Dans une interview exclusive accordée à ACTUALITE.CD mardi 7 janvier 2025, l’un des responsables de l’Inspection générale des finances réfute les arguments avancés par l’Observatoire de la dépense publique (ODEP) pour justifier son retrait du partenariat entre l’IGF et 13 organisations de la société civile pour lutter conjointement contre la corruption. La source indique que le vrai motif serait les divergences au sein de cette alliance sur la gestion financière et administrative.
En effet, explique-t-il, l’ODEP, qui assurait le rôle de porte-parole de la société civile dans ce partenariat, désapprouvait la présidence exercée par l’Association africaine des droits de l’homme (ASADHO). À cet effet, l’ODEP avait saisi l’IGF pour demander un rétablissement de l’ordre au sein de la direction. Alors que l’IGF prévoyait de résoudre la situation dès ce mois de janvier, elle dit avoir été surprise par l’annonce du retrait.
«Nous avons été surpris d’apprendre que l’ODEP est passée à la vitesse supérieure en nous informant qu’elle venait de quitter l’organisation pour mauvaise gestion du partenariat par l’ASADHO. Nous, à l’IGF, nous regrettons cela tout simplement parce que nous devons travailler dans une synergie », indique la source.
Pas de suppression de la patrouille financière
Si l’ODEP évoque la suppression de la patrouille financière de l’IGF sous pression des proches du président Félix Tshisekedi, comme l’une des raisons ayant motivé son retrait, l’IGF rejette cette allégation et précise que la patrouille financière avait été suspendue dans certaines entreprises publiques pour évaluer si son caractère pédagogique a porté ses fruits, mais n’a jamais été supprimée.
« C’est faux, parce qu’aujourd’hui la chaîne de la dépense publique est sous patrouille financière depuis trois ans. Et ça continue jusqu’à aujourd’hui. Il ne peut y avoir aucun paiement au niveau de la chaîne de la dépense si l’IGF n’exerce pas un contrôle a priori et n’évalue pas la dépense avec le ministère des Finances. Au niveau de la douane, vous ne pouvez pas bénéficier d’une exonération si l’IGF n’examine pas ou ne donne pas le quitus, donc nous sommes encore là. Au niveau de certaines entreprises publiques comme le Foner, le FPI, et l’autorité de régulation de la sous-traitance, nous sommes là avec la patrouille financière, que nous avons reinstauré il y a de cela deux mois. Pour le mois de janvier, nous allons encore nous déployer », soutient l’IGF.
La création du DIEF n’a pas fragilisé l’IGF
Par ailleurs, l’IGF estime que la création du Département d’intelligence économique et financière (DIEF) au sein de l’ANR ne l’a pas fragilisée, comme l’indique l’ODEP.
« Pourquoi devrions-nous nous sentir concernés, alors que nous n’avons pas l’exclusivité du contrôle des finances publiques en RDC ? Nous faisons le contrôle des finances publiques avec la Cour des comptes, la Cenaref, l’APLC, qui ne se sont jamais plaints. Pourquoi l’IGF devrait-elle considérer l’arrivée de cette direction comme l’émiettement de nos attributions, alors que nous n’en avons pas l’exclusivité ? », s’interroge la source.
L’IGF considère par ailleurs la création de cette direction comme un renforcement du contrôle des finances publiques.
« Nous avons signé un accord avec ce département il y a deux mois, pour que nous collaborions sur certains dossiers pour plus de technicité. Nous travaillons très bien avec la nouvelle direction, nous sommes en contact permanent pour nos investigations », renseigne la source.
L’IGF a indiqué ne pas se mêler des débats politiques de l’heure, notamment sur le changement de la constitution, étant donné que son travail s’arrête au contrôle des finances publiques et à la lutte contre la corruption. Comme relevant directement de l’autorité du chef de l’État, elle a le devoir de le soutenir dans toutes les démarches visant à lutter contre la corruption dans le pays.
Le partenariat IGF-Société civile s’inscrit dans le cadre des recommandations de la convention des Nations unies pour la lutte contre la corruption, qui stipulent que les structures étatiques de lutte contre la corruption doivent associer la société civile dans cette démarche pour une bonne synergie. Ce partenariat permet aux organisations de la société civile, à travers leur contrôle citoyen, d’aller au-delà des limites des structures étatiques pour une efficacité dans la lutte contre la corruption.
Bruno Nsaka