L’ancien président congolais Joseph Kabila est sorti de six années de silence ce vendredi pour dresser une sévère critique de la gouvernance de son successeur, Félix Tshisekedi, qu’il accuse d’avoir "dilapidé" l’héritage de la première alternance pacifique dans l’histoire de la République démocratique du Congo (RDC).
Dans une déclaration solennelle retransmise depuis Kinshasa, l’ex-chef de l’État (2001-2019) a dénoncé "l’ivresse du pouvoir sans limite", l’"effondrement des institutions", la "violation de la Constitution" et une "dérive dictatoriale" ayant, selon lui, plongé le pays dans une crise multiforme. "Le Congo est gravement malade, et son pronostic vital est engagé", a-t-il déclaré.
Kabila, qui affirme avoir voulu favoriser "le fonctionnement harmonieux des institutions" à travers l’accord de coalition conclu en 2019 avec Tshisekedi, estime que cet arrangement a été trahi par une série de manœuvres politiques, notamment "le coup d’État institutionnel" de décembre 2020, "la nomination illégale" des membres de la CENI et les "élections frauduleuses" de 2023, qu’il qualifie de "simulacre".
Sur le plan économique, l’ancien président a fustigé "l’inaction" de l’actuel pouvoir face à la dégradation des conditions de vie, déplorant la résurgence de l’inflation, de la corruption, et un endettement "au-delà des dix milliards de dollars". Il dénonce également l’"asphyxie sociale", l’exode rural, et l’"angoisse existentielle" d’une jeunesse "abandonnée".
Sur le plan sécuritaire, Joseph Kabila accuse le régime d’avoir "sous-traité la sécurité à des groupes armés, des milices tribales et des mercenaires", affaiblissant l’armée nationale et favorisant une "régionalisation du conflit". Il pointe aussi du doigt la "répression sanglante" dans plusieurs provinces, évoquant notamment la mort de centaines de détenus à la prison de Makala en septembre 2024, qualifiée de "crime contre l’humanité".
L’ancien président propose un "pacte citoyen" articulé autour de douze priorités, dont la fin de la "tyrannie", la restauration de la démocratie, le retrait des troupes étrangères, et la relance d’un dialogue inclusif. Il appelle les Congolais à un "sursaut patriotique" pour "sauver le Congo".
Cette sortie, inédite depuis son départ du pouvoir, intervient alors que le président Tshisekedi entame son second mandat dans un climat politique et sécuritaire tendu. Le gouvernement n’avait pas immédiatement réagi à ces déclarations.