Avec le soutien de l'ONG Protection International, le réseau des femmes défenseures des droits humains a été lancé officiellement ce vendredi 12 mars 2021 à Goma (Nord-Kivu). Il regroupe au départ près de 50 femmes membres des organisations de défense des droits humains réparties dans les villes de Beni, Butembo et Goma pour le Nord-Kivu, Uvira et Bukavu pour le Sud-Kivu. Les femmes défenseures des droits humains du Kivu ont décidé de se regrouper en réseau dans le souci de promouvoir leur protection et leur autonomisation dans l’exercice de leur travail, qui du reste est un travail à haut risque.
« Nous travaillions en ordre dispersé et parfois nos alertes n’obtenaient pas des résultats escomptés. Par exemple, chez nous à Beni, les femmes défenseures des droits humains sont confrontées à plusieurs difficultés dont les arrestations arbitraires, les kidnapping, les meurtres et autres formes d’abus. Et quand nous dénonçons cela, de fois l’alerte n’a pas d’échos favorable parce que limitée au niveau local. Nous estimons qu’avec ce réseau, nous allons dénoncer les choses et les alertes vont remonter jusqu’aux instables supérieures. Aujourd’hui à Beni, nous avons un sérieux problème d’insécurité. Il faut une implication du pouvoir central et de toute la communauté internationale. Nous espérons que le réseau va nous aider à remonter l’information et ainsi nous permettre un jour à respirer l’air de la paix à Beni »,a dit Me Isabelle Namwezi, consultante juriste à la solidarité féminine pour la paix et le développement intégral (SOFEPADI), membre du réseau des femmes défenseures des droits humains au Kivu.
La mise en place de ce réseau rentre dans le cadre du programme "autonomisation et protection des femmes défenseures des droits humains (FDDH) pour contribuer à la prévention civile des crises, au règlement des conflits et à la consolidation de la paix en RDC", programme implémenté par l’ONG Protection internationale (PI) avec l'appui financier du Ministère allemand des Affaires étrangères via le Programme ZIVIK qui touche directement 480 femmes défenseures des droits humains du Nord et du Sud-Kivu.
En 2018, PI avait initié une étude de base réalisée auprès des femmes défenseures des droits humains en prélude de la mise en œuvre de ce programme qui a permis de connaître les risques qu’encourent les femmes défenseures des droits humains dans leur travail quotidien.
« C’est à l’issue de cette étude que les femmes avaient souhaité se réunir en synergie pour élever leur voix afin de voir si elles peuvent ensemble définir les mécanismes pouvant améliorer leur protection et leur sécurité en tant que femmes défenseures. Comme vous le savez, dans l’exercice de leur travail, même si les DDH en général font l’objet d’une Insécurité récurrente, les femmes défenseures des droits humains font face d’une manière spécifique à plusieurs défis sécuritaires et même à des dangers pour leur intégrité physique et psychologique au regard de leur contexte de travail. Elles font souvent l’objet des convoitises sexuelles et des harcèlements. C’est pourquoi nous les accompagnons, nous les formons pour voir comment est-ce qu’elles peuvent continuer leur travail mais en diminuant les risques », a pour sa part indiqué Françoise Timbiri, officier de protection et chargée des questions genre à Protection international.
Le réseau mis en place à partir de Goma compte s’entendre sur toute l’étendue de la République.
« Ces femmes vont mettre ensemble leurs capacités. Quand on travaille d’une manière dispersée ou isolée, l’impact est toujours insignifiant. C'est un noyau qui est en train de se créer mais petit à petit on va atteindre d’autres provinces. Il y aura un effet de multiplication. Aujourd’hui nous parlons du Nord et du Sud-Kivu mais toutes les entités de ces provinces ne font pas partie du réseau. Le réseau est inclusif. Il faut donc que les autres organisations qui œuvrent dans des zones où les femmes défenseures des droits humains sont activés puissent approcher le réseau afin de faire bloc ensemble et ainsi militer pour l’autonomisation et la protection des droits humains. Nous n’excluons pas les hommes. Il n’y a pas d’homme sans femme et vice versa » a indiqué Mme Charlotte Kashamura, consultante à Protection internationale pour la mise en place du réseau des femmes défenseures des droits humains.
Le lancement du réseau des FDDH a été précédé par un atelier de formation sur la définition du plan d’action du réseau à moyen terme et proposition des activités clés, la conception d’un mécanisme d’alerte et un plan de suivi des cas de protection au sein du réseau ainsi que la rédaction et l’adoption de la charte du réseau.
Ce réseau des FDDH du Kivu a été mis en place en marge de la commémoration de la journée internationale des droits des femmes, le 8 mars 2021.
Le thème retenu pour 2021 est : « Leadership féminin : pour un futur égalitaire dans le monde de la Covid-19 ». En RDC, la journée internationale de la femme, édition 2021, a été célébrée sous le thème : « le leadership féminin d’excellence, société égalitaire et numérique à l’ère de la Covid-19 ».
Jonathan Kombi, à Goma