Prise en charge des déplacés à Masisi : entretien avec le coordonnateur de MSF sur les priorités sanitaires pour les femmes et enfants

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La crise humanitaire à Masisi est de plus en plus alarmante, avec un afflux massif de déplacés fuyant les violences armées. Parmi eux, de nombreuses femmes et enfants se trouvent dans des conditions de vie précaires, exposés à des risques de santé accrus. À ce sujet, le DeskFemme s’est entretenu avec Romain Briey, coordinateur du projet MSF à Masisi, ce Mercredi 15 Janvier. Il identifie trois priorités majeures pour MSF dans la prise en charge de ces déplacés : 

« Nous nous concentrons d'abord sur le support des structures de santé locales, comme les postes de santé dans les zones de déplacement, en les approvisionnant en médicaments essentiels. Ensuite, nous intensifions la surveillance épidémiologique pour détecter rapidement les problèmes de santé, et enfin, nous mettons en place une réponse d’urgence adaptée pour faire face aux besoins immédiats. »

Les maladies infectieuses telles que le paludisme, les infections respiratoires et les maladies diarrhéiques représentent des menaces majeures pour les déplacés, en particulier les femmes enceintes et les enfants. Pour limiter la propagation de ces maladies, plusieurs mesures ont été mises en place, explique Romain Biey. 

« Nous avons installé des dispositifs de lavage des mains et des poubelles pour les déchets ménagers dans les bases des déplacés et dans les couloirs de l'hôpital. Une campagne de sensibilisation sur l’hygiène alimentaire et le lavage des mains est menée en collaboration avec le CICR à l'hôpital et dans les zones de refuge ».

Les équipes d'hygiène, qui effectuent un grand ménage quotidien des espaces occupés, veillent également à maintenir une hygiène stricte en chlorant régulièrement les toilettes et douches, poursuit-il . « De grands volumes d'eau sont traités en permanence pour garantir l'accès à de l'eau potable pour tous »

Prise en charge de la santé mentale et des traumatismes

Les traumatismes subis par les femmes et les enfants déplacés, notamment ceux liés aux violences sexuelles, sont un autre enjeu majeur. Bien que des services de soutien psychologique soient proposés à l'Hôpital général de référence (HGR) de la ville tous les jours, notamment pour les victimes de violences sexuelles, Romain Briey déplore le manque de moyens pour répondre à l’ampleur de la demande. 

« Malheureusement, à cause du grand nombre de déplacés, nous n’avons pas encore pu mettre en place un programme spécifique de santé mentale pour tous. Cependant, des interventions de première urgence sont assurées », indique-t-il.

Les femmes enceintes sont également confrontées à des risques dans ce contexte de déplacement. « Tous les services de santé pour les femmes, y compris les soins obstétricaux et gynécologiques, sont disponibles 24 heures sur 24 à la maternité de l'HGR », assure le coordinateur de MSF. La prise en charge des complications de grossesse, mais aussi des violences sexuelles, fait partie des priorités médicales de l’ONG.

Bien que les efforts pour améliorer la prise en charge sanitaire des déplacés à Masisi soient nombreux, la situation reste extrêmement complexe. Romain Briey lance un appel aux acteurs humanitaires et aux donateurs : « Malgré une situation sécuritaire délicate, il est toujours possible de travailler dans le territoire de Masisi et à Masisi centre. Les besoins sont énormes, et toute aide supplémentaire permettrait d’améliorer considérablement la situation de ces populations, dont une très large majorité est composée d'enfants en bas âge et de femmes. »

Pour les mois à venir, le coordinateur évoque les perspectives de la situation : « Les personnes pourraient se sentir suffisamment en sécurité pour retourner chez elles. Cependant, si la population continue à vivre dans des conditions précaires, que ce soit dans des camps ou à l’hôpital, il sera difficile d’éviter les pathologies liées à la promiscuité, comme les épidémies de rougeole ou les maladies transmises par l’eau non potable », a-t-il souligné.

Nancy Clémence Tshimueneka