Procès Mouzoko : des témoins auditionnés sur l’objet des réunions des médecins locaux qui ont précédé le meurtre l’épidémiologiste de l’OMS

Procès des présumés auteurs du meurtre de l'épidémiologiste de l'OMS/Ph ACTUALITE.CD

Le procès des présumés meurtriers de l’épidémiologiste de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), Richard Mouzoko lâchement abattu en avril 2019 en pleine crise d’Ebola à Butembo (Nord-Kivu) s’est poursuivi ce mercredi 25 février dans la cour du parquet militaire de Butembo.  Ce troisième jour a été consacré à l’audition des témoins, essentiellement des agents administratifs de la santé qui auraient pris part aux réunions des médecins locaux les mois précédents le meurtre.

Tout part de l’audience de mardi. Le ministère public soutient que l’assassinat du docteur camerounais Richard Mouzoko serait la suite logique de la décision prise par les médecins locaux de faire partir leurs homologues non-originaires suite aux conflits d’intérêts liés aux écarts de primes.

Le colonel Ndaka Mbwedi, magistrat de la cour militaire du Nord-Kivu soutient que des réunions avaient été tenues en décembre 2018 et janvier 2019 par des médecins de Butembo, dont trois sont en liberté contrôlée, pour planifier cette chasse aux non-originaires. 

Les trois médecins aujourd’hui prévenus, à savoir Gilbert Kasereka, Hyppolite Sangala et Luendo Paluku, ont reconnu la tenue des réunions, notamment l’une le 3 décembre 2018, « mais avec un autre objet que celui évoqué par le ministère public ». Devant les juges, ils ont affirmé que ces rencontres étaient des réunions de routine de la division provinciale de la santé, antenne de Butembo au cours desquelles les participants traitaient de l’organisation du travail.  Ainsi la cour a fait venir des témoins.

Il s’agit essentiellement des agents administratifs de la santé qui prennent part à ces réunions hebdomadaires de routine. Un constat : devant les juges, les témoins se souvenaient difficilement de la réunion du 3 décembre 2018. Mais après avoir pris connaissance du procès-verbal de cette réunion présenté à la cour, ils ont affirmé qu’il s’agissait d’une réunion de routine au cours de laquelle les participants, neuf au total, avaient débattu de l’organisation du cadre du travail. Mais quelque chose d’étrange pour le ministère public : lors de l’arrivée du magistrat instructeur à la division provinciale de la santé, à la recherche des procès-verbaux de réunions, celui de la réunion du 3 décembre n’avait pas été retrouvé, avant de sortir au début du procès. Le colonel Ndaka Mbwedi suspecte la défense des prévenus de l’avoir produit pour créditer un autre objet de la réunion, plutôt que celui de faire partir les médecins non-originaires. La Cour a demandé aux témoins de revenir avec le devoir de revenir en cas de besoin. Ainsi les juges ont clôturé l’audition des médecins prévenus. Ils devront amorcer ce jeudi l’audition de cinq autres prévenus, des citoyens lambda qui avaient, d’après le ministère public, participé d’une manière ou d’une autre à cette association des malfaiteurs.

Contexte

Ce procès a débuté lundi, près de deux ans après le crime. Au total, 25 personnes sont poursuivies pour « association de malfaiteurs et terrorisme ». Mais seuls 8 prévenus comparaissent, dont trois médecins à savoir les docteurs Kasereka Kasisivahwa Gilbert, Sangala Kisaka, et Luondo Paluku. A en croire le colonel Ndaka Mbwedi, « d'autres prévenus sont en fuite », après s'être évadés notamment lors de l'attaque dirigée contre la prison centrale de Kangbayi à Beni, en octobre 2020.

Au cours de ce procès, la Cour militaire opérationnelle ne se limitera pas au seul meurtre du docteur camerounais Richard Mouzoko. A en croire l'extrait de rôle consulté par ACTUALITE.CD, elle traitera aussi les dossiers des attaques contre l'Université adventiste de Lukanga, en territoire de Lubero, ainsi que contre le Centre de traitement d'Ebola (CTE) de l'Itav-Butembo. Cette dernière attaque avait coûté la vie à deux policiers entre mars et mai 2019, période caractérisée par des violences contre les équipes de riposte contre Ebola.

Claude Sengenya