Est de la RDC: Paris exprime à Lomé sa préoccupation face au risque de déstabilisation régionale et souligne l’urgence d’une réponse humanitaire

Jean-Noël Barrot, ministre français de l’Europe et des Affaires étrangères, et son homologue togolais, Robert Dussey.
Jean-Noël Barrot, ministre français de l’Europe et des Affaires étrangères, et son homologue togolais, Robert Dussey

Après la co-organisation par la France et le Togo de la Conférence de Paris sur la paix et la prospérité dans la région des Grands Lacs, la détérioration de la situation sécuritaire et humanitaire, marquée par de violents combats entre la rébellion de l’AFC/M23, appuyée par le Rwanda, et les forces gouvernementales, était au centre des échanges ce mardi 23 décembre entre Jean-Noël Barrot, ministre français de l’Europe et des Affaires étrangères, et son homologue togolais, Robert Dussey.

Alors que les affrontements ayant conduit à la chute d’Uvira dans la province du Sud-Kivu, avant l’annonce du retrait par le mouvement rebelle, ont également touché le territoire burundais selon les autorités burundaises elles-mêmes, le chef de la diplomatie française a fait part à son homologue togolais, médiateur désigné de l’Union africaine dans la crise de la région des Grands Lacs, de sa vive préoccupation face au risque de déstabilisation régionale.

" Jean-Noël Barrot, ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, s’est entretenu par téléphone le 23 décembre 2025 avec son homologue togolais, le professeur Robert Dussey. Il lui a fait part de sa préoccupation concernant la situation à l’est de la RDC et le risque de déstabilisation de la région des Grands Lacs. Il a salué les efforts du président Faure Gnassingbé, médiateur de l’Union africaine, en faveur d’une désescalade rapide de la crise ", rapporte le ministère français de l'Europe et des Affaires étrangères (MEAE).

Selon toujours le communiqué du Quai d'Orsay, les deux personnalités sont revenues sur l'urgence et la nécessité de mettre en oeuvre les résolutions issues de la Conférence de Paris sur la paix et la prospérité dans la région des Grands Lacs, co-organisée par la France et le Togo le 30 octobre dernier. 

" Le ministre a souligné l’implication de la France en faveur de la paix et, dans la continuité de l’organisation de la conférence de Paris du 30 octobre 2025 avec le Togo, a également rappelé l’importance de répondre à l’urgence humanitaire dans l’est de la RDC et dans la région des Grands Lacs. Les Ministres ont également échangé sur la situation régionale en Afrique de l’Ouest ", ajoute le communiqué du ministère français des affaires étrangères. 

Cette discussion intervient après la visite de travail à Kinshasa, du président du Conseil de la République togolaise et médiateur désigné de l’Union africaine, Faure Gnassingbé où il a eu des entretiens qualifiés de "constructifs" avec le président de la République, Félix Tshisekedi. Selon la Présidence congolaise, Ils ont essentiellement discuté sur l'évolution de la situation sécuritaire dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu dont certaines localités sont occupées par les Forces de défense rwandaises (RDF) et leurs supplétifs du M23. Ils ont également discuté sur les moyens de renforcer la coopération bilatérale entre le Togo et la RDC", rapporte la Présidence de la RDC.

En dépit de son statut de médiateur désigné par l’Union africaine, le Togo reste moins visible dans la résolution de la crise sécuritaire dans l’Est de la République démocratique du Congo depuis l’entrée en jeu des États-Unis d’Amérique et de l’État du Qatar. Au-delà de sa participation aux réunions du mécanisme conjoint de coordination en matière de sécurité sous l’égide de Washington, le Togo, dirigé par Faure Essozimna Gnassingbé, entend désormais faire bouger les lignes. Lomé prévoit d’organiser, le 17 janvier 2026, une réunion de haut niveau consacrée à la cohérence et à la consolidation du processus de paix en RDC et dans la région des Grands Lacs.

La ville d’Uvira, considérée comme stratégique dans le dispositif sécuritaire du gouvernement congolais dans la province du Sud-Kivu, était passée sous le contrôle de la rébellion de l’AFC/M23, renforçant ainsi son influence dans les provinces du Nord et du Sud-Kivu. Ce verrou essentiel pourrait permettre à l’AFC/M23, soutenue par le Rwanda, de progresser vers l’espace du Grand Katanga, considéré comme le poumon économique du pays.

Suite à une série de pressions de la communauté internationale, plusieurs pays, notamment les États-Unis, ont dénoncé l’attitude de l’AFC/M23 et de son soutien, le Rwanda, estimant que Kigali n’a pas respecté ses engagements. Dans ce contexte, l’Alliance Fleuve Congo (AFC/M23) a annoncé le retrait unilatéral de ses forces de la ville d’Uvira, afin de répondre à la demande des États-Unis, l’un des médiateurs dans la crise de la région des Grands Lacs. Lors de la dernière réunion du Conseil de sécurité, Washington avait insisté sur la nécessité pour l’AFC/M23 de se retirer à 75 kilomètres de la ville.

Clément MUAMBA