Leçon aux casseurs des investisseurs
Un vieux contentieux de 1984 rattrape la RDC 38 ans après !
Une très bonne raison pour ceux qui croient faire peur aux investisseurs opérationnels de bien s'y prendre...
Au cours du conseil des ministres du 21 octobre dernier présidé par le Premier ministre Jean-Michel Sama Lukonde, il a été fait état du « Rapport relatif au contentieux de la République Démocratique du Congo contre FG Hémisphère ». Le ministre d'État en charge de la Justice d’Etat et Garde des Sceaux en a informé le Conseil « consécutivement aux recommandations du Président de la République formulées au cours de la 41ème Réunion du Conseil des Ministres, qu’elle a eu des échanges avec FG Hémisphère », signale le compte-rendu de cette réunion…
Il s'avère, selon effectivement ce compte-rendu, que « Cette structure a marqué son accord pour le règlement de ce contentieux par la voie des négociations ».
Ce n'est pas tout. Autre litige, celui de la RDC avec la Société Transvale Mining SA. Il y est relevé que « la Ministre d’Etat, Ministre de la Justice et Garde des Sceaux a indiqué que les négociations évoluent positivement dans le sens de résoudre à l’amiable ce différend né entre deux parties en rapport avec le projet de Construction de la Centrale hydroélectrique de Busanga ».
S'agissant de « FG Hémisphère », le journal « EcoNews », dans son édition du lundi 24 octobre 2022, en fait la genèse suivante : « C’est donc un vieux litige d’une dizaine d’années mettant en cause la SNEL (Société nationale d’électricité), qui est en voie d’être décanté. En septembre 2004, FG Hémisphere a racheté une créance de 18 millions de dollars US envers la SNEL. La dette de la SNEL datait des années 1980. Elle avait été contractée auprès d’une société yougoslave Energoinvest. Son montant initial était de 37 millions de dollars US. Energoinvest avait fourni et installé le matériel électronique du barrage de Mobayi-Mbongo dans l’ancienne province de l’Equateur. Mais faute de recouvrer sa créance après plusieurs années de démarches infructueuses, en 2004, Energoinvest qui, entre temps, était devenue serbe après l’éclatement de la Yougoslavie, avait fini par céder celle-ci à HG Hémisphère, moyennant une décote importante. Ainsi, FG Hemisphere a obtenu le droit de se faire rembourser une dette de 100 millions de dollars US alors qu’il n’a déboursé que 37 millions de dollars US. Et chaque jour, cette dette augmente de 27.500 dollars à cause des intérêts. Ce qui met sérieusement en difficulté le gouvernement qui vient de choisir la voie des négociations pour clore ce litige».
Ainsi, au nom du principe de continuité de l'Etat, ce vieux litige de 1984 ayant traversé des décennies et résisté à l'oubli s’est rappelé au bon souvenir du congolais.
Symbole Hong Kong
La leçon à en tirer est qu'on peut aujourd'hui, peut-être par patriotisme, peut-être par orgueil personnel, se considérer en droit de régler des comptes à un investisseur soit parce qu’on le déteste, soit parce qu’on est obligé de le détester. Mais, au final, l'Etat dont on se dit serviteur engagé pourrait être rattrapé par la justice et contraint à des pénalités.
C'est la raison pour laquelle dans le traitement de n'importe quel dossier pouvant devenir un contentieux entre la République Démocratique du Congo et un partenaire, il est toujours prudent de s'informer de tous les contours de l’affaire avant de décider de quoi que ce soit.
L’affaire « FG Hémisphère » est l’arbre qui cache la forêt. Dans bien des tribunaux des pays étrangers et des tribunaux internationaux traînent des dossiers judiciaires de diverses natures contre la RDC. D’où toutes ces menaces de saisie des avoirs du Trésor public dans les pays occidentaux. Les mêmes pays, malheureusement, pour lesquels les « Dr Justice » congolais traquent des investisseurs non américains et non européens et dont les multinationales soutenues par leurs gouvernements sont pour quelque chose dans l’insécurité qui prévaut au Congo.
Cette affaire renvoie à la symbolique Hong Kong faisant que plus personne ne néglige ses relations avec la Chine. A commencer par les puissances occidentales.
A son époque, Mobutu s’interrogeait sur le sens du commerce triangulaire. En effet, lorsque Kinshasa voulait se procurer de la viande argentine en boîte de conserve, son passage obligé était Bruxelles, Paris ou Washington.
Aujourd’hui, cette formule est devenue beaucoup plus ouverte : Bruxelles, Paris et Washington sont libres de faire des affaires avec Beijing, Kinshasa non. Sauf en obtenant le parrainage de l’une de ces capitales. Dans le cas contraire, le régime en place est malmené au point même de se voir imposé la guerre. Félix Tshisekedi l’a déclaré au cours d’un entretien avec les députés de l’Union sacrée.
Affaire d’initiés…
Paradoxalement, il se trouve des Congolais qui, une cinquantaine d’années après, croient servir leur pays en agissant par procuration, faisant des amis de leurs ennemis leurs ennemis.
Lorsque, cependant, un tribunal belge, français ou américain saisit les comptes de la RDC à l’étranger pour un contentieux comme celui de « FG Hémisphère », ces Congolais (ou leurs successeurs en poste) se font tout petits. Pire, ils deviennent muets comme une carpe.
Bien entendu, ils ne seront pas ou plus aux affaires, voire de ce monde, lorsque les « FG Hémisphère » accepteront de négocier à l’amiable avec le Gouvernement le paiement ayant produit de gros intérêts.
Au départ, 18 millions. Après, 37 millions. Et maintenant, 100 millions USD !
On a bien l’impression qu’il s’agit d’une affaire d’initiés…
Serge Kadima