Du lundi au dimanche, en saison sèche comme en saison des pluies, elles ont décidé d’affronter les aléas climatiques ainsi que la terreur de la nuit pour vendre leurs marchandises. Actualité.cd vous vous propose un reportage au coeur du marché de nuit de Kintambo/Magasin.
Il est 19 heures, au rond-point Kintambo/Magasin, le marché de nuit est bien installé. Entre la musique des bars avoisinant et les klaxons des transports en commun, des femmes installent minutieusement des fruits, des légumes pour les clients. Mère de famille, femmes seules, jeunes filles, pour chacune ce commerce est la seule source de revenus. Elles racontent leurs parcours et les difficultés auxquelles elles font face au quotidien.
“ A partir de 19 heures, les clients arrivent. Nous restons vendre jusqu’à cinq heures du matin. Parmi nos clients, il y a ceux qui rentrent du travail, les célibataires, et ceux qui font le marché pour leurs familles,” explique Dody qui insiste sur les problèmes de sécurité qui ponctuent leurs activités. “L’une des plus grandes difficultés que nous rencontrons, ce sont les menaces des enfants de la rue (shégués), parfois ils volent nos aliments et même le peu d’argent que l’on arrive à se faire ici... Il suffit de somnoler pendant cinq minutes pour que ton sac soit emporté.”
“Vendre la nuit nous expose à plusieurs problèmes”
Outre les problèmes récurrents de sécurité, les vendeuses se plaignent de la circulation des faux billets de banque qui impactent leurs activités, comme l’explique Prisca Nduakasa qui vend des épices à Kintambo/Magasin, depuis dix-huit ans. “C’est en 2001 que j’ai installé mon commerce ici. J’ai trois enfants, je les scolarise grâce à ce que je gagne. Deux sont actuellement à l’université et la cadette en 5ème des humanités. Je contribue au bien-être de mon foyer”, dit-elle avant d’ajouter “vendre la nuit nous expose à plusieurs problèmes tels que les faux billets de banque que certains clients nous donnent, cela nous fait perdre énormément en termes d’argent et de produits.”
Wivine Kalemba a choisi de faire ce commerce pour soutenir son époux militaire. “Mon époux touche un salaire de 140.000 francs à la fin du mois. Nous avons 5 enfants, trois d’entre eux ne sont pas scolarisés, faute de moyens. Il est vrai que vendre à des heures tardives comporte plusieurs risques. Et pourtant c’est le seul moyen qui me permet d’entretenir mon foyer en dehors de ce que gagne mari”, confie-t-elle en surenchérissant “pour m’organiser, j’ai ouvert un compte bancaire dans lequel je verse des petits montants. Je peux acheter une quantité de chikwangues à 20.000 francs, si je gagne 10.000 francs de bénéfice après vente, j’épargne 3.000 francs, 5000 francs vont servir à cuisiner pour ma famille et 2.000 francs pour le déjeuner du lendemain.”
"La journée, les policiers cassent et dispersent nos aliments"
Yvette a, pour sa part, décidé de faire ce commerce de nuit pour contourner les tracasseries des agents de la police.“ J’ai commencé à vendre à Kintambo/Magasin depuis 1995. Avant, je faisais mon commerce la journée mais, depuis quelques temps, les policiers passent pour casser, disperser et renverser nos aliments. C’est ainsi que j’ai décidé de commencer à vendre la nuit. Mon commerce me permet de scolariser mes enfants.”
La plupart de ces vendeuses sont soit des épouses soit des filles de militaires du camp Loano.
Prisca Lokale