Maintien des élèves enceintes à l'école en RDC: l'ONU félicite le gouvernement et considère la décision comme une pierre angulaire de l'égalité des sexes

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Elèves/Photos droits tiers

Alors que le sujet ne cesse de diviser au sein de l'environnement sociopolitique congolais,  les Nations-Unies félicitent le gouvernement congolais, à travers le ministère de l'éducation nationale et de la nouvelle citoyenneté, pour l’adoption de la circulaire n°1245 relative au maintien des filles enceintes dans les établissements scolaires. 

Dans un communiqué parvenu à ACTUALITE.CD ce vendredi 1 août, les Nations Unies appellent à l’engagement de tous à s’attaquer aux normes sociales limitant l’égalité des sexes et à défendre le droit fondamental à une éducation de qualité pour tous et toutes. 

‘’ Garantir le droit inaliénable à l'éducation pour toutes les filles, y compris celles confrontées à une grossesse, constitue une pierre angulaire de l'égalité des sexes et du développement durable. Trop longtemps, des normes sociales restrictives et des violences ont compromis l’avenir éducatif de nombreuses jeunes filles, les empêchant de réaliser pleinement leur potentiel. Ces nouvelles mesures marquent une avancée décisive vers plus de justice et d’autonomisation ’’, a déclaré le coordinateur résident ai, Monsieur John Agbor.

Pour l'ONU, cette directive vise à garantir l’accès équitable à l’éducation pour tous les élèves et ne laisser pour compte, principe fondamental pour lutter contre les discriminations. Elle répond à une problématique persistante dans laquelle des filles se voyaient exclues du système scolaire en raison d’une grossesse. Il s’agit d’un progrès majeur, d’autant plus que ces grossesses sont souvent liées à un manque d’autonomie corporelle, à une information insuffisante, ainsi qu’à des actes de violence et d’agression sexuelle dont elles sont victimes.

" Permettre à chaque adolescente de développer pleinement son potentiel est un levier essentiel pour le développement durable. L'égalité des sexes est un catalyseur clé de l’atteinte des Objectifs de Développement Durable (ODD), et beaucoup reste à faire. Les ODD 1 (pauvreté), 3 (santé et bien-être), 4 (éducation de qualité), 5 (égalité entre les sexes), 8 (travail décent et croissance économique), 10 (réduction des inégalités), et 16 (paix, justice et institutions efficaces) sont étroitement liés à l’autonomisation des femmes et des filles ", explique l'ONU dans le communiqué.

Le document rappelle que le Cadre de Coopération pour le Développement Durable (CCDD) 2025-2029 des Nations Unies en RDC met l'accent sur l'amélioration de l'accès aux services sociaux de base de qualité, une protection sociale inclusive et au renforcement des capacités pour tous et toutes, en particulier les plus vulnérables. L'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes sont parmi les principes directeurs de la mise en œuvre du CCDD, qui reconnaît que les femmes sont victimes d'inégalités juridiques, politiques, économiques et sociales, ainsi que de violences basées sur le genre (VBG). 

D'après toujours l'ONU, l'amélioration du faible niveau d'éducation et de formation des filles est explicitement prise en compte dans les résultats stratégiques du CCDD. Les Nations Unies, en collaboration avec les partenaires, appuient le gouvernement de la RDC à œuvrer activement pour le maintien des filles à l'école et leur autonomisation. Cela passe par des programmes de renforcement des capacités, la promotion du leadership féminin, l’accès à une éducation inclusive et à l’information et les services sur la santé sexuelle et reproductive, ainsi que par l'amélioration de la collecte et de l’utilisation des données démographiques grâce à l’Enquête Démographique et de Santé (EDS-III), au renforcement des capacités de l’Institut National de la Statistique (INS), au système d’information et de gestion (SIGE) du secteur de l’éducation, et au Système d'Information Sanitaire (SIS-DHIS2).

" Les Nations Unies appellent également la société civile à jouer un rôle actif dans cette dynamique de changement, en s’attaquant aux normes sociales limitant l’égalité des sexes et en défendant le droit fondamental à une éducation de qualité pour toutes et tous ", ont-ils recommandé dans le communiqué.

La signature, par le secrétaire général a.i du ministère de l'éducation nationale,  d'une note circulaire interdisant l'exclusion des élèves enceintes dans les écoles a divisé davantage l'environnement socio-politique congolais. L'église catholique, qui compte plusieurs établissements scolaires en RDC en partenariat avec l'État, refuse d'appliquer cette décision du gouvernement. Après la publication de cette nouvelle mesure, la commission épiscopale pour l'éducation chrétienne et la coordination nationale des écoles conventionnées catholiques a, dans un communiqué, justifié sa décision sur les prescrits de sa convention, qui insiste sur la moralité et la discipline de l'élève en matière de mœurs, ainsi qu'à l'inexistence d'une copie lui réservée.

Si pour certains, il s'agit d'une décision " judicieuse" qui vient réparer " une injustice sociale" de longue date, d'autres par contre estiment qu'il s'agit là de la légalisation de la prostitution au sein du système éducatif congolais. Pour le porte-parole du gouvernement Patrick Muyaya, en levant une telle option celà ne veut pas dire que le gouvernement encourage cette pratique. Toutefois, dans son exposé lors du briefing presse tenu jeudi 17 juillet 2025, il a évoqué des dispositions constitutionnelles qui ne visent pas à infliger à la jeune fille une double sanction à savoir être engrossée et être exclue du système éducatif.

Clément MUAMBA