Insécurité alimentaire : Les kinoises relatent leur quotidien

Les femmes petites commerçantes du l'avenue du Marché dans la commune de Kinshasa/Ph Prisca Lokale ACTUALITE.CD

La rédaction femme de Actualite.cd vous a récemment proposé un bref résumé du rapport du Programme alimentaire mondial qui a estimé à près de 13 millions, le nombre des congolais  qui vivent en insécurité alimentaire. Ce mercredi, nous sommes allée à la rencontre de quatre kinoises qui ont relaté leurs difficultés à offrir des plats équilibrés à leurs familles.

Tous les jours, aux alentours de dix heures, Maguy Akonga et Esther Moza installent leurs marchandises sur l’avenue du Marché dans la commune de Kinshasa.  Esther Moza a sept enfants. Chez elle, il y a des programmes de délestage (des jours sans cuisine).

“ Pour nourrir les enfants à Kinshasa, il faut avoir un esprit de sacrifice.  Je n’ai pas un fond de commerce (capital) important mais j’essaye de me surpasser tous les jours. Quand les moyens me le permettent, je fais des provisions de manioc et maïs en poudre, un sac de 25 kg de riz, de l’huile.  Ensuite, au quotidien, j’achète des légumes et je fais des sauces que je pourrais associer au riz. Souvent il m’arrive de ne pas avoir de provisions à la maison, alors je cuisine un jour sur deux. Les enfants le savent, c’est notre programme de délestage ,”  explique Esther.

Maguy Akonga revient sur le contexte du pays qui, selon elle, a totalement chamboulé l’organisation dans son foyer.

“Je suis épouse et mère de cinq enfants. Pour un petit déjeuner simple, je dépense au moins 5.000 francs congolais pour le pain, le sucre en vrac, le lait et tous les compléments. Dans la journée, je dois encore dépenser environ 15.000 fc pour la cuisine. Le coût de la vie est vraiment dur, depuis la tenue des récentes élections. Auparavant, 10. 000 fc pouvaient suffire à combler tous ces besoins. Actuellement, mon programme est perturbé. Plus les enfants grandissent, plus les besoins s’ajoutent et les conditions de vie deviennent encore plus difficiles” explique Maguy, avant d’ajouter “je  fais ce commerce depuis cinq ans parce que le salaire de mon époux nous aide uniquement à payer le loyer. Je paie le sac de manioc à 85.000 fc, et je donne au porteur 4.000 fc pour le transport. Le prix du sac de maïs n’est pas très stable,” déplore la commerçante.

Pour Juliette Kapend, le quotidien est tout aussi rude. “Hier, je n’ai pas pu trouver à manger pour ma famille. Mon époux est allé au travail à Mont Ngaliema, il est rentré aux environs de 20 heures, sans argent. Pour manger, nous dépensons au moins 5.000 fc par jour uniquement pour les légumes. Mais, ces jours-ci, les temps sont durs. Toutes mes provisions sont épuisées. Ce matin, il est encore parti au travail sans avoir pris un déjeuner. Mon fils cadet également n’a pas pris de petit déjeuner alors qu’il va présenter un examen en troisième scientifique”, confie Juliette, tête baissée sur sa poitrine.

Absence de gouvernement mise en cause

Monique Nanga est mariée à un enseignant. Pour elle, c’est l’absence de gouvernement qui bloque tout.

“ Si nous sommes encore dans les difficultés de pouvoir offrir à nos familles une nourriture équilibrée, c’est parce qu'il n’y a pas une bonne circulation de monnaie. C’est aussi dû à l’absence d’un gouvernement stable. Parcourez le long de cette avenue, vous pouvez observer le taux de dollars que chaque cambiste a fixé sur son tableau. Ils profitent de l’absence du gouvernement pour nous rendre la vie dure.” Et d’ajouter “tu peux aller au marché avec tes 10.000 francs mais, tu n'achètes rien qui puisse convenir à une famille nombreuse. Une mesure de maïs ou de manioc coûte 1500 francs, 1kg de 20 plus de mpiodi qui ne compte même pas 6 poissons coûte 3500 francs, une bouteille de coca remplie d’huile de soja coûte 800 francs, les épices, les braises, les légumes...finalement, ces billets ne suffisent pas ”, s’inquiète Monique.

Dans son récent rapport sur l’insécurité alimentaire en RDC, le programme alimentaire mondiale insiste sur le fait que les femmes et les enfants sont les plus exposées à l’insécurité alimentaire.

Prisca Lokale