Accord RDC–Rwanda : Tatiana Mukanire appelle à une paix fondée sur la vérité, la justice et la réparation

Tatiana Mukanire
Tatiana Mukanire

Alors que la République démocratique du Congo et le Rwanda ont signé, le 4 décembre 2025 à Washington, un nouvel accord de paix présenté comme un tournant historique après plus de trente ans de violences dans l’Est du pays, des voix s’élèvent pour mettre en garde contre un optimisme trop rapide. Parmi elles, celle de Tatiana Mukanire, figure des mouvements de victimes de violences sexuelles en RDC, rappelle que la paix ne peut être durable sans réel engagement, vérité, justice et réparation.

En effet, pour la coordinatrice nationale du mouvement des survivant.e.s des violences sexuelles en RDC, un accord de paix reste une avancée à accueillir favorablement. “Nous considérons que tout effort susceptible de contribuer à la fin des hostilités doit être encouragé. Les populations vivant dans les zones occupées par l’armée rwandaise et les supplétifs du M23 endurent depuis des années des souffrances indescriptibles. Toute initiative visant à apaiser leurs douleurs et à leur permettre de retrouver la paix mérite donc d’être saluée”, souligne-t-elle. 

Alors même que les deux chefs d’État concluaient l’accord aux États-Unis et jusqu’au lendemain de la signature, des affrontements étaient signalés à Kabare, Walungu et Uvira, dans le Sud-Kivu, en violation totale du protocole d’accord de Doha et de l’exigence de cessez-le-feu.


Pour Tatiana Mukanire, ce décalage entre les textes signés et les violences persistantes montre que « les engagements proclamés ne correspondent pas à la réalité que vivent les civils. Le cessez-le-feu n’est pas observé ».

Intégrer les droits, les besoins et les attentes des victimes

Tatiana Mukanire est formelle. Toute démarche de paix doit inclure les droits, les besoins et les attentes des victimes. Et pour y arriver, elle plaide pour la mise en place de mécanismes de recherche de la vérité véritablement indépendants (1), d’enquêtes rigoureuses sur les crimes commis (2), de poursuites sérieuses à l’encontre des responsables (3), de programmes de réparation adaptés (4).

Selon elle, sans justice, aucune paix ne pourra être durable. L’accord devrait donc prévoir une prise en charge complète, incluant assistance médicale, soutien psychosocial et programmes de réinsertion socioéconomique pour les survivants.

En dehors de ce processus qui a impliqué le gouvernement américain, d’autres processus de paix avaient précédés, notamment Nairobi, Luanda et Doha. Tous ont été salués, mais peu sont véritablement entrés en application. Pour la militante, l’accord de Washington ne doit pas rejoindre cette liste de textes restés lettre morte. Elle rappelle qu’au-delà des signatures prestigieuses, “la crédibilité des États-Unis et des partenaires impliqués dépendra des résultats concrets sur le terrain”.

Finalement, Tatiana Mukanire estime que l’heure n’est plus aux déclarations, mais à l’action.
Elle insiste “seule une paix qui reconnaît le martyre des victimes, établit la vérité et assure des réparations crédibles permettra de tourner la page de décennies de souffrance”.

Lire aussi : Sud-Kivu : quatre enfants tués dans une école frappée par un bombardement à Kaziba

RDC-Rwanda : "J’ai beaucoup confiance dans les deux dirigeants, ils respecteront leurs engagements et mettront en œuvre l’accord pour créer un avenir bien meilleur pour leurs peuples" (Donald Trump)

Prisca Lokale