Avec leurs blindés, armes et munitions, les militaires ougandais récemment arrivés en Ituri, dans le nord-est de la RDC, ont installé une base à l'aérodrome de la localité de Boga, dont les habitants attendent maintenant "du concret" contre les rebelles ADF.
Boga, en territoire d'Irumu, a été la cible de plusieurs attaques armées, qui ont notamment visé en juin dernier l'hôpital, incendié lors d'un assaut des ADF (Forces démocratiques alliées). Unique structure sanitaire de la région, qui était soutenue par Médecins sans Frontières, l'établissement attend toujours une improbable réhabilitation.
Fin novembre dernier, avec l'accord de Kinshasa, les troupes ougandaises sont entrées en République démocratique du Congo, d'abord dans le Nord-Kivu puis, fin janvier, en Ituri, deux provinces voisines frontalières de l'Ouganda.
L'opération vise à combattre les rebelles ADF, présentés par l'organisation Etat islamique (EI) comme sa branche en Afrique centrale, accusés de nombreux massacres dans l'est de la RDC et d'attentats jihadistes sur le sol ougandais.
De Boga, le Nord-Kivu est tout proche. A une vingtaine de km de sa base, à Kainama, l'armée ougandaise a installé deux positions militaires. En fin de semaine dernière, les soldats étaient encore occupés à débroussailler, à construire leurs abris et sanitaires. Un autre groupe de militaires en colonne patrouillait dans la cité, a constaté un correspondant de l'AFP.
"Nous sommes venus combattre les ADF, les ennemis communs de l'Ouganda et de la RDC, nous allons les traquer jusqu'au bout, pour que les Congolais recouvrent la paix", assure un militaire ougandais.
Un haut responsable du commandement militaire congolais assure de son côté que l'armée de RDC (FARDC) a installé "plus de 60 positions" dans la région pour combattre les rebelles.
Sur les quelque 70 km séparant Kainama du village de Burasi, à la frontière ougandaise, le correspondant de l'AFP en a compté une dizaine, installées en brousse, dans des villages abandonnés après des attaques d'hommes armés ou encore non loin des habitations de civils qui retournent progressivement chez eux.
- "Pas d'affrontements directs" -
Des militaires venus du Nord-Kivu ont été déployés récemment dans le territoire d'Irumu, où les premières attaques d'envergure des ADF remontent à 2020.
"Je suis très content de ce renfort des militaires FARDC que je réclamais depuis longtemps. Voyez comment ma chefferie est vidée de sa population, près des 80% des habitants sont partis", déclare Babanilao Tchabi, responsable de la chefferie (entité administrative) de Banyali Tchabi. En novembre, une attaque dans la localité attribuée aux ADF avait fait 23 morts, dont l'épouse de Babanilao Tchabi.
La présence des militaires congolais et ougandais dans la zone, "c'est bien, mais nous ne serons contents que le jour où nous allons voir les opérations menées contre l'ennemi", tempère Jeanpy Kisembo, un riverain.
"Nous voulons voir le concret, car les rebelles ne sont pas loin d'ici", ajoute-t-il.
"Les FARDC sont avec les militaires ougandais, ils planifient des opérations, font des patrouilles ensemble. Mais jusque-là, il n'y a pas eu d'affrontements directs avec l'ennemi" en Ituri, explique le haut responsable militaire congolais.
Par ailleurs, à Boga, Tchabi ou dans la localité voisine de Mitego, la tension est perceptible entre certaines communautés et les "Banyabwisha", des Congolais aux lointaines origines rwandaises, dont certains sont accusés de complicité avec les ADF.
"Parmi vous, il y a ceux qui collaborent avec les ADF!", accuse lors d'un meeting le colonel Siro Simba, administrateur du territoire d'Irumu, en s'adressant aux Banyabwisha.
"Notre ennemi ce sont les ADF. Tous ceux qui les aident, nous allons les traquer, sans exception", promet-il. "Vous avez intérêt à collaborer activement avec les FARDC et nos amis militaires ougandais qui sont ici pour traquer les rebelles", exhorte le colonel.
AFP avec ACTUALITE.CD