Survivantes des Violences sexuelles au niveau de la province du Nord-Kivu.Depuis 2010, je milite pour la promotion et la protection des droits humains et je fais partie de plusieurs réseaux et groupes thématiques de promotion des droits humains. Je suis également chargée de suivi et évaluation du secrétariat provincial de la Résolution 1325 du Conseil de Sécurité des Nation Unies. Par ailleurs, je suis point focal du mécanisme de protection des défenseurs des droits humains au Nord-Kivu dénommé Synergie Ukingo Wetu (SUWE).
La semaine a été marquée par des activités liées à la lutte contre les violences faites aux femmes. Lundi, un évènement s’est tenu à Kinshasa, réunissant plus de 20 survivant.es des 12 pays africains en faveur des « réparations ». A quoi les survivant.es s’attendent-ils concrètement ?
Mamy Kahambu : les survivant.es veulent des réparations. Notamment, la réparation individuelle et la réparation communautaire. Par réparation individuelle, on entend l'indemnisation des victimes, la prise en charge socio-économique, juridique et autres. Pour ce qui est des réparations communautaires, il s'agit d'abord des garanties de non répétition, ensuite la construction des monuments, des hôpitaux, des écoles. La reconnaissance des gouvernements d'avoir échoué dans leur mission de protection des femmes et des enfants est aussi une forme de réparation.
Dans leur déclaration commune, les survivant.es regrettent que la mise en œuvre des cadres normatifs et des principes de réparation internationaux, régionaux et nationaux déjà existants tarde à arriver. Qu’est-ce qui bloque selon vous ?
Mamy Kahambu : je pense qu'il y a d'abord un manque de volonté. Ces cadres existent, les gouvernements disposent également des moyens de leur mise en œuvre mais il n'y a pas de volonté pour passer des textes aux actions concrètes.
La campagne des 16 jours d’activisme contre la violence basée sur le genre a aussi démarré ce 25 novembre avec pour thème mondial, « Orangez le monde : mettre fin dès maintenant à la violence à l’égard des femmes ! ». Au niveau national, « Je me lève et je m’engage aujourd’hui contre les violences faites aux femmes, jeunes et petites filles ! ». Que vous inspirent ces deux thèmes ?
Mamy Kahambu : ce sont des thèmes qui appellent à l'action. Mais faisant référence à la RDC, je pense que nos États possèdent des lois en matière de lutte contre les violences à l'égard des femmes mais ils ne les mettent pas en pratique. À quoi servirait-il de dire Orangez le monde, s'il n'y a pas les actions ne suivent pas ? Que faisons-nous de la Stratégie Nationale de lutte contre les VBG ? Qu'avons-nous fait du Plan d'actions national, Ière et II ème générations ? Il faut des actions.
Au cours de cette semaine, une conférence à été organisée par le Desk Femme de ACTUALITE.CD et Internews sur la réduction de la violence basée sur le genre en RDC. Selon vous, y a-t-il des avancées en termes de lutte contre l'impunité ?
Mamy Kahambu : Oui, actuellement, de plus en plus de victimes s'engagent à briser le silence. Mais il y a encore des victimes et des survivant.es qui sont menacés pour leur expérience qu'ils partagent aux autres. En milieu rural, ils rencontrent beaucoup d'atrocités. C’est vrai qu'il y a des avancées en termes des lois, de sensibilisation aussi, notamment la campagne Tolérance Zéro immédiate, la Stratégie Nationale de lutte contre les VBG, la mise en place d'une Police spéciale dédiée à la lutte. Mais, les actions concrètes ne suivent pas encore.
Pour la première fois en Afrique, un sommet des Chefs d’Etats et des gouvernements sur la masculinité positive s’est tenue à Kinshasa le même 25 novembre. A quoi faudrait-il s’attendre concrètement au niveau continental ?
Mamy Kahambu : la présence des présidents africains à Kinshasa m'a permis de croire à la diminution des cas des violences sexuelles et basées sur le genre au niveau du continent africain. En dehors des violences sexuelles, il existe aussi d'autres formes de violences. Notamment les violences domestiques, conjugales, politiques, économiques. Nous espérons à travers cette conférence, voir des femmes occuper des postes décisionnels en Afrique.
La Société civile pour l’Etat de droit, une ONG, note que les Chefs d’Etats n’ont pas saisi l’opportunité de présenter officiellement des excuses publiques aux victimes des violences liées aux conflits. Que représentent des excuses en termes de réparations ?
Mamy Kahambu : des excuses publiques peuvent être un soulagement pour les victimes des violences. C'est aussi une forme de réparation.
En économie, Félix Tshisekedi a présenté la RDC comme la destination la plus compétitive au monde pour installer des usines de fabrication de batteries, lors du DRC-Africa Business Forum. Il a également appelé les investisseurs à s’y mettre. Quelles sont vos attentes après ce forum ?
Mamy Kahambu : nous aimerions que ces prochains investissements profite aux congolais en général et aux femmes congolaises en particulier. Que les femmes y soient nommées à des postes décisionnels.
En politique, après l’opposition de l’Eglise catholique et de l’ECC contre la désignation de Denis Kadima à la tête de la CENI, les présidents des deux chambres du parlement, le premier ministre ainsi qu’un conseiller du Chef de l’Etat ont rendu visite aux représentants de ces confessions religieuses. Que représente cette rencontre pour vous ?
Mamy Kahambu : cela est une voie vers le consensus entre les protagonistes, quand on sait qu'il y a eu des soulèvements contre la désignation et l'entérrinement de Denis Kadima.
Dans le dossier Congo Hold-up, la ministre de la justice a fait savoir que l’injonction qu’elle a donnée au procureur général près la Cour de cassation concerne la globalité des révélations. Quelles sont vos attentes auprès de la justice ?
Mamy Kahambu : que la justice fasse bien son travail.
Dans l’actualité continentale, en santé, une équipe de scientifiques sud-africains a annoncé jeudi la découverte d’un nouveau variant du Covid-19, jugé “préoccupant” en raison de ses nombreuses mutations. Quelles dispositions faudra-t-il prendre pour une riposte efficace selon vous ?
Mamy Kahambu : les principes sont simples. Il faut que les populations respectent les mesures barrières et acceptent également de se faire vacciner.
Propos recueillis par Prisca Lokale