RDC : Ebuteli pointe du doigt l'influence de l'exécutif sur la composition du CSAC, menaçant l'indépendance du régulateur

Photo d'illustration
Christian Bosembe, Président du CSAC

L'institut de recherche Ebuteli (échelle en lingala) a revisité, à travers une étude intitulée « Le CSAC, régulateur ou partisan », le mode de composition des membres du Conseil Supérieur de l'Audiovisuel et de la Communication, institution qui joue le rôle de régulateur des médias en RDC. Selon Ebuteli, cette procédure de désignation, qui donne la primauté du choix à l'exécutif, est peu réglementée et moins rigoureuse, car elle permet à ce dernier de contrôler cette institution.

En effet, la loi organique n° 11/001 du 10 janvier 2011 portant composition, attribution et fonctionnement, donne au président une quote-part d'un membre dans la composition du bureau du CSAC, deux pour l'Assemblée nationale, deux pour le Sénat et un pour le gouvernement sur les quinze membres. Les autres proviennent des secteurs suivants : publicité (1), conseil national de l’Ordre des avocats (1), radiodiffusion sonore (1), télévision (1), presse écrite (1), association des parents d’élèves et d’étudiants légalement constituées (1), association de défense des droits des professionnels des médias (2), conseil supérieur de la magistrature (1). Les autres composantes transmettent, dans les faits, leur choix au président de la République pour entérinement. Pour Ebuteli, ce pouvoir confère au chef de l'État une marge de manœuvre pour bloquer la désignation des membres du CSAC, évoquant la jurisprudence de l'ère de l'ancien président Joseph Kabila.

« Dans les faits, les composantes transmettent leur choix au président de la République pour l’entérinement. En principe, le pouvoir de nomination du chef de l’État est une compétence liée, mais dans la pratique, il apparaît que le chef de l’État conserve une marge de manœuvre pour bloquer les choix des animateurs du CSAC. En 2015, par exemple, après l’expiration du mandat de la première équipe dirigeante du CSAC, les composantes s’étaient immédiatement inscrites dans le processus de désignation de nouveaux animateurs. Mais ces désignations n'avaient jamais été entérinées par le président Joseph Kabila, prolongeant de fait le premier mandat des responsables de l’autorité de régulation des médias jusqu’en 2022 », a-t-il souligné.

Considérant cette procédure de désignation, cet institut de recherche énumère trois conséquences concrètes qu'elle a sur l'impartialité du CSAC. Cette possibilité pour le président de la République d'influencer ou de bloquer la nomination au sein de cette institution de régulation des médias « permet au pouvoir exécutif de maintenir un contrôle sur le CSAC. En conséquence, cette influence politique accrue réduit la capacité du CSAC à fonctionner de manière indépendante et impartiale ». Ebuteli estime par ailleurs que lorsque la nomination de ces membres est influencée par des considérations politiques, ceux-ci peuvent être tentés de favoriser les intérêts de ceux qui les ont nommés, plutôt que d’agir dans l’intérêt public, compromettant ainsi la mission pour laquelle le CSAC existe. Il ajoute que, tant que les composantes seront influencées par le pouvoir, cela limitera la diversité des perspectives au sein du CSAC.

« La perception que le CSAC est influencé par des intérêts politiques érode la confiance du public et des acteurs médiatiques dans l’impartialité et la légitimité de ses décisions. Cette perte de confiance publique est particulièrement préjudiciable pour un organe dont la mission est de garantir une régulation équitable des médias », conclut Ebuteli.

Il l'illustre avec la désignation de Christian Bossembe, actuel président du CSAC depuis 2023, rappelant la grogne des membres de l'ancien bureau sur l'élection lors d'une séance dont l'ordre du jour ne comportait pas l'élection de l'actuel bureau. En dépit de la violation de la procédure dénoncée par l'ancien bureau, notamment l'absence d'un nouveau règlement intérieur validé par la Cour constitutionnelle, Christian Bossembe a été installé.

Samyr LUKOMBO