Kinshasa : quand le jardin botanique devient un lieu de culte

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Un groupe de prière au jardin botanique de Kinshasa

Autrefois havre de paix et cadre privilégié pour la recherche scientifique, la détente et l’éducation environnementale, le jardin botanique de Kinshasa connaît depuis quelque temps une transformation étonnante. De plus en plus, le lieu est envahi par des groupes de prière en grand nombre par rapport à certains visiteurs venus chercher calme et connexion avec la nature. ACTUALITE.CD a fait une descente sur le lieu. 

Rencontré sur place ce mardi 24 juin, Armand Kashala est étudiant et chercheur à l’académie des beaux-arts. Il se remémore l’époque où cet espace était considéré comme un patrimoine scientifique et écologique, mieux entretenu que présentement.

“Ma première fois ici, c'était en 2013, l'endroit était mieux entretenu que maintenant. Par rapport à la fréquentation, les gens ne viennent plus dans le cadre scientifique mais plutôt pour des prières et des retraites. Cela empêche d'autres personnes de venir visiter. Déjà à première vue, il y a des gens qui viennent vous approcher avec des prophéties, en quémandant au nom des églises. Pour la personne qui était victime, elle peut se lasser de venir. Chacun est libre de faire ce que bon lui semble mais nous devons quand même respecter le contexte et le cadre pour ne pas indisposer les autres”, a-t-il fait remarquer.

Chants, cris de louange, baffles et longues sessions de prière s’imposent dans cet espace vert, perturbant l’atmosphère habituellement sereine. Au total pour ce mardi, plus de 20 groupes ont rassemblé les fidèles  “à la rencontre de la divinité”. Une situation qui divise les visiteurs du site.

Clara, étudiante, aussi venue dans le cadre scientifique, estime que le lieu est public mais appelle les responsables de cet établissement à trouver un cadre approprié pour permettre de faire la différence entre ceux qui viennent prier et ceux qui viennent pour d’autres fins.

“Je ne peux tirer une conclusion hâtive par rapport à ce qui se passe ici. Déjà il faut savoir que cet endroit est public, accessible à quiconque paie son billet d'entrée, bien qu'il ait eu certaines règles à respecter, on ne donne pas l'autorisation d'empêcher les gens de prier. Moi ça me dérange pas dans le sens qu'elles viennent pour la prière, car c'est est un besoin naturel. Tant que bantu, chacun a sa divinité parce que ça peut être le seul endroit que la personne a pour faire sa prière. Cependant, étant donné que c'est un espace public, tout le monde ne veut pas pour la même raison”, a-t-elle avancé.

Et d’ajouter : 

“A force du fait qu'il y a ceux-là pour venir vraiment pour la prière, il y a aussi des charmants, des personnes qui ne sont pas là pour des raisons spirituelles  parce qu' elles ont remarqué qu'elles peuvent soutirer de l'argent à travers des fausses prophéties inventées. C'est pour celà que vous avez remarqué que ça devient quelque part gênant.il ya d'autres qui viennent dans l'intention de déranger ou encore se faire voir.Pour moi ça serait mieux de créer un endroit approprié pour la prière parce que le jardin est vaste. C'est la solution idéale”.

Cependant, pour certains, le choix de cet endroit repose sur des directives du Saint-Esprit. Ils prétendent que ce lieu est favorable à l'exercice de la spiritualité.

"Quand on se déplace c'est pour une place précise et orientée dans les directives du saint. L'ange de l'Église et de ministre vient d'abord inspecter le lieu de savoir si on peut commencer régulièrement à venir prier. A la connaissance que j'ai dans la spiritualité, je peux opérer les esprits peuvent m'obéir. Parce que dans un lieu pareil , il y a des esprits qui surveillent, et nous, sommes bien entretenus avec les esprits, voilà pourquoi nous avons choisi ce lieu. Aussi parce que c'est endroit calme et apaisé, chacun a facilité d'y venir parce que c'est au centre ville" , estime Japhet, responsable d'un groupe de prière.

Marie, une autre fidèle témoigne :

"J'ai fait le choix de ce lieu parce que je me sens à l'aise, et détendu, je peux prendre tout le temps que je veux. Je viens ici pour la retraite. Car celà constitue pour une montagne. Ici je me sens plus centrée qu'ailleurs, loin de la famille que connecté avec dans la présence. Cet endroit m'est beaucoup utile".

Avec une superficie de 7 hectares, anciennement appelé "Parc de boeck" , le Jardin botanique de Kinshasa a été créé grâce au belge Ferdinand Van De Boeck qui fut l'administrateur de Léopoldville ( actuelle ville de Kinshasa) à l'époque coloniale. Ce sanctuaire botanique est situé dans la commune de la Gombe, à côté du plus grand marché de la capitale congolaise appelé communément "Zando". Il présente un échantillon de la biodiversité congolaise, avec une centaine d’essences d’arbres.

Les autorités locales sont appelées à définir des lignes de conduite claires afin que cet espace naturel retrouve son image d’antan, celle qui attirait autrefois les chercheurs et le public scientifique. Il est temps d’agir pour préserver ce patrimoine et en faire à nouveau un lieu de savoir, de découverte et de respect de l’environnement.

Gloria Kisenda (Stagiaire)