RDC : l’ancien directeur du parc marin des Mangroves, Kim Rebholz, brise le silence

Kim Rebholz, 2025. Document PPLAAF-TBIJ
Kim Rebholz, 2025. Document PPLAAF-TBIJ

Une enquête conjointe de la PPLAAF et du Bureau of Investigative Journalism (TBIJ) revient sur le parcours de Kim Rebholz, ancien directeur du parc marin des Mangroves, contraint à l’exil après avoir dénoncé des crimes environnementaux et l’accaparement de terres impliquant de hauts responsables congolais.

Ce franco-suisse sera resté à peine un an à la tête de ce parc crucial pour la lutte contre le changement climatique. Kim Rebholz a cru en la  vision du gouvernement de la RDC, comme “pays solution“. Il était optimiste, naïf même, il le reconnaît. « On avait beaucoup d'espoir qu'on pourrait faire du bon travail », se souvient-il. Il y a tellement cru qu'il dit avoir investi une part importante de son propre argent dans ses projets de conservation au Congo. Mais son engagement s’est rapidement heurté aux réalités du terrain.

« En l'espace d'un mois et demi, les représailles se sont enchaînées. », explique-t-il à PPLAAF et au TBIJ.

Dans la nuit du 2 février 2023, sept hommes cagoulés, armés de machettes et de fusils, ont fait irruption au domicile de fonction de Kim Rebholz. Ils lui ont braqué une arme sur la tempe et ont simulé son exécution. « Tout ça s’est passé en présence de notre petit garçon. », raconte Rebholz. Deux des assaillants s’en sont également violemment pris à sa femme.

L’ancien directeur estime que cette attaque est directement liée à ses dénonciations. Il avait adressé plusieurs rapports internes à sa hiérarchie pour signaler la destruction du parc, et notamment l’accaparement de terres par des proches de l’ancien président Joseph Kabila.

« Il a fait ses rapports qui se sont avérés vrais jusqu’à aujourd’hui. C’était tellement flagrant, il fallait qu’il disparaisse », témoigne un ancien responsable local, même si ce dernier dément une implication politique.

Rebholz affirme avoir aussi signalé l’existence des ports illégaux utilisés pour la contrebande de bois et de carburant. Trois mois après ses alertes, une explosion a détruit l’un de ces sites, ravageant trois hectares de mangroves.

Deux personnes employées à l’époque au parc marin des Mangroves, ainsi qu’un ancien responsable local, ont assuré la PPLAAF et le TBIJ qu’une attaque au domicile du directeur du parc a bien eu lieu à l’époque. Des éléments administratifs l'attestent : Rebholz avait porté plainte auprès du parquet militaire. Mais après deux ans d’attente, sans qu’aucune enquête ne soit ouverte, il a renouvelé cette plainte en avril dernier. Son avocat, Me Venance Kalenga, s’est rendu au parquet, où les agents ont reconnu que le récépissé remis en 2023 à Rebholz portait bien leur cachet officiel, tout en affirmant ne trouver aucun dossier correspondant.

« C'est comme s'ils avaient fait semblant d'enregistrer la plainte pour ensuite la faire disparaître et ne pas laisser de traces. Il doit y avoir une influence politique ou des intérêts de hauts placés. », estime son avocat

Kim Rebholz a, depuis, quitté le Congo. « Évidemment, je ne peux que le regretter du point de vue familial. Mais je ne le regrette pas... J’espère que cette expérience aura pu servir à quelque chose », dit-il.

Sonia Rolley, Joséphine Moulds