Pourquoi faut-il lire " Bateki mboka" de Tata N'longi

Bateki Mboka de Tata Longi Biatitudes

D’abord, parce que c’est Tata N’longi, l’auteur du livre. C’est un écrivain et avocat à l’écriture directe. Son verbe claque comme sa pensée. Sa plume donne des coups poignants. Une écriture qui interpelle quand il le faut Tshisekedi et à haute voix. Une plume qui caresse parfois les maux de la vie à travers des poèmes, mais surtout qui cogne sur les maux de la société. La nôtre. Lire Tata N’longi peut facilement vous faire basculer de spectateur en acteur au sein de votre communauté.  C’est le cas de son dernier livre : Bateki Mboka, publié en 2020. 68 pages, aux éditions Nzoi en République démocratique du Congo.

Et puis une autre raison de lire ce livre, c’est que le titre intrigue et accroche. « Bateki Mboka » est en lingala et veut dire, en français, : « Ils ont vendu le pays ». Et tout de suite, on veut savoir : par qui ? À qui ? Et pourquoi ? C’est un titre politique, je dirais. Un titre qui renvoie au théâtre politique, la pièce théâtrale sociopolitique du Congo. 

Le théâtre est pour moi un format qui définit assez bien le mot liberté et permet de déblayer tout ce qui bloque la prise de parole. L’écriture théâtrale écrase chaque jour les mots qui restent muets dans la pensée et se cache au fond d’une langue qui ne veut céder à la pression des mots. Le but du théâtre, c’est aussi de véhiculer une forme d'éducation pour l'épanouissement de l'individu, ai-je lu quelque part.

Dans le livre « Bateki Mboka », l’histoire parle d’un ancien chef de gare un peu fou et son morceau de train. Des mines abandonnées et un général dictateur geôlier des rêves de ses sujets. Une jeune fille qui veut libérer des rêves et un fils qui doit choisir son camp. Ces histoires entremêlées font l’histoire d’une cité perdue malgré des grandes richesses, confrontée à la pauvreté de son peuple, à la détresse de ses aînés et au désespoir de sa jeunesse.

L’auteur s’est-il lancé dans un théâtre politique ? Il y a eu cette envie de revoir mes notes de Pro Archia quand je lisais pour la première fois le livre. Est-ce parce que l’auteur est un avocat et qu’il défend le droit de la cité ? Et pas seulement le droit de cité d'un poète ? La nuance est là, mais chaque page du livre rappelle notre quotidien au Congo. Cette crise socio-économique qui se prolonge depuis des années, ces autorités trop égoïstes pour penser aux vrais besoins de la population plutôt qu’à leurs comptes bancaires. Bateki Mboka questionne aussi sur l’appropriation de notre identité et ce que nous en faisons. Ce que nous souhaitons faire de notre pays mais surtout de sa jeunesse. Une jeunesse qui tourne en rond après l’obtention du diplôme, une jeunesse qui a besoin de changement aussi. Le changement de notre système d’enseignement un peu trop théorique et non pratique. 

Mon coup de cœur, c’est notamment les pages 45 et 46 - lorsque le fils du chef vient à la rencontre du vieux fou qui pleure sa fille qui a choisi de partir, quitter le pays puisqu’il n’a rien à lui offrir. Et intervient alors la thématique de la migration. Quand les jeunes décident de partir, il n'y a rien qui les retient. 

Bateki Mboka rappelle à chacun son rôle par rapport à « son mboka », que faire pour sauver son Mboka, pour le défendre, pour promouvoir sa culture. Bateki Mboka questionne notre appartenance en tant que Congolais. Je vous invite à le lire ou à rencontrer l’auteur lors de la première édition de la fête du livre du Kongo central du 27 avril au 1er mai à Mbanza-Ngungu.  Je suis fascinée par sa plume. 

Bia Betusiwa Hervé alias Tata Longi Biatitudes est avocat et auteur des trois bouquins dont 2 recueils de poèmes : Mes j’aime (2018) et Cœur (é) pélé (2019) ; et une pièce de théâtre : Bateki Mboka (2020). Il a initié le spectacle de poésie orale dénommé « Concert des Mots » qui réunit les amoureux des mots. Depuis novembre 2020, il est Président de « Ecrivains du Congo ASBL » et des éditions Miezi.

Ange Kasongo