Une bataille judiciaire au cœur de la lutte contre la corruption et le détournement des deniers publics en RDC

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Le procès opposant Florimond Muteba, président de l’Observatoire de la dépense publique (ODEP), une structure non gouvernementale de lutte contre la corruption en RDC, à Lydie Omanga, membre du conseil d’administration de l’Autorité de régulation des postes et télécommunications du Congo (ARPTC), a débuté ce lundi 4 novembre. Au cœur de cette affaire, une accusation d’imputation dommageable contre Florimond Muteba, qui a dénoncé début août dernier des avantages astronomiques dont bénéficierait le corps dirigeant de l’ARPTC, en termes de salaire. 

Lors de la première audience, les avocats de Florimond Muteba ont contesté la régularité de la procédure, mettant en avant des irrégularités dans la signification de la citation.

«Les avocats de Monsieur Florimond Muteba ont démontré que le tribunal ne devrait pas être saisi au regard de l’article 59 du code des procédures pénales, qui veut que la signification de la citation soit  faite en personne, et qu’elle suive la hiérarchie fixée par la loi, au cas où le concerné n’était pas cité directement », a confié à ACTUALITE.CD Jean-Claude Katende, un des conseils de la partie citée. 

Malgré ces arguments, le tribunal a estimé être régulièrement saisi. En outre, les deux parties ont convenu que la prochaine audience ait lieu le 18 novembre prochain, pour leur permettre de préparer leurs moyens de défense. 

D’autres parts, au-delà de l’aspect juridique de ce procès,  c’est une véritable bataille politique qui se joue, selon les avocats de la défense.

Pour Jean-Claude Katende, le fait que l’ODEP, sous la direction de Florimond Muteba, a publié à plusieurs reprises des rapports dénonçant des détournements de fonds publics et les cas de corruption, aurait mis à mal certains intérêts politiques, conduisant à des représailles judiciaires.

Pour soutenir cette affirmation, il indique que ce lundi, le tribunal a pris la décision de suspendre l'audience pour consulter des personnes extérieures au procès. Selon lui, cette intervention pourrait laisser penser à une influence politique sur le cours du dossier

Comprendre le dessous du dossier 

L’ODEP avait dénoncé lundi 5 août dernier  les rémunérations astronomiques à l’ARPTC. Certains du corps dirigeant de cette entreprise publique  bénéficieraient d’un salaire mensuel moyen de  340 000 USD par mois par dirigeant, avec des écarts allant de 319 321 à 439 471 USD.

Selon l’ODEP, ce collège dirigeant se serait octroyé des rémunérations atteignant collectivement 2,3 millions USD par an.

Cette structure indiquait par ailleurs que ces dirigeants  ont touché 18,6 millions de dollars entre 2021 et 2023, sans compter une « prime de janvier » de l’année en cours,  de 3 millions USD versée en début de l’année.

Pour l’ODEP, cette situation est en total déphasage avec la situation dramatique des millions de Congolais déplacés dans l’Est du pays, qui vivent une crise permanente. « Le budget de 19 millions USD consommé en 3 ans par ces 7 dirigeants est celui donné en 4 ans pour aider 7.000.000 des réfugiés intérieurs. Avec 150 FC chacun par année d’aide publique », renseignait  le communiqué de l’ODEP.

Bruno Nsaka