Le secrétaire général de la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO), Donatien Nshole, a fermement réagi à l'annonce faite par le président Félix Tshisekedi de proposer une nouvelle Constitution dès l'année prochaine. Lors d'une intervention sur Radio Okapi, Nshole a rappelé la position des évêques congolais, qui voient dans cette démarche un risque pour la stabilité du pays dans le contexte actuel.
« C'est une position politique, mais du côté de l'Église et de la société civile, nous pensons que c'est quelque chose à décourager dans le contexte actuel, quelle que soit la pertinence de l'un ou l'autre point relevé pour justifier cette démarche », a-t-il déclaré. Donatien Nshole a insisté sur le fait que toucher à la Constitution en ce moment pourrait être une initiative dangereuse sur les plans social, sécuritaire et politique.
Un contexte social tendu
Nshole a dressé un tableau préoccupant de la situation sociale en RDC, marquée par des grèves répétées et un climat d'incertitude. « On est dans un environnement où aujourd'hui il y a des grèves ici, demain il y a des grèves là-bas, et on ne voit pas de solution dans un avenir proche », a-t-il souligné. Pour lui, la situation sociale, loin de s'améliorer, demeure fragile, ce qui rend toute tentative de modification de la Constitution encore plus risquée.
Des raisons sécuritaires à prendre en compte
Nshole a mis en garde contre les dangers sécuritaires d'une telle initiative, évoquant les tensions qui pourraient naître d'un projet de changement de la Constitution. « Ce projet de changement de constitution ou de révision de constitution, qui a fait des morts, ne passera pas sans un brin de fer social. Cela pourrait ouvrir un nouveau front de tensions dans un pays déjà fragilisé, particulièrement à l'Est », a-t-il averti, soulignant que la situation sécuritaire ne permet pas de mener de telles réformes en ce moment.
Un débat ancien et toujours d'actualité
Pour Nshole, le débat sur la révision de la Constitution ne date pas d'hier. Il a rappelé qu'il y a une dizaine d'années, les mêmes arguments étaient avancés par les opposants de l'époque, y compris par l'actuel président Félix Tshisekedi. « En ce temps-là déjà, l'actuel président de la République, le sien, disait que le problème ce n'est pas la Constitution, mais c'est le social du Congolais », a-t-il déclaré, ajoutant que la situation actuelle n'a pas suffisamment évolué pour justifier un changement de la Constitution.
Inquiétudes politiques et risques de manipulation
Sur le plan politique, Donatien Nshole a exprimé ses préoccupations quant à la manière dont une révision constitutionnelle pourrait être instrumentalisée. Il a notamment évoqué les élections passées, accusant certains élus d'avoir accédé à des postes par des pratiques douteuses. « Nous savons ce qui s'est passé particulièrement au niveau de la députation nationale, où beaucoup se sont retrouvés là sans avoir été élus, qui se retrouvent là-bas à coups d'argent », a-t-il déclaré, soulignant que la crédibilité des institutions pourrait être affectée par une modification de la Constitution.
Un appel à la prudence et à la réflexion
Donatien Nshole a appelé à une réflexion approfondie avant d'envisager toute révision constitutionnelle, mettant en garde contre les conséquences d'une décision précipitée. « Ce projet de changement pourrait déstabiliser le pays, qui est déjà fragile. C'est pourquoi les évêques demandent de bien réfléchir, car si cette question n'est pas bien traitée, cela va déstabiliser le pays », a-t-il expliqué.
Une exhortation au président Tshisekedi
Lorsqu'on lui a demandé ce qu'il dirait directement au chef de l'État, Donatien Nshole n'a pas hésité à lui adresser un message clair. « Je vais le supplier d'écouter les évêques, qui tous réunis ensemble ne peuvent vouloir que le bien de ce pays. Qu'il n'écoute pas ses collaborateurs, qui ne voient pas plus loin que leurs ventes, leurs familles, leurs pouvoirs. C'est lui qui assumera la responsabilité de ce qui arrivera », a-t-il déclaré, insistant sur l'importance de privilégier l'intérêt du peuple congolais et la stabilité du pays.
Selon Nshole, des solutions aux problèmes actuels peuvent être trouvées sans toucher à la Constitution, en se concentrant sur la résolution des défis sociaux et politiques qui minent le pays.