Les différents statuts des salariés en droit congolais

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En RDC, le statut des travailleurs varie selon le régime juridique qui leur est applicable.  A ce sujet, deux grandes catégories des personnes qui exercent une activité professionnelle sous l’autorité de leurs employeurs respectifs se distinguent. Il y a d’une part des travailleurs qui sont régis par le code du travail, et d’autre part ceux soumis au statut des agents de carrière des services publics. Cette distinction entraîne des différences notables en matière de droits, d’obligations et de protection sociale. 

1. Salariés relevant du Code du travail

Le code du travail encadre la relation entre employeurs et travailleurs du secteur privé et parapublic dès lors il est applicable à tous les employeurs et à tous les travailleurs, y compris ceux des entreprises publiques, exerçant leur activité professionnelle sur l’étendue de la R.D.C., quels que soient la race, le sexe, l’état civil, la religion, l’opinion politique, l’ascendance nationale, l’origine sociale, la nationalité des parties, la nature des prestations, la rémunération ou le lieu de conclusion du contrat, dès lors que ce dernier s’exécute sur le territoire de la R.D.C. Son application s’étend également aux travailleurs des services publics de l’Etat en vertu d’un contrat de travail[1].

Le même code prévoit qu’un contrat de travail peut  être à durée déterminée ou indéterminée, avec des droits tels que la rémunération, le repos, la sécurité sociale et les congés. Le licenciement y est encadré et ne peut intervenir que pour des motifs reconnus par la loi.

Ainsi par exemple, aux termes de l’article 62 du code travail  le contrat à durée indéterminée ne peut être résilié à l’initiative de l’employeur que pour un motif valable lié à l’aptitude ou à la conduite du travailleur. Cette résiliation doit se fonder les actes perpétrés sur les lieux de travail par le travailleur dans l’exercice de ses fonctions ; les actes perpétrés en dehors mais ayant leur fondement ou leur origine sur les lieux de travail dans l’exercice de ses fonctions ou les nécessités du fonctionnement de l’entreprise, de l’établissement ou du service. Ainsi ne constituent pas des motifs valables de licenciement tout ce qui n’entre dans l’esprit de cette disposition[2].

Enfin, les conflits entre employeurs et travailleurs sont du ressort de l’Inspection du travail et des juridictions du travail. Les salariés bénéficient également de la protection de la Caisse Nationale de Sécurité Sociale.

2. Agents de carrière des services publics

Contrairement aux salariés du secteur privé, les agents de carrière sont régis par un régime qui les lie directement à l’État ou aux collectivités publiques.  En droit positif congolais, les fonctionnaires sont principalement désignés sous le vocable agent de carrière des services publics de l’État. La Constitution du 18 février 2006 institue plusieurs statuts différents pour le personnel de l’Administration au niveau du pouvoir central : un statut des agents de carrière des services publics de l’État ; un statut du personnel de l’Enseignement supérieur, universitaire et de la recherche scientifique ; un statut des membres des Forces armées ; un statut du personnel de carrière de la Police nationale. De ceci, on peut remarquer que la RDC ne retient plus le principe de l’unicité de statut de tous les agents de carrière des services publics de l’État[3].

Enfin, l’administration publique congolaise n’est plus composée d’une seule fonction publique de l’État. Elle est désormais formée d’une fonction publique nationale, d’une part, et d’une fonction publique provinciale et locale, d’autre part. Le personnel relevant de la Fonction publique nationale est régi par un statut porté par une loi, alors que ceux des différentes fonctions publiques provinciales et locales seront régis par des édits provinciaux[4].

Les agents sont soumis à un régime disciplinaire plus strict et ne bénéficient pas toujours des mêmes mécanismes de négociation collective que les travailleurs du secteur privé. Ils sont affiliés à des régimes différents de sécurité sociale. 

3. Conséquences et enjeux de cette disparité

La dualité de statuts entraîne des différences en termes de stabilité d’emploi, de protection sociale et de règlement des litiges. Alors que les salariés du privé jouissent d’une certaine flexibilité dans leur parcours professionnel, les agents des carrières de services publics bénéficient d’une sécurité relative et n’ont vraiment pas la mobilité professionnelle. 

Fabrice TSHIBUYI KANKU


[1] Article 1er al. 1,  Loi N° 16/010 du 15 juillet 2016 modifiant et complétant la Loi N° 015-2002 portant code du travail

[2] KUMBU KI NGIM J.-M., Droit social. Droit  du travail et de la sécurité sociale, 4ème éd., Kinshasa, I.A.D.H.D., 2020, p.65

[3] VUNDUAWE te PEMAKO et MBOKO NDJ’ANDIMA (2020), Traité de droit administratif congolais, t.2, Bruxelles, Bruylant, p. 597.

[4] Idem.