Procès RDC-Rwanda à la CADHP: la cour prend l'affaire en délibéré et accorde 8 jours aux deux parties pour déposer leurs notes des plaidoiries avant de se prononcer sur sa compétence

RDC-Rwanda : audience devant la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples
RDC-Rwanda : audience devant la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples

Le procès entre la République Démocratique du Congo et le Rwanda devant la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples (CADHP) s'est poursuivi jeudi 13 février 2025 à Arusha, en Tanzanie. Après confrontations entre les deux parties sur la compétence de cette instance à juger ce dossier, la cour a pris l'affaire en délibéré, accordant huit jours à Kinshasa et Kigali, à compter de ce jeudi, pour déposer leurs notes des plaidoiries ainsi que tout autre élément pertinent avant qu’elle se prononce sur sa compétence. 

Pendant l'audience, les avocats rwandais, comme lors du premier jour, ont présenté des arguments pour obtenir l'irrecevabilité de la requête de la RDC. Dans leur démarche, ils ont démontré que la saisine de la CADHP s'avère prématurée, alors que les procédures prévues par les instances régionales et internationales n'ont pas été épuisées. Kigali a avancé que la requête de la RDC est étayée en grande partie sur les informations relayées par la presse, fragilisant ainsi sa crédibilité. La défense rwandaise a par ailleurs sollicité de la cour la suspension de la procédure en attendant le verdict de la cour de justice de l'EAC dans une autre affaire opposant les deux Etats.

La partie congolaise, elle, n'a appuyé ses arguments que sur des preuves des crimes commis par le Rwanda sur le sol congolais. Rencontrant les exceptions soulevées par ce dernier, les avocats de la RDC ont interpellé la CADHP sur l'image qu'elle donnerait si elle se déclarait incompétente.

« Parmi les raisons avancées, les victimes en RDC devaient, selon le Rwanda, s'adresser aux juges rwandais et au Rwanda. Ainsi, pour le Rwanda, on ne peut parler de violation des droits de l'homme que si les exactions avancées par la RDC s'étaient déroulées au Rwanda. Pour cela, la Cour devrait se déclarer incompétente. Nos avocats ont réfuté tous ces arguments et ont démontré que cela risquerait d'être un incident vraiment regrettable si la Cour ne se déclarait pas compétente et la requête de la RDC recevable. La Cour est appelée à juger des violations massives des droits de l'homme commises en République Démocratique du Congo par le Rwanda. Ces faits sont connus non seulement des Africains et des Congolais, mais aussi du monde entier, et cette Cour a été instituée pour cela », a expliqué Samuel Mbemba, vice-ministre de la justice et contentieux international.

Ce membre du gouvernement, de surcroît juriste, reste convaincu que la cour va sans doute se prononcer compétente au regard des preuves lui présentées. 

« Nous avons confiance de la manière dont nous avons démontré à la Cour qu'elle est compétente et que la requête de la RDC devrait être déclarée recevable, la Cour se déclarera compétente et nous passerons à la phase du fond, là où la vérité sur les exactions et violations massives commises par le Rwanda éclatera aux yeux du monde », a-t-il conclu.

Contrairement au procès tenu le 26 septembre 2024 devant la Cour de justice de la Communauté des États d'Afrique de l'Est (EAC), qui portait sur des différends régionaux spécifiques, cette nouvelle affaire s'inscrit dans une démarche plus large. Elle vise à assumer des responsabilités sur des décennies d'agression, de pillage systématique des ressources naturelles, de violences sexuelles, et de massacres subis par les populations congolaises. Pour plus de preuves, la RDC s'est fait accompagner de quelques activistes des droits de l'homme.

Samyr LUKOMBO