RDC: Exécution des Kuluna, la peine de mort relance le débat sur l’insécurité et les dérives judiciaires

Photo ACTUALITE.CD.

Depuis l'annonce du ministre de la Justice et Garde des Sceaux de la RDC, Constant Mutamba, concernant l'exécution de la peine de mort contre les bandits urbains appelés "Kuluna", cette mesure a été diversement accueillie par les Kinois interrogés ce vendredi 10 janvier 2025. Certains estiment qu'elle permettra d'éradiquer l'insécurité qui gangrène les rues de la capitale.

D'autres habitants, cependant, craignent que cette initiative ne donne lieu à des exécutions arbitraires, transformant potentiellement le système en un "abattoir d'innocents". 

Des cicatrices visibles sur la tête, le cou et le visage témoignent encore du calvaire de Vincent Chirac Kabangu, assistant à l’Université des Sciences de l’Information et de la Communication (UNISIC). En décembre 2022, il avait été agressé par des Kuluna près de Pascal, dans la commune de Kimbanseke, alors qu’il rentrait de l’université. Blessé et dépouillé, il n’avait dû son salut qu’à l’intervention de passants qui l'avaient conduit à l’hôpital. Il soutient la peine de mort comme un moyen de restaurer la sécurité :

« Moi-même, je suis victime des Kuluna. Si on exécute ces criminels, je me sentirai mieux. On ne peut pas vivre dans une ville où l’on subit l’insécurité au quotidien, où l’on n’est pas libre de vaquer à ses occupations. Le 23 décembre 2022, je rentrais du travail, et j’ai failli perdre la vie à cause d’eux. Ils m’ont attaqué comme un animal. Quand j’ai appris à la télé que le ministre Mutamba avait lancé cette initiative, c’était un soulagement pour moi », a-t-il déclaré.

Cependant, Esaïe Tutonda, un jeune juriste, s’oppose à cette mesure. Il considère que la justice congolaise, décrite comme "malade" par le chef de l’État lui-même, n’est pas en état de prendre des décisions aussi graves :

« La peine de mort ne sera qu’un outil du plus fort pour écraser le plus faible. Les Kuluna sont des malades à traiter, et la justice devrait d'abord guérir ses propres maux avant d’infliger des sanctions aussi sévères », a-t-il affirmé.

Myriam Lunzeya Pezo, une autre victime des Kuluna, partage un avis favorable à la mesure. Elle se souvient du jour où elle avait failli être décapitée par ces bandits alors qu’elle se rendait à son travail :

« Une fois, à 5 heures du matin, un Kuluna a mis une machette sur ma tête. Par la grâce de Dieu, il s’est contenté de prendre mon sac sans me blesser. Mais si ce jour-là, il m’avait donné un coup de machette, je ne serais plus là. Ces criminels ne méritent pas de pitié. Même si l’un des membres de ma famille était un Kuluna, il mériterait d’être puni. »

D’autres Kinois, comme Héritier, estiment que cette annonce est davantage une campagne de communication destinée à effrayer les Kuluna. Il plaide pour une approche plus structurelle :

« Le vrai problème est d’identifier les causes profondes de ce phénomène. Il faut repenser l’éducation dans les familles, les écoles et les églises, tout en créant des opportunités d’emploi pour les jeunes laissés-pour-compte. »

Joseph Mbaya, un motard croisé sur le boulevard du 30 juin, a tenu à soutenir fermement le ministre Mutamba : 

« Celui qui tue par l’épée mourra par l’épée. Si quelqu’un tente de freiner cet élan, il trouvera les Congolais sur son chemin », a-t-il lancé.

Enfin, Judex Pondu appelle le gouvernement à créer des équipes spécialisées dans les quartiers pour identifier les vrais Kuluna, afin d’éviter les erreurs judiciaires. Il a cité le cas d’un jeune salutiste qui s’était retrouvé injustement accusé parmi les délinquants récemment évoqués par le ministre.

César Olombo