Le Front commun pour le Congo (FCC), plateforme politique dont le Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie (PPRD) est la principale composante, a dénoncé mercredi « avec véhémence » "l’enlèvement" d’Emmanuel Ramazani Shadary, arrêté à l’aube à son domicile de Kinshasa par des hommes armés et conduit vers une destination inconnue.
Dans un communiqué, le FCC dit avoir appris « avec stupéfaction » l’interpellation, « aux petites heures du matin, par des hommes en armes, sans mandat ou autre document officiel », de Shadary, député national honoraire, ancien vice-Premier ministre, secrétaire permanent du PPRD et membre du bureau politique du FCC.
La plateforme de l’ancien président Joseph Kabila condamne « fermement cet énième acte d’intimidation et de terreur à l’endroit des leaders de l’opposition politique en général, et de ses cadres et membres en particulier », et exige « la libération immédiate de ce haut dignitaire de la République », dont « le seul crime est d’exercer, pacifiquement, les droits et libertés que lui reconnaît la Constitution ».
« Aucune menace, aucune intimidation ne fera fléchir la détermination du FCC à lutter pour la restauration de la démocratie et de l’État de droit », affirme encore le communiqué, qui assure se réserver « le droit d’utiliser tous les moyens légaux » à cette fin.
L’épouse d’Emmanuel Ramazani Shadary, Wivine Paipo Ngweli, ancienne députée du PPRD, a affirmé que l’arrestation est intervenue vers 3h40 du matin, lors d’une opération menée par « une quarantaine d’hommes armés », dont des éléments de la Garde républicaine et des agents en civil.
« Ils étaient environ quarante, avec six jeeps et un bus de couleur blanche », a-t-elle déclaré dans un message audio transmis à la presse, ajoutant que les hommes armés avaient d’abord fait irruption dans la chambre de leur fils, une arme braquée sur lui, pour lui demander d’indiquer où se trouvait son père.
Selon elle, les agents se sont ensuite rendus dans la chambre de M. Shadary avant de l’interpeller. « Ils ont arrêté mon mari. Ils ont aussi pris la bonne, trois policiers et un de ses chauffeurs », a-t-elle affirmé, précisant que les forces présentes avaient indiqué qu’elles « ramèneraient » son mari à la maison.
Mme Paipo Ngweli a assuré que les agents ne disposaient « d’aucun papier, même pas une convocation », et n’ont pas précisé la destination vers laquelle Emmanuel Ramazani Shadary était conduit. Elle a dit avoir voulu l’accompagner en apportant ses médicaments, expliquant que son mari est souffrant, mais que cela lui aurait été refusé.
« Jusqu’à 10h du matin, je ne sais pas où se trouve mon mari », a-t-elle ajouté, disant vouloir se rendre « à l’ex-Demiap, à la présidence et à l’ANR » pour obtenir des informations. « C’est un opposant, un politicien non armé. Il est interdit de sortir du pays et a décidé de rester dans son pays », a-t-elle insisté.
Cette arrestation intervient dans un contexte politique tendu, quelques jours après la condamnation à mort de l’ancien président Joseph Kabila par la Haute Cour militaire. Dans une récente interview, Emmanuel Ramazani Shadary avait dénoncé un procès qu’il jugeait inopportun et susceptible, selon lui, de « diviser davantage les Congolais », accusant le pouvoir de détourner l’attention des problèmes sécuritaires et politiques du pays.
En mars dernier, Shadary et Aubin Minaku, vice-président du PPRD, avaient été interdits de quitter le territoire national dans le cadre d’enquêtes menées par la justice militaire, les autorités évoquant alors des soupçons de complicité avec la rébellion de l’AFC/M23.