Siégeant en matière répressive en premier et dernier ressort, la Haute Cour militaire a débuté ce vendredi 19 décembre 2025 avec l’examen de l’affaire opposant l’auditeur général des Forces armées de la RDC au lieutenant-général Philémon Yav Irung, également appelé « Tigre ». Selon l’extrait de rôle lu par la greffière, il est reproché à l’ancien commandant de la 3ᵉ zone de défense des FARDC : la trahison, la participation à un mouvement insurrectionnel et l’incitation des militaires à commettre des actes contraires au devoir ou à la discipline.
Sous la direction de Joseph Mutombo Katalay, Premier président de la Haute Cour militaire (HCM) de la République démocratique du Congo (RDC), cette première audience a été consacrée à l’identification du prévenu, avant de passer la parole à la greffière pour la lecture de la décision de renvoi. Selon l’organe poursuivant, le prévenu a posé certains actes de trahison en entretenant des intelligences avec une force étrangère, plus précisément le Rwanda.
« Étant commandant de la 3ᵉ zone de défense et commandant des opérations militaires dans la province du Nord-Kivu, [il a] présenté au général-major Peter Cirimwami Nkuba le message ci-après, émanant du nommé Sinkonko Célestin, secrétaire particulier du général James Kabarebe, de la République du Rwanda, pays accusé d’appuyer les terroristes du M23.
Message : “Ce Peter Cirimwami Nkuba retarde sérieusement notre projet.”
Ces faits sont prévus et punis par l’article 128, point 3, du Code pénal militaire », rapporte la greffière.
« Lors d’une entrevue à l’hôtel Serena avec le général de brigade Mwehu Lumbu Évariste, [il lui a] permis de le dissuader de ne pas aller combattre l’ennemi en ces termes : “Mwehu, comment toi, un général, tu es tout le temps au front en train de combattre ? Tu ne sais pas que la victoire ou le succès que tu peux remporter au front va profiter à ce Bangala ? Toi, on ne te verra pas.”
Fait prévu et puni par l’article 88 du Code pénal militaire », ajoute la greffière.
Bien avant, précise la cellule de communication de la Haute Cour, conformément à l’article 27 du Code judiciaire militaire, trois juges assesseurs non revêtus de la qualité de magistrats ont prêté serment, jurant devant Dieu et la nation de remplir loyalement leurs fonctions, de garder le secret des délibérations et de juger les personnes traduites devant eux sans haine, sans crainte ni complaisance, mais avec la seule volonté d’exécuter la loi. Il s’agissait, entre autres, du lieutenant-général Léon Richard Kasonga, de l’actuel commissaire général de la Police nationale Benjamin Alongaboni, et autres.
Depuis 2020, Philémon Yav Irung avait été réaffecté dans l’est de la RDC, où il avait été nommé commandant de la troisième zone de défense des Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC). Cette zone stratégique dans le système de défense congolais couvre les provinces du Nord-Kivu, du Sud-Kivu, de l’Ituri, du Maniema et de la Tshopo. Ce procès s’ouvre près de trois ans après son arrestation, intervenue en septembre 2022.
Le « Tigre » Philémon Yav est parmi les généraux de l’espace Grand Katanga que plusieurs personnalités politiques, notamment Joseph Kabila, ancien chef de l’État, ne cessent de citer pour démontrer la marginalisation des officiers de cet espace du pays sous le régime de Félix Tshisekedi. Ces allégations ont toujours été rejetées du côté de l’armée congolaise. Selon son porte-parole, Sylvain Ekenge, lorsqu’on entre dans l’armée, il n’existe plus de tribu, affirmant que les interpellations et arrestations de certains officiers de l’armée se font dans la droite ligne de la législation militaire.
Après cette audience d’ouverture, la prochaine est prévue pour l’année prochaine, à savoir le mardi 6 janvier 2025.
Clément MUAMBA