RDC : le cessez-le-feu unilatéral d’un jour annoncé par le M23/AFC visait à renforcer ses positions au Nord et Sud-Kivu, révèle Bintou Keita

Les rebelles du M23 à Goma
Les rebelles du M23 à Goma

La situation sécuritaire et humanitaire dans la partie Est de la RDC est au centre d'une importante réunion du Conseil des Droits de l'homme des Nations-Unies, ce vendredi 07 février 2025 à Genève (Suisse). Dans son exposé, la représentante spéciale du SG de l'ONU, Bintou Keita a rappelé la nécessité de poursuivre les négociations diplomatiques entre Kinshasa et Kigali dans le cadre du processus de Luanda. Elle déplore le fait que le cessez-le-feu unilatéral annoncé par la coalition M23-AFC-RDF n'a servi qu'au renforcement de ses positions au Nord et au Sud-Kivu.

« Je tiens à souligner le risque d'expansion du conflit dans la région si des mesures urgentes, dissuasives et contraignantes ne sont pas prises pour arrêter l’escalade de la violence. Le cessez-le-feu unilatéralement annoncé par le M23 et son partenaire l’Alliance Fleuve Congo, le 4 février, n’a tenu qu’un seul jour et permis le renforcement présumé de leurs positions au Nord et Sud-Kivu et la reprise d’intenses combats dans les environs de la ville de Bukavu. La reprise des offensives dans des centres densément peuplés, comme ce fut le cas à Goma, entraînerait des conséquences dévastatrices sur la population civile », a déclaré Bintou Keita, cheffe de la mission Onusienne en République Démocratique du Congo.

Depuis le début de cette année, a-t-elle fait remarquer, il a été constaté une avancée sans précédent du M23 et des forces armées rwandaises. La prise de la ville de Goma, le 27 janvier, a été précédée de combats sanglants opposant d’une part les forces armées de la République démocratique du Congo et leurs alliés d’une part, aux M23 et les forces armées rwandaises, d’autre  part. 

« Ces combats en zone densément peuplée ont causé la mort d’au moins 2 900 personnes et plus de 3 000 blessés. Les conséquences à moyen et long terme m’inquiètent, surtout la résurgence du choléra et le risque élevé de Mpox, l’interruption brusque de la scolarité des enfants, et la multiplication des violences sexuelles liées au conflit et des violences basées sur le genre. L’expansion territoriale du M23 au Nord-Kivu, où il occupe en partie quatre des six territoires, et la prise de plusieurs localités du territoire de Kalehe, au Sud-Kivu, ont causé des déplacements massifs », a déploré Bintou Keita.

Elle a par ailleurs déploré la détérioration de la situation humanitaire et économique dans la province du Nord-Kivu.

« Nous constatons des violations et d’atteintes aux droits de l’homme, des dégradations matérielles, et un accès encore plus incertain aux services sociaux de base. Autrement dit, la situation humanitaire s’est dramatiquement détériorée. L'économie de la province de Goma a également été affectée par le conflit. Les activités agricoles et minières, principales sources de revenus pour la population et le gouvernement provincial, sont paralysées. En même temps, la lutte contre l’impunité des crimes graves promue par les autorités nationales risque d’être fortement entravée par les dommages causés aux institutions judiciaires de Goma. Il est impératif que des mesures urgentes soient prises pour stabiliser la région, rétablir la paix et permettre une reconstruction durable ».

Cette réunion du Conseil des Nations-Unies aux droits de l'homme post chute de la ville de Goma chef-lieu de la province du Nord-Kivu coïncide avec le sommet conjoint de Dar es Salam, qui réunit les chefs d’État de la CAE et de la SADC. Ce sommet est attendu comme un moment clé dans la gestion de cette crise qui oppose la RDC et le Rwanda sur la présence de l’armée rwandaise et du M23 sur le territoire congolais. Le processus de Luanda et celui de Nairobi devraient être au centre des discussions pour tenter d’amorcer une désescalade durable.

Clément MUAMBA