Cela fait plus de sept semaines que le directeur de publication adjoint d’Actualité est détenu à la prison de Makala et la mobilisation ne faiblit pas. Après les journalistes, les militants de défense des droits de l’homme, c’est au tour des caricaturistes de presse de montrer leur solidarité avec notre confrère.
“En voulant étouffer une voix, ils ont oublié qu'il y avait des millions d'autres derrière elle", explique l’artiste congolais Edizon Musavuli, contributeur d’Habari RDC. C’est le dessin du fils de Sauveur Mulwan, célèbre sculpteur congolais dont les œuvres ornent Butembo et Beni, qui ouvre ce nouveau volet de la campagne #FreeStanis. Il montre un Stanis Bujakera avec tous les attributs du reporter. Porté par la foule de ses soutiens, il semble prêt à sortir du trou où il a été plongé.
Depuis le 8 septembre, notre confrère, également correspondant de Jeune Afrique et de Reuters, a été arrêté. Il est jugé depuis le 13 octobre devant le tribunal de Grande Instance de Kinshasa Gombe pour « faux en écriture », « falsification des sceaux de l’État », « propagation de faux bruits » et « transmission de messages erronés et contraires à la loi » et risque jusqu’à dix ans de prison. Ses avocats dénoncent une accusation fabriquée de toute pièce.
Cette initiative a été lancée entre autres par Damien Glez, dessinateur franco-burkinabé et confrère de Stanis Bujakera à Jeune Afrique. Il a mobilisé ses confrères et amis du réseau Cartooning for Peace. « Il m’a semblé important, en tant que dessinateur de presse, de me mobiliser pour Stanis. Un cartoonist est un journaliste un peu à part et il ne prétend pas être un spécialiste du droit, mais le cas de ce journaliste congolais m’a vraiment interpellé, et pas seulement parce qu’il est un collègue de JA », explique Damien Glez. « Même s’ils sont fréquemment sollicités, et réagissent en général aux atteintes des droits humains des dessinateurs, ils ont tenu à prendre rapidement leur crayon pour exprimer leur indignation, chacun avec son style », précise-t-il.
Une dizaine de caricaturistes de presse et artistes ont déjà répondu à l’appel. D’autres ont promis de le faire, comme ceux du réseau Africartoons.
“Ce projet #FreeStanis est particulièrement intéressant pour les caricaturistes car nous sommes des défenseurs de la liberté d'expression et nous soutenons tous nos collègues des médias dont les droits sont bafoués”, a expliqué à Actualite.cd son fondateur John Curtis. “Les caricatures sont un excellent moyen de plaidoyer, car elles permettent de faire passer des messages complexes rapidement et d'une manière compréhensible par tous”, précise-t-il encore.
Pour le dessinateur togolais Joël Adotévi, le geste de prendre le crayon, le pinceau pour soutenir un confrère africain détenu, c’est plus qu’un geste de solidarité. « En tant que journaliste caricaturiste, en tant que leader d’opinion, je me suis senti opprimé dans l’exercice de mes fonctions », a-t-il expliqué à Actualite.cd.
Ces dessins seront diffusés tous les jours à compter de ce mardi sur leurs réseaux sociaux de Jeune Afrique et Actualité.cd, ainsi que sur ceux d’Africartoons.
Depuis le début de la campagne #FreeStanis, plus d’une centaine de personnalités et organisations congolaises, africaines et internationales ont fait part de leur indignation, notamment dans une série de messages vidéos qui ont été vus par des millions de personnes à travers le monde.
La prochaine audience dans le procès contre Stanis Bujakera se tiendra ce vendredi 3 novembre. Ses avocats vont à nouveau réclamer sa remise en liberté provisoire.
Dessinateur de presse franco-burkinabè, Damien Glez est un touche-à-tout de talent. Chroniqueur – vous pouvez lire ses texte chaque jour dans Jeune Afrique et il collabore également avec RFI, Habari RDC ou encore Benbere –, il est aussi parolier, et même scénariste de séries télévisées. Il a par ailleurs été le directeur de publication du Journal du jeudi, hebdomadaire satirique burkinabè qui a fait école sur le continent.
Dessinateur tunisien, Mykaïa Tramoni-Caparros se donne pour mission de « faire réfléchir, émouvoir ou encore dénoncer, parfois même provoquer », avec ses œuvres. Ses cibles privilégiées ? « La bêtise crasse et les intégrismes de tous poils », affiche-t-il. Collaborateur de nombreux médias – Siné Hebdo, Le Monde, Arte, France Ô… –, il intervient également dans la presse d’entreprise, à laquelle il insuffle son humour grinçant et décalé.
Constant Tonakpa, notamment lauréat du prix RFI-RSF dans la catégorie dessin de presse en 2006, collabore avec de nombreux médias et maisons d’édition. Il est également auteur de bandes dessinées et se montre très actif au sein de nombreuses associations et réseaux internationaux de dessinateurs de presse.
Main2Dieu, de son vrai nom Christian Arnaud Bassole, est un dessinateur burkinabè qui signe dans plusieurs médias de son pays (L’Étalon, Le Pays, Sidwaya…). Depuis 2019, il publie également ses dessins dans Gbich!, journal satirique ivoirien.
Né en France, El Marto y a fait ses classes avant de s’installer au Burkina Faso, d’où est originaire son père. Outre ses dessins satiriques de presse, il a également illustré des enquêtes journalistiques, a réalisé une fresque géante qui trône dans les rues de Meknès et a signé un roman graphique.
Dessinateur de presse depuis le début des années 1990, il multiplie les collaborations avec de nombreux médias et, outre son engagement au sein de Cartooning for Peace, il est également très actif dans les écoles, lycées et collèges, où il porte la bonne parole de l’art du dessin de presse.
Originaire de l’est de la RDC, où il vit toujours après quelques années passées à Kinshasa, Justin Kasereka se fait le chroniqueur visuel et sans concession de l’insécurité qui prévaut dans son Kivu natal. Dans son œuvre aux formes très géométriques immédiatement identifiables, que la galerie Demif décrit comme une « plongée dans le symbolisme ethnographique africain et une projection vers un futur possible », il cherche à nous « projeter hors de l’amnésie collective et sélective ».
Joël Adotévi (Togo)
Illustrateur, bédéiste et dessinateur de presse, le Togolais Joël Adotévi oscille entre deux styles graphiques aux antipodes, l’un semi-réaliste, l’autre plus débridé. Pour lui, dessiner pour Stanis Bujakera Tshiamala était comme une évidence. « En tant que journaliste caricaturiste, en tant que leader d’opinion, je me suis senti opprimé dans l’exercice de mes fonctions », assure le dessinateur.
Dessinateur français qui fuit la lumière et préfère conserver sa réelle identité secrète, Rox publie ses dessins dans plusieurs médias africains – Le Marabout, Le Journal du jeudi, La Mèche ou encore Zélium.
"Si nous voulons poursuivre la construction d’un état démocratique, il nous faut scrupuleusement respecter certains principes, notamment la liberté de la presse qui est la pierre angulaire de la démocratie. Tiens bon, StanisBukajera », dit Thembo Kash, dessinateur de BD qui croque l’actualité politique pour @actualitecd.