Recrudescence de la violence dans les territoires de Masisi et Rutshuru aggrave la situation de la malnutrition infantile

Des déplacés du territoire de Rutshuru. Ph. ACTUALITE.CD/Moses Sawasawa
Des déplacés du territoire de Rutshuru. Ph. ACTUALITE.CD/Moses Sawasawa

La situation de la malnutrition infantile atteint des proportions alarmantes dans le territoire de Masisi, province du Nord-Kivu, suite aux combats entre les FARDC et le M23 appuyé par l’Armée rwandaise. Selon Médecins Sans Frontières/Médecins Sans Frontières (MSF), les affrontements armés qui secouent la région ont contraint de nombreuses familles à fuir leurs foyers et leurs terres agricoles, aggravant ainsi la crise.

Depuis le mois de janvier, les hôpitaux soutenus par les équipes de MSF à Masisi et Mweso enregistrent une moyenne de 800 admissions d'enfants souffrant de malnutrition aiguë sévère chaque mois, soit près du double de la moyenne mensuelle enregistrée en 2022.

Le territoire de Masisi, situé à environ 20 kilomètres au nord-ouest de la capitale provinciale Goma, est une région réputée pour ses collines verdoyantes fertiles, où l'agriculture est la principale activité économique. Cependant, cette région est en proie à des conflits armés depuis de nombreuses années, et la situation s'est encore détériorée depuis 2022 en raison des affrontements entre le Mouvement du 23 mars (M23), les forces armées congolaises et divers autres groupes armés.

Ces derniers mois, l'accès aux terres agricoles s'est considérablement restreint en raison de la présence d'hommes armés établissant des points de contrôle et des "taxes" sur les routes. Les habitants peinent à rejoindre leurs terres et sont souvent contraints de les abandonner, laissant leurs récoltes pourrir sur place.

Fahida, parent d'un enfant hospitalisé à Masisi, témoigne de la situation : "À cause des hommes armés, je ne peux pas me rendre aux champs tous les jours. Quand nous empruntons la route, nous avons peur de tomber sur des hommes armés en chemin. Ils réclament de l'argent et peuvent même nous tuer ou nous agresser."

La crise de la malnutrition s'aggrave, en partie en raison du manque de structures médicales fonctionnelles dans la région. Les établissements de santé existants souffrent d'une pénurie de fournitures médicales essentielles, et les autorités sanitaires éprouvent des difficultés à les soutenir. La situation est particulièrement préoccupante pour le traitement de la malnutrition, pour lequel des médicaments et le Plumpy’Nut, un aliment thérapeutique à base d'arachide, sont nécessaires.

Si les enfants souffrant de malnutrition modérée ne reçoivent pas un traitement adéquat dans les centres de santé, ils risquent de développer une malnutrition sévère aux conséquences médicales bien plus graves.

Le Dr. Nadine Neema Mitutso, responsable des activités médicales à l'hôpital de Masisi, explique : "Aujourd'hui, le nombre d'admissions en unité de soins intensifs à l'hôpital est presque équivalent au nombre d'admissions en programmes de traitement de la malnutrition en ambulatoire dans les centres de santé. La plupart de ces hospitalisations pourraient être évitées si les enfants recevaient un traitement préventif dans les centres de santé."

Une fois les enfants sortis de l'hôpital, les familles font face aux mêmes difficultés pour obtenir de la nourriture régulière et thérapeutique, ce qui accroît le risque de rechute.

Carole Zen Ruffinen, coordinatrice de projet de MSF à Mweso, souligne la nécessité d'une réponse globale à la crise : "Pour briser ce cercle vicieux, une réponse holistique est indispensable de la part de tous les acteurs de la région. Il est impératif de trouver des solutions durables pour répondre aux besoins nutritionnels croissants de la population."

MSF appelle d'autres organisations travaillant dans le Nord-Kivu à assurer une présence opérationnelle durable pour prévenir les conséquences désastreuses de la malnutrition. Les autorités congolaises et les donateurs sont également encouragés à renforcer la capacité de réponse médicale des établissements de santé, notamment en ce qui concerne le traitement de la malnutrition.

La crise économique causée par les conflits a également entraîné une réduction des échanges commerciaux et une augmentation significative des prix alimentaires, mettant à mal la sécurité alimentaire des familles. Les habitants de la région, déjà vulnérables, luttent pour nourrir leurs enfants, et la situation s'aggrave de jour en jour.