Le chef milicien Sikuli Lafontaine est décédé dans la nuit du dimanche à ce lundi 28 octobre à Butembo (Nord-Kivu). D'après des sources proches des mouvements Wazalendo, ce général autoproclamé mai-mai s'est retranché dans cette ville depuis quelques semaines pour des raisons de santé. "Depuis un temps, il était souffrant du diabète, et il se serait replié ici (à Butembo), sentant sa mort prochaine", a confirmé, à ACTUALITE.CD, un proche du défunt.
Kakule Sikuli dit Lafontaine décède pendant pendant que pesait sur lui des graves soupçons de son alliance avec les rebelles pro-Rwandais du M23 qui ont conquis le Sud de Lubero où, il y a quelques années, Lafontaine régnait en maître.
Ce que l’on sait de Sikuli Lafontaine
D’après le Groupe d’Associations de Défense des Droits de l’Homme et de la Paix (GADHOP), une plateforme d’une dizaine d’ONG de défense des droits de l’homme basée à Butembo (Nord-Kivu), la milice de Sikuli Lafontaine, l’Union des patriotes congolais pour la paix (UPCP) était basée à Bunyatenge, au Sud du territoire de Lubero. Il y a près de dix ans, son groupe avait réussi, « à créer un «modus vivendi» avec les FDLR (Forces Démocratiques pour la Libération du Rwanda) en leur interdisant de commettre de nombreuses violations des droits humains auxquelles ces derniers s’adonnaient chaque jour, comme les incendies des villages, les braquages sur les routes, les viols des femmes ».
Ce qui amenait certaines organisations, comme le GADHOP, à estimer que Lafontaine détenait « la clé du désarmement des FDLR étant donné ses relations de collaboration et de confiance mutuelle ». Mais la coalition de FDLR-UPCP a été fragilisée avec la montée en puissance, en 2015 notamment, des groupes Mai-mai Kyaghanda Yira et plus tard Union des Patriotes pour la Défense des Indignés (UPDI).
D’après un rapport du Groupe d’étude sur le Congo (GEC), certains éléments de l’UPCP de Lafontaine avaient d’ailleurs résolu de se joindre à l’UPDI « pour combattre ce que la plupart d’entre eux qualifient d’occupation étrangère ». Des analystes présentent ainsi le groupe de Lafontaine comme étant affaibli.
« Lafontaine est l'un des vétérans de Chefs Maï-maï de la région notamment dans le sud de Lubero. Officiellement, il a pris les armes pour protéger sa terre natale de l'invasion des Rwandais spécialement Tutsi. Il a souvent travaillé avec les FDLR. Il a fait autant de reddition et est retourné en brousse estimant que Kinshasa n'était pas sincère. Récemment, il a rejoint une coalition de groupes armés du Grand Nord en Ouganda. Certaines sources estiment qu'il n'a plus assez d'influence après avoir perdu beaucoup de ses hommes. Ce qui le pousse à saisir la main tendue de Kinshasa », indique, à ACTUALITE.CD, le journaliste Nicaise Kibel Bel'Oka, qui a beaucoup documenté la dynamique des conflits dans l'Est du Congo.
Kakule Sikuli dit Lafontaine était l’un des fondateurs du Pareco, l’un des premiers mouvements de résistance à se créer contre le CNDP au lendemain des élections de 2006. Par deux fois au moins, ce dernier avait annoncé sa reddition. Le 4 mai 2020, il annonçait avoir déposé les armes pour « répondre effectivement à l’appel du Chef de l’Etat, son excellence Félix Tshisekedi Tshilombo parce qu’il a au moins le souci de ramener la paix en République démocratique du Congo, particulièrement dans l’Est».
Claude Sengenya