Céline Banza a remporté le prix Découvertes Rfi 2019, à peine âgée de 22 ans. Du processus d’inscription à l’annonce de la décision finale du jury, en passant par l’enregistrement de son célèbre tube “Te Rembi”, la jeune femme raconte en toute simplicité les temps forts de son parcours.
Bonjour, Céline Banza, et merci de répondre à nos questions. Vous avez remporté le prix Découvertes RFI 2019. Que représente cette victoire pour vous ?
Céline Banza : je suis fière et contente. C’est un honneur pour la RDC, pour tout Kinshasa, pour toutes les personnes qui m’ont accompagné et qui me soutiennent. Etre finaliste, c’était déjà une victoire pour nous. On était 1200 à être retenus, nous n’étions que 10 en finale. Jusqu’à la dernière minute, je ne m’imaginais pas être la gagnante. Ce prix représente aussi le fruit de nombreuses années de travail.
Durant cette compétition, avez-vous également rencontré des difficultés ? Si oui, lesquelles ?
Céline Banza : ma plus grande difficulté, c'est de m'être inscrite à la dernière minute. Je devais rapidement enregistrer des chansons, rencontrer un ingénieur, le supplier de faire les choses à la hâte. C’était un véritable challenge pour nous, on pouvait aussi attendre l'année prochaine, mais j'avais cette détermination. On s’est inscrit, il n’y avait pas de vidéos, pas de clips alors que le jury avait besoin d’en entendre encore plus. Nous avons passé des jours et des nuits au studio pour enregistrer des chansons. C’est pendant la finale que j’ai tourné le clip « Te Rembi », tandis que les autres avaient déjà des millions de vues, déjà connues, et passaient à la télé.
En 2017, vous avez fait une brève apparition dans The Voice Afrique Francophone. Qu’avez-vous retenu de cette expérience ?
Céline Banza : c'était une très belle expérience. C'était aussi une victoire. J’étais parmi les personnes qu’ils ont retenues, j’ai pris l’avion, je suis allée en Afrique du Sud. Pour moi, c’était déjà un grand pas. J’ai eu vraiment la chance de rencontrer Asalfo, qui était mon coach. Il a été vraiment bien envers moi et envers nous tous. Ses conseils, ses mots, je les porte encore dans mon cœur. Il me disait que quand on tombe, il faut toujours se relever et continuer. Je me suis donnée l’objectif de travailler, de faire des recherches. Aujourd’hui, on a remporté ce prix je, pense que pour lui c’est une grande fierté. Comme tout artiste, on a besoin de partager notre art, notre musique devant un nouveau public. Une compétition, c’est une aventure, on y retient toujours quelque chose, que ce soit pour ceux qui gagnent, ceux qui perdent ou qui sont éliminés. On sait qu’il n’y a qu’un seul gagnant mais l’objectif, c’est d’être déterminé.
« Te Rembi », l’une de vos chansons en ngbandi présente la femme et son corps. Quel message faites-vous passer à travers ce morceau ?
Céline Banza : la chanson est venue de la pièce de théâtre « Trois femmes en colère », du chorégraphe Fabrice Mukala. Je devais composer une chanson pour cette pièce de théâtre. Te Rembi parle du corps de la femme comme limite à laquelle les hommes s’arrêtent ou que les femmes n’arrivent pas à dépasser elle-même. On s’est battu pour que les jeunes filles aillent à l’école et elles y vont actuellement. Alors elles doivent gagner leurs vies, elles doivent réussir. Il faut que la femme sache qu’elle est la base de l’humanité, elle ne doit pas se limiter uniquement au mariage, à son corps, elle doit savoir la place qu’elle mérite, l’homme doit comprendre cela et lui donner le respect qu’elle mérite. L'objectif de cette chanson était de faire ressentir la colère contre toutes les formes de discriminations et violences à l'égard de la femme. C'était aussi pour faire comprendre à cette femme son rôle dans la société et son poids.
Pourquoi une chanson en ngbandi ?
Céline Banza : je suis ngbandi, j'ai étudié l'ethnomusicologie à l'Institut National des Arts (INA). J’ai découvert des groupes, des personnes qui jouaient de la musique et parlaient dans leurs langue. Je me suis rendue compte que la musique était belle, que je devais contribuer à la lutte contre la disparition de nos langues. Actuellement, quand je compose des chansons, je vais rencontrer mes tantes, mes oncles, mes amis de l’Equateur pour faire la bonne traduction. J’apprends encore très bien cette langue. Au moins on saura que Céline Banza est Congolaise, qu’elle est ngbandi du Nord-Ubangi et qu’elle chante dans sa langue.
Après avoir remporté ce prix, que comptez-vous faire à présent ?
Céline Banza : il est vrai que ce prix est une grande responsabilité. On prépare notre tournée africaine. J’ai signé avec Bomaye Musik, je prépare mon album.
Hormis la musique et le cinéma, avez-vous d’autres projets sur lesquels vous travaillez ?
Céline Banza : pour l'instant, je travaille essentiellement sur la musique, je suis musicienne. Mais, je suis jeune, j’ai tout mon temps, la base c’est la musique mais quand on rencontre d’autres personnes dans différents domaines, on se découvre. C’était la même chose avec le cinéma et les performances. Je ne sais pas encore ce que l'avenir me réserve.
Un message pour les jeunes femmes ?
Céline Banza : c'est quand on est jeune que l'on peut se permettre de rêver et se battre pour réaliser ces rêves. C’est maintenant que l’on doit avoir des objectifs. La RDC est un grand pays, Kinshasa est une grande ville, avec beaucoup de mouvements. On doit croire en nous-même. On doit être conscient, patient et travailler en équipe pour changer le Congo. Et pour nous les artistes, la question de l’éthique ne doit pas nous échapper. Ecouter Te Rembi de Céline Banza ici
Propos recueillis par Prisca Lokale