Près de deux ans après le drame de Matadi Kibala, les activités commerciales reprennent et le stationnement sauvage persiste : « On n'a pas tiré de leçons de nos erreurs »

Matadi Kibala
Matadi Kibala

Samedi 18 novembre, sous un déluge battant, des scènes familières reprennent vie le long de l'avenue Matadi Kibala, à Mont-Ngafula, dans l'ouest de Kinshasa. Malgré l'horreur vécue il y a près de deux ans, les marchands se hâtent de trouver refuge dans quelques abris temporaires proches. C’était le 2 février 2022, au même endroit, qu'un câble électrique à haute tension avait coûté la vie à 26 personnes, principalement des vendeuses, victimes d'électrocution. Depuis cet événement tragique, aucune solution viable proposée par les autorités provinciales n'a été mise en œuvre. Cette stagnation soulève des inquiétudes majeures quant à l'urbanisation de la ville.

Les autorités locales ont tenté de déplacer ce marché informel vers un autre marché improvisé, celui de Camp PM. Pourtant, les vendeurs restent attachés à leur lieu habituel, indifférents aux risques, pour diverses raisons.

Certains jugent le marché de Camp PM trop éloigné de la route principale, rendant l'accès à leurs produits difficile pour les clients qui préfèrent rester en voiture. « Certains de nos clients viennent en voiture et passent leur commande depuis là-bas. Il est donc difficile pour eux de descendre pour acheter des fruits », témoigne une vendeuse d'une cinquantaine d'années.

D'autres estiment que l'emplacement temporaire proposé par les autorités est trop exigu. « On m'a montré un endroit. Mais c'était trop étroit pour contenir toute ma marchandise. Et puis, c'est trop reculé », déclare une jeune vendeuse d'épices.

Les marchands déplacés vers le marché de Camp PM ont subi une autre épreuve. Le 21 août dernier, un incendie s'est déclaré, détruisant de nombreux stands et magasins. Deux jours après, le gouvernement provincial, dirigé par le gouverneur Gentiny Ngobila, est descendu sur les lieux pour évaluer la situation. Il a promis d'accélérer la construction d'un marché moderne.

« Le gouverneur a inspecté les dégâts causés par l'incendie. Il nous a assurés qu'il reviendrait. Jusqu'à aujourd'hui, il n'est pas revenu. Certains des victimes n'ont plus d'endroit pour exposer leurs marchandises. Ils ont dû fabriquer de petites tables pour présenter leurs produits. D'autres ne sont jamais revenus car ils ont tout perdu dans l'incendie », confie François, vendeur de babouches près de l'endroit le plus touché par le feu.

Le gouverneur Ngobila avait annoncé la fermeture immédiate de tous les marchés informels près de Matadi Kibala, et la délocalisation des arrêts de bus venant du Kongo Central vers le site de Mitendi, interdisant strictement le déchargement des marchandises au marché Matadi Kibala. Mais aujourd'hui, cette décision n'a pas été appliquée. Les bus en provenance du Kongo Central stationnent toujours à cet endroit. Le marché fonctionne toujours.

Les travaux de construction du marché moderne, initialement annoncés en 2020 avant les deux incidents, n'ont toujours pas commencé. En août dernier, le gouverneur Ngobila a assuré que ces travaux débuteront dès que les fonds seront disponibles. D'autres sources évoquent un conflit foncier sur le site prévu pour la construction de ce marché.

Par Bruno Nsaka