ESU : doit-on interdire la vente du syllabus ?

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Le point de vue du Président de la République et de l'actuel Ministre de l'ESU de l'interdiction de la « vente du syllabus » repose-t-il sur une base rationnelle ?

1. Ce que certains semblent ignorer c'est le fait que le support que l'enseignant met à la disposition des étudiants est son œuvre d'esprit. Et il a le droit de  vendre celle-ci ou d'en exiger le droit comme auteur. Et c'est légal.

2. Ainsi, le caractère légal de la vente du syllabus repose, en droit congolais, sur un droit objectif : Les droits d'auteur et propriété intellectuelle (Constitution de la RD.Congo, art. 46). Sur cette base, l'on ne doit pas prôner un Etat de droit et méconnaître ou piétiner les droits économiques, sociaux et culturels des professeurs des universités. Une telle décision serait inconstitutionnelle. Mais on y est pas encore arrivé, aucune ordonnance présidentielle n'est prise dans ce sens. L'époque où la parole du Chef était la loi est revolue.

3. L'article 161 de la Loi N°18/038 du 29 décembre 2018 portant Statut du Personnel de l'ESU RS ne fait pas de la « vente » d'un support, en régime disciplinaire, un manquement du devoir professionnel du Professeur.  Et cette pratique est la chose universitaire la mieux partagée.

4. Cependant, ce qui est un abus, une faute, ce qui est répressible et dont  la sanction à appliquer est le « retrait de la charge horaire » pour une durée ne dépassant pas une année académique c'est:

- la vente de syllabus conditionnée à la citation des TP, des interrogations et des examens;

- la vente forcée des fascicules et syllabus.

5. L'exposé de motif de cette loi-ci, indique bien les motivation de sa légifération, entre autres: donner l'impulsion aux équipes des établissements d'ESURS; renforcer significativement la place des valeurs de la fonction enseignante ainsi que les règles applicables en matière de déontologie en actualisant les obligations et les garanties fondamentales accordées au personnel enseignant. Comment peut-on passer du droit objectif au hors la loi? Doit-on, en tant que garant du bon fonctionnement régulier des institutions, violer la la Constitution et abroger, verbalement, les lois de la République (article 74 de la Constitution) ?

6. Vendre un syllabus n'est pas un acte éthiquement, scientifiquement, académiquement mauvais et pénalement punissable. Mais, c'est obliger son achat qui est répressible.

7. Ce n'est pas de l'ordre verbalement, la vente du syllabus par nos autorités congolaises, ce n'est pas de l'ordre que l'on veut mettre dans le système de l'ESU mais l'on inaugure un désordre et une anarchie, une dictature,...

8. Donc, tant que le gouvernement congolais, employeur du Professeur, ne discutera pas avec celui-ci sur la ventilation de son salaire (qui peut incorporer le droit d'auteur et de propriété intellectuelle en lien avec le syllabus produit); tant que l'Etat Congolais ne subventionnera pas ses établissements publics et privés qui peuvent par eux-mêmes installer le WiFi en leurs seins sans le  don-populiste; tant qu'il n'y aura pas des imprimeries universitaires;  vendre un syllabus est un droit du Professeur et son acquisition par un étudiant conscient est une nécessité. D'ailleurs, l'article 16 du règlement en vigueur des étudiants en RD. Congo l'oblige à exécuter toutes les tâches qui lui sont proposées dans le cadre de sa formation.

9. L'avantage que j'ai est d'être à la fois Professeur en RD.Congo et étudiant à l'Université Catholique de Louvain en Belgique où le syllabus se vend et il y a le CIACCO et le DUC.

10. Je pense qu'il faut enseigner ou étudier dans le contexte congolais pour ressentir l'importance que le syllabus joue dans la formation des futurs cadres de conception.

11. Acheter un syllabus par l'étudiant est une initiation à la culture de l'achat des œuvres de l'esprit, les livres et revues. Il serait éthiquement, juridiquement et scientifiquement mauvais le fait d'interdire la vente d'une œuvre d'esprit sans proposer au retour un mécanisme juste du recouvrement du droit d'auteur. 

Professeur Giscard Loando, PhD