Le 22 février, des activistes de défense des droits humains et promotrices de paix se sont exprimés au sujet d'un rapport publié par Amnesty international vendredi dernier (17 février). Il en ressort que des survivants et des témoins ont raconté à l'organisation international qu'après avoir pris le contrôle de Kishishe, des groupes de combattants du M23 ont fait du porte-à-porte, tuant sommairement tous les hommes adultes qu'ils trouvaient et soumettant des dizaines de femmes à des viols, y compris des viols collectifs.
" Les viols dans l’Est de la RDC sont une autre arme de guerre. Si les M23 font retentir les armes, ils utilisent aussi une autre arme puissante, une arme lourde appelée viol ou violence sexuelle", dénonce Rose Tuombeane, femme politique et défenseure des droits des femmes.
Et de poursuivre, "depuis leur arrivée à Rutshuru, ils ont décidé de détruire la nation congolaise par la destruction de la dignité de la femme. Ils ne violent pas les femmes pour se faire plaisir, ils le font pour toucher à l’image de la femme mais aussi semer leur haine et leur violence à travers le sang qu’ils transmettent aux Congolaises par la force. Cela aura certainement des conséquences dans quelques années parce que certaines survivantes tombent enceintes."
Pour Nellas Bauma, point focal du Cadre permanent de Concertation de la femme congolaise (CAFCO) depuis la Tshopo, "ce rapport révèle des situations encore alarmantes et préoccupantes. Situations qui méritent toute l'attention des autorités congolaises".
Depuis le haut Katanga, Delphine Muzama, membre de la Ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté, interroge le degré d'humanisme de tous les mouvements rebelles qui infligent ces actions aux femmes et aux filles.
"La femme est une personne vulnérable en situation de guerre. Ses droits ne sont pas respectés. Cette femme qui porte la vie est victime de beaucoup de violence. Cela nous révolte en tant que congolaises ne vivant pas dans des zones en conflit. Pendant combien de temps ces réalités vont continuer ? Pendant combien de temps va-t-on continuer à parler des violences sexuelles ? Sommes-nous humains ? Ces rebelles sont-ils nés des femmes ? Sont-ils par moment interpellés par leur conscience ? "
Prise en charge, sanctions, autorité de l'état
Tigere Chagutah, directeur régional d'Amnesty International pour l'Afrique orientale et australe, à déclaré que depuis ces attaques, les survivants vivent dans la terreur et le dénuement le plus total. Si certaines victimes de viol ont reçu des soins médicaux de base dans des centres de santé communautaires, la plupart d'entre elles ont besoin de toute urgence de soins médicaux et de santé mentale adaptés, ainsi qu'une aide humanitaire.
Pour les activistes, il faut que les ministères impliqués dans la prise en charge holistique des victimes puissent s'activer.
" Nous avons différents ministères. Précisément celui de genre famille et enfant, affaires sociales ou celui de la santé. Le gouvernement devrait lancer un front parallèle à l'armée. Ces ministères peuvent par exemple agir en synergie pour organiser une prise en charge holistique (sanitaire, juridique et judiciaire, psychologique) aux survivantes. Mais aussi appliquer les prescrits du protocole de Maputo pour étouffer les fruits de cette stratégie de l’ennemi", recommande Rose Tuombeane.
" Notre recommandation principale sera que les forces armées congolaises reprennent le contrôle de ces zones occupées par les mouvements rebelles. Une autre recommandation concerne la protection des femmes et des enfants qui y vivent. Tant que ces milieux ne seront pas sous contrôle de l'Etat Congolais, la protection de nos citoyennes ne sera pas assurée", déplore Delphine Muzama.
À Nellas Bauma de renchérir, " nous plaidons aussi pour des sanctions au niveau international. Les rapports sont officiels, les preuves sont là, que ce soit au niveau local, régional ou international. Mais les sanctions contre les rebelles tardent à arriver. Nous espérons que notre voix sera entendue cette fois-ci, car, nous utilisons tous les canaux possibles".
Il faut noter que ces actes qui se sont déroulés le 21 et le 30 novembre 2022, constituent des crimes de guerre et pourraient constituer des crimes contre l’humanité selon le rapport.
Prisca Lokale