À l’issue de la phase préjuridictionnelle des enquêtes visant plusieurs officiers généraux et supérieurs des Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC), interpellés pour des faits hautement répréhensibles liés à la sécurité de l’État, interviendra l’étape de la fixation de l’affaire, c’est-à-dire l’ouverture des procès devant les juridictions militaires. C’est ce qu’a confirmé le général-major Sylvain Ekenge, porte-parole des FARDC, lors d’un point de presse tenu ce samedi 22 novembre à l’État-major de l’armée congolaise à Kinshasa.
Selon lui, les officiers concernés sont assignés à résidence dans des conditions jugées acceptables et placés sous le régime de la liberté contrôlée.
"Les Forces armées de la République Démocratique du Congo insistent sur le caractère hautement répréhensible des faits entourant ces dossiers, très sensibles et liés à la sécurité de l’État. Le parquet militaire a la gestion de ce dossier. Il nécessite du temps pour permettre à l’Auditeur général d’approfondir ses enquêtes et d’avoir un dossier complet, bien documenté et bien ficelé avant de présenter les prévenus au Premier président de la Haute Cour. À ce stade, nous ne pouvons pas entrer dans les détails pour ne pas violer le secret de l’instruction", a déclaré le porte-parole des FARDC.
Pour sa part, la Commission nationale des droits de l’homme (CNDH), qui a salué les conditions jugées satisfaisantes dans lesquelles se trouvent ces officiers, reconnaît ne pas disposer à ce stade d’éléments suffisants sur le fond de l’affaire. Toutefois, elle annonce qu’elle déploiera ses équipes de monitoring dès l’ouverture des audiences. L'objectif poursuit d'après le president de cette institution d'appui à la démocratie, est de garantir un déroulement des procès conforme aux droits et devoirs des prévenus.
"Nous n’avons pas touché au fond, en attendant la fixation de l’audience. La CNDH va déployer, lorsque les sessions d’observation judiciaire commenceront, des observateurs qui pourront suivre le respect de leurs droits, notamment le droit de la défense, et se prononcer à la fin du procès sur le fond. C’est ce que nous faisons toujours lorsqu’il y a des procès aussi sensibles dans la vie de notre pays. C’est pour vous rassurer : ils sont tous vivants, dans de bonnes conditions. Ils sont bien traités, et nous mettons fin aux spéculations, car nous avons reçu beaucoup de plaintes de leurs soutiens, parfois d’ordre politique ou social, notamment de la part de leurs familles et proches. Je répète : ils sont entre de très bonnes mains et sécurisés comme il se doit. Avec les collègues défenseurs des droits de l’homme qui étaient avec nous et qui continueront à nous accompagner, nous allons apporter ce témoignage", a affirmé Paul Nsapu Mukulu, président de la CNDH.
Ces interpellations d’officiers généraux et supérieurs des FARDC continuent de susciter de nombreuses réactions dans l’environnement sociopolitique congolais. Récemment, un consortium d’ONG de défense des droits de l’homme (ONGDH-RDC), dont Human Rescue et le Panel des Experts de la société civile, a exprimé sa forte préoccupation face à ces nouvelles vagues d’arrestations visant de hauts responsables militaires.
Ces organisations dénoncent notamment : l’opacité entourant les motifs des arrestations et les lieux de détention ; le non-respect des garanties judiciaires, notamment le droit à un avocat, l’information claire sur les charges et la présentation devant un juge dans un délai raisonnable ; les risques de torture ou de mauvais traitements ;la détention prolongée sans jugement.
Depuis la résurgence de la rébellion AFC/M23 appuyée par le Rwanda, des soupçons de connivence avec l’ennemi pèsent régulièrement dans le secteur de la défense et de la sécurité, en particulier au sein des FARDC. À cela s’ajoutent des accusations persistantes de complots, de détournements de fonds et de matériels au sein de l’armée.
Clément MUAMBA