Intervenant devant le Conseil de sécurité des Nations-unies ce vendredi 12 décembre 2025, Javid Abdelmoneim, président international de Médecins Sans Frontières (MSF), s’est montré dubitatif quant à l’impact réel des initiatives diplomatiques sur le terrain, alors que l’escalade des violences se poursuit à la suite de l’activisme de la rébellion de l’AFC/M23 appuyée par le Rwanda.
À la suite de l’occupation de la ville stratégique d’Uvira par ce mouvement armé, le président international de MSF a estimé que les efforts de paix en cours ne visent pas prioritairement à soulager les souffrances des populations, mais semblent plutôt répondre à des intérêts extractifs impliquant les différentes organisations humanitaires.
" Il apparaît de plus en plus clairement que les efforts de paix en cours servent à consolider les intérêts extractifs d’acteurs puissants plutôt qu’à apporter un soulagement à la population de la RDC. Rien de tout cela n’est nouveau. La violence subie par les communautés est enracinée dans des décennies de prédation des ressources et de négligence structurelle. Voilà la tragédie qui perdure : génération après génération, les Congolais ont vu leur vie et leur dignité sacrifiées sur l’autel de la politique et du profit. Tant que les civils continueront d’être considérés comme sacrifiables, aucun processus politique n’apportera un véritable soulagement. Malgré des engagements de haut niveau à Washington et à Doha, la violence contre les civils reste quotidienne ", a dénoncé le président international de MSF lors de son intervention.
Cette rencontre intervient dans un contexte où la ville d'Uvira, considérée comme stratégique dans le dispositif sécuritaire du gouvernement congolais dans la province du Sud-Kivu, est désormais passée sous le contrôle de la rébellion de l’AFC/M23, renforçant davantage son influence et sa mainmise dans les provinces du Nord et du Sud-Kivu. Il s’agit d’un verrou essentiel susceptible d’ouvrir la voie à l’AFC/M23 vers l’espace Grand Katanga, considéré comme le poumon économique du pays.
La détérioration de la situation sécuritaire dans l’Est de la RDC a coïncidé avec l’entérinement des accords de Washington signés entre Kinshasa et Kigali sous les auspices des États-Unis d’Amérique. Alors que ces accords étaient censés valider et encourager le cessez-le-feu souhaité par les médiateurs et plusieurs partenaires de la RDC et du Rwanda, la situation s’est au contraire dégradée, marquée par des accusations mutuelles entre les deux États quant à la responsabilité de la détérioration de la situation sécuritaire actuelle.
Après l’occupation de Bukavu en février 2025, le gouvernement de Kinshasa avait désigné la Uvira comme siège provisoire des institutions dans les zones encore sous contrôle gouvernemental dans la province du Sud-Kivu. L’AFC/M23, soutenu par le Rwanda et son armée, ayant désormais pris le contrôle d’Uvira, inflige, selon le chef de la diplomatie burundaise, une "gifle " à Washington, seulement quelques jours après la signature des accords censés ramener la paix dans la région des Grands Lacs.
Clément MUAMBA