Plusieurs localités ainsi que les cités de Kiwanja et Rutshuru-Centre (Nord-Kivu) sont actuellement assiégées par les rebelles du M23. Cette résurgence des combats entre les forces armées de la RDC et le groupe armé a occasionné le déplacement, selon l’ONU, de 50.000 personnes en onze jours. Depuis Rutshuru, Goma et Bukavu, trois activistes reviennent sur la situation.
« Nous sommes actuellement dans la chefferie de Bwito, une partie de la population s’y est réfugiée. Les affrontements se poursuivent au niveau des localités de Mabenga et Tongo. Les rebelles du M23 s’opposent aux Forces armées de la RDC », explique Neema Serutoke, une activiste des droits des femmes basée à Rutshuru qui tente de joindre Goma.
Elle décrit en même temps les pénibles conditions dans lesquelles se trouvent les familles à Bwito.
« A l’heure actuelle, les femmes, les hommes et les enfants dorment ensemble sur des nattes. Il n’y a pas d’installations sanitaires propres, les populations ont quitté à la hâte leurs domiciles, il n’y a pas de nourriture. Il y a des enfants entre 15 ans et 2 ans qui ont parcouru plus de 50 kilomètres à pied, certains ont les jambes gonflées depuis plus de deux jours et ne reçoivent pas de soins. Ils doivent encore se lever pour marcher jusqu’à Goma. Certaines personnes se sont retirées dans les villages d’Ishasha et Nyamilima ».
Si les uns espèrent trouver des moyens de survie à Goma, Mamy Kahambu qui travaille dans une organisation des droits humains dans le chef-lieu du Nord-Kivu renseigne que les conditions ne sont pas favorables et plaide pour des mesures urgentes.
« Depuis vendredi, nous vivons dans la psychose. Nous sommes à quelques kilomètres des zones où se déroulent les affrontements. La population qui s’est déplacée vit dans des conditions misérables. On veut s’approvisionner en produits vivriers mais les commerçants ont augmenté les prix. Tout le monde ne peut pas y avoir accès. Il n’y a pas d’eau. Les populations arrivent dans la ville de Goma mais nous n’avons rien à mettre à leur disposition. Hier, c’était une journée ville morte. Nous n’avons pas pu vaquer à nos occupations. A Goma, il n’y a pas de champs, nous dépendons en grande partie de la population de Rutshuru. Mais il n’y a plus de trafic depuis que la RN2 est coupée », dit-elle.
Sécurité, soins de santé, maternités
« Parmi les femmes en déplacement, il y a aussi des femmes enceintes. Nous avons appris hier que trois femmes ont accouché en cours de route. Mais qui va les prendre en charge ? Il faut des services urgents pour faciliter une prise en charge sanitaire», a dit Mamy Kahambu.
Depuis Bukavu, Odile Bulabula, coordonnatrice de RIO a été parmi les intervenants d’un atelier sur la médiation. Elle estime que la résurgence des M23, après plus de trois semaines d'accalmie, démontre notamment qu’il y a des failles au niveau de l’Armée congolaise et appelle à les relever.
« Nous avons atteint un niveau où cette situation d’insécurité nous dépasse. La population vit dans un traumatisme sans fin. En tant que Congolais, nous avons essayé par tous les moyens de faire revenir la paix dans notre région mais cela n’arrive toujours pas. Est ce une preuve que notre armée n’est pas suffisamment équipée pour faire face à l’ennemi. Les militaires ont-ils été payés ? N’y a-t- il pas eu des trahisons dans cette nouvelle avancée. Pour répondre il faut à tout prix une mobilisation de l’Etat congolais pour garantir la paix et la sécurité aux femmes et aux enfants », a-t-elle conseillé.
Prisca Lokale