Kinshasa : les mécanismes de redevabilité des députés nationaux à la population au cœur d’un forum à l’UNIKIN

Photo
Forum sur la redevabilité des députés à l’Assemblée nationale

Devant une assistance composée d'étudiants et quelques enseignants, deux députés nationaux, Gratien Iracan et Guy Mafuta, ont été conviés par l'institut congolais de recherche sur la politique, la gouvernance et la violence, Ebuteli, à un forum public, ce vendredi 28 juin à l'Université de Kinshasa (Unikin). Ils ont abordé les différents mécanismes à travers lesquels ils font preuve de redevabilité envers leurs électeurs.

Pour Gratien Iracan, élu de la province de l'Ituri sur la liste d'Ensemble pour la République, les vacances parlementaires constituent un moment propice d'échanger avec la population sur les difficultés auxquelles elle fait face et lui expliquer clairement ce qu'il fait en son nom au sein de l'Assemblée nationale.

« Avec les vacances parlementaires, vous avez des échanges interactifs avec la population, ce qui permet de maintenir et de restaurer la confiance entre un élu et le peuple. La population veut vous écouter, elle veut savoir ce que vous faites en son nom. Elle a aussi des difficultés, pour lesquelles elle vous saisit pour les transmettre au gouvernement », a-t-il dit, insistant sur les préparatifs de ces vacances parlementaires “qui ne sont pas de simples promenades”.

Pendant les vacances parlementaires, explique-t-il, le député national entretient des contacts directs, à travers des séances de travail avec les autorités politico-administratives, des leaders communautaires et d'opinion, qui maîtrisent les réalités du terrain, utiles pour son travail de représentation. Cependant, Gratien Iracan se plaint du fait que quelquefois ils sont butés aux problèmes de routes, d'insécurité et d'intempéries pour atteindre certains coins de leurs circonscriptions électorales en vue de rendre compte de leur travail parlementaire. 

Partant de la définition du concept de redevabilité comme «le processus d'utilisation du pouvoir de manière responsable, en tenant compte et en rendant compte aux différentes parties prenantes avant tout, et à celles qui sont affectées pour l'exercice de ce pouvoir», l'élu de Tshikapa (Kasaï), Guy Mafuta, a élargi ce devoir de redevabilité au gouvernement, voire au président de la République, qui sont tout autant redevables vis-à-vis du peuple, qui est le souverain primaire. 

À l'en croire, le président de la République est redevable au peuple à travers le discours sur l'état de la nation, qu'il prononce une fois l'an devant l'Assemblée nationale et le sénat réunis en congrès,  conformément à l'article 77 de la constitution, ce qui constitue pour lui un mécanisme de redevabilité, d'autant plus que, par le biais de ce message, le chef de l'Etat rend compte aux Congolais de la manière dont se porte la nation. «Même lorsqu'il doit déclarer la guerre, il doit informer la nation. Pourquoi il doit le faire ? Parce qu'il est astreint à une redevabilité, rendre compte, prendre en compte et exiger des comptes parce que le pouvoir est l'émanation du peuple», ajoute-t-il. 

S'agissant du gouvernement, maître Guy Mafuta a évoqué la reddition des comptes comme l'un des mécanismes de redevabilité, compris dans l'article 173 de la constitution, qui permet à l'exécutif de rendre compte sa la gestion.

«Le député c'est lui qui représente le peuple. Et ce peuple-là peut exiger certaines informations sur la gestion. C'est une redevabilité un peu à l'envers. Vous avez les moyens d'information, les questions orales que les députés font généralement, les questions écrites, les questions d'actualité, l'audition à commission, les moyens de contrôle notamment l'interpellation et les commissions d'enquête. Le peuple peut sanctionner le gouvernement par une motion soit de censure soit de défiance lorsqu'il s'agit de tout le gouvernement ou d'un membre », précise ce député de l'union sacrée, qui estime que le travail d'un élu ne peut réussir que lorsqu'il est soutenu par la population. 

Plusieurs étudiants ayant pris la parole lors de différentes séries de questions-réponses, ont fustigé le comportement de certains élus nationaux qui, en lieu et place de se rendre dans leurs fiefs électoraux pendant les vacances parlementaires, vont se reposer en Europe pour n'attendre que l'annonce d'une nouvelle session. Ils ont, par ailleurs, proposé que des sanctions soient définies contre les députés qui ne font en bonne et due forme le travail pour lequel ils ont obtenu mandat. 

Talatala : pour des informations liées à l'exercice des élus au parlement

Ebuteli qui constate les difficultés que rencontrent les populations à avoir accès aux informations liées à l'exercice des élus, a mis en place « Talatala», cet outil qui leur permet de suivre de près l'activité parlementaire et l’action du gouvernement. Cette initiative vise à fournir les informations objectives et accessibles nécessaires pour renforcer la redevabilité des élus auprès de la population et ainsi contribuer à recréer le contrat social. Il documente les activités parlementaires essentiellement à l’Assemblée nationale et suit les engagements de l'exécutif dans quatre secteurs :  gouvernance électorale, réforme de la justice, réforme de la sécurité et lutte contre la corruption. Il offre une plateforme accessible sur le web et sur WhatsApp, qui permet aux citoyens de se familiariser avec leurs élus et de suivre de près leurs actions, favorisant ainsi une prise de décision éclairée.

Samyr LUKOMBO