Les organisations de la société civile œuvrant pour la défense des droits humains dans la province du Nord-Kivu rejettent catégoriquement l’intention de l’AFC/M23 en faveur d’un État fédéral en République démocratique du Congo. Dans une déclaration rendue publique le 1er août dernier à Beni, ces structures dénoncent une démarche jugée « dangereuse et inacceptable » alors que l’Est du pays traverse une crise sécuritaire très grave, marquée par des violences et l’occupation de vastes territoires par la rébellion de l’AFC/M23.
La position de ces organisations fait suite à une conférence de presse tenue le 25 juillet 2025 par les leaders de l’AFC/M23, au cours de laquelle ils ont évoqué leur volonté de voir la RDC « adopter un système fédéral à l’issue des pourparlers de Doha au Qatar ». Ils ont également exprimé leur souhait de continuer à administrer pendant les zones actuellement sous leur contrôle.
Dans leur déclaration, les défenseurs des droits humains affirment que cette prise de position de l’AFC/M23 s’inscrit dans une stratégie plus large visant à « maintenir l’Est de la RDC hors de tout contrôle de l’État congolais et de la communauté internationale ». Ils qualifient ces propositions de « manifestation claire d’un projet de balkanisation et d’une tentative d’annexion de la partie Est du pays au Rwanda »
Ces organisations rappellent par ailleurs les propos tenus récemment par Erasto Bahati, gouverneur de la province sous le contrôle de l’AFC/M23. Celui-ci aurait appelé les cadres de base à mobiliser les jeunes pour s’enrôler dans l’armée rebelle, tout en qualifiant les pourparlers de Doha « d’aventures stériles ».
La déclaration ds ONDH revient également sur des faits documentés de violations graves des droits humains.
Du 12 au 15 juillet 2025, plusieurs civils auraient été tués dans les groupements de Binza et Busanza dans le territoire de Rutshuru, lors des affrontements entre les forces de l’AFC/M23 appuyées par l’armée rwandaise et les résistants wazalendo. Les signataires évoquent notamment « des civils tués dans leurs champs, des personnes jetées dans la rivière Rutshuru, et d’autres portées disparues à Kigaligali, Katanga, Makoka ou encore Nyabanira ».
Le 27 juillet, un bouclage à Mujoga, dans le groupement Kibati aurait conduit à l’enlèvement d’une trentaine d’hommes dont plusieurs corps sans vie auraient ensuite été découverts dans le parc national des Virunga.
Le 31 juillet, plus de 250 jeunes auraient également été enrôlés de force à Rutshuru, toujours selon les organisations.
Les ONDH estiment que le débat sur le fédéralisme est déplacé et inopportun. Selon elles, la décentralisation déjà inscrite dans la Constitution congolaise constitue une réponse suffisante aux besoins de gouvernance de proximité. Ils appellent plutôt à sa mise en œuvre effective par les autorités nationales.
Les organisations soulignent par ailleurs une contradiction dans le discours de l’AFC/M23 qui affirme avoir stoppé l’initiative présidentielle de révision constitutionnelle tout en exigeant aujourd’hui un changement de la forme de l’État, ce qui nécessiterait également une révision de la Constitution.
Enfin, les défenseurs des droits humains demandent aux États-Unis qui sont garants de l’accord de Washington du 27 juin 2025, ainsi qu’aux autres partenaires du processus de paix en RDC de faire pression sur le Rwanda et l’AFC/M23 pour le respect de leurs engagements.
Ils appellent à des mesures coercitives tout en insistant sur la nécessité d’une mise en œuvre effective de l’accord, au-delà des simples déclarations. « Les populations sous emprise rebelle sont des victimes quotidiennes de crimes atroces. La beauté d’un accord réside dans son application, pas seulement dans sa signature » conclut le document.