Arrestation de Stanis Bujakera : à la veille du discours de Félix Tshisekedi à l'ONU, François Soudan l'exhorte d'honorer sa promesse de faire de la liberté de la presse "gage de la démocratie"

Photo d’illustration
Stanis Bujakera

Stanis Bujakera Tshiamala Directeur de Publication Adjoint de Actualite.cd et correspondant de Jeune Afrique en République démocratique du Congo (RDC) a totalisé plus d'une semaine en détention déjà. Officiellement placé sous mandat d’arrêt provisoire le lundi 11 septembre, il avait été transféré jeudi 14 septembre à la prison de Makala.

Son placement en détention préventive a été confirmé vendredi 15 septembre et ses avocats ont fait appel afin d'obtenir sa liberté provisoire et s'il échet de comparaître en homme libre. En attendant cette décision, François Soudan, Directeur de la rédaction de Jeune Afrique a attiré l'attention du Chef de l'État Félix Tshisekedi sur la nécessité d'honorer sa promesse mais aussi le souhait de son père (Ndlr : Etienne Tshisekedi) d'assurer la liberté d'expression en RDC comme gage dans un État de droit.

« Ce que je souhaite, c'est m'adresser au Président Félix Tshisekedi lui-même et lui rappelé une phrase qu'il a prononcée en mai dernier "la liberté de la presse, elle est vitale pour la consolidation de la démocratie". C'est une juste phrase qui me rappelle les mots que son père Feu Etienne Tshisekedi dans un entretien qu'il m'avait accordé il y a une douzaine d'années, il m'avait dit ce qu'il voulait, que le Congo soit un État de droit et réalise le rêve de nos glorieux aînés ne serait-ce que pour la crédibilité du discours que vous vous apprêtez à prononcer dans quelques jours devant l'assemblée générale des Nations-Unies, faites en sorte monsieur le Président que cette phrase s'applique aussi à votre grand pays, la place de Stanis Bujakera Tshiamala cet enfant du Kasaï Oriental tout comme vous sa place n'est pas à la prison de Makala », a dit François Soudan au cours d'une interview accordée à RFI dimanche 18 septembre 2023.

À la question de savoir pourquoi cette affaire dépasse le cas spécifique de Stanis Bujakera  pour concerner tous les médias congolais, François Soudan estime que l'arrestation de Stanis Bujakera sonne comme un avertissement aux journalistes congolais de ne pas être objectif. À l'en croire, la nouvelle loi congolaise sur la presse reconnaît l'accès aux sources d'informations et sa non divulgation.

« Les autorités congolaises notamment l'entourage sécuritaire du Président place cette affaire dans le cadre d'une atteinte à la sécurité nationale, je peux le comprendre dans la mesure où cet article signé Jeune Afrique souligne ce que tous les initiés connaissent à Kinshasa c'est-à-dire qu'il existe une rivalité des services entre l'agence nationale des renseignements et les renseignements militaires mais ce que veulent les enquêteurs c'est de contraindre Stanis Bujakera dont l'ordinateur, les téléphones ont évidemment été saisis, a dévoilé ses sources tant sur cette affaire que sur toutes les autres qu'il a eue à couvrir en dépit du fait que la nouvelle loi sur la presse adoptée le 4 Avril à Kinshasa stipule dans ses articles 95 à 97 le droit pour le journaliste d'accéder aux sources et l'obligation de ne pas les divulguer c'est un avertissement en quelque sorte qui est adressé à trois mois de l'élection présidentielle à tous les confrères et consoeurs de Stanis Bujakera il est de plus en plus difficile pour un média en RDC aujourd'hui d'être objectif et puis distant », a fait remarquer François Soudan.

Il a fait savoir que sa rédaction avait bel et bien reçu et diffusé la réaction du gouvernement contestant l'authenticité du document exploité par Jeune Afrique. Toutefois, il estime que le gouvernement congolais doit présenter des éléments qui attestent le rapport de l'ANR sur le décès de Chérubin Okende serait faux.

« Je voudrais rappeler tout d'abord qu'il existe des moyens tout à fait légaux d'apporter un démenti sans qu'il soit nécessaire d'accuser un journaliste de chercher à discréditer l'action gouvernementale et encore moins de l'emprisonner ça s'appelle droit des réponses. On a certes reçu un droit de réponse de la part du ministre congolais de l'intérieur, sécurité et Affaires Coutumières Peter Kazadi dont nous avons d'ailleurs publié des extraits mais ce droit de réponse nous est parvenu le lendemain de l'arrestation de Stanis Bujakera Tshiamala qui est une étrange manière de faire quoi qu'il en soit nous demeurons tout à fait prêt à en discuter pourvu qu'il soit accompagné d'éléments concrets indiquant que nous nous serions trompés », a prévenu le Directeur de la Rédaction de Jeune Afrique.

Stanis Bujakera a été interpellé le 8 septembre à l’aéroport de Ndjili alors qu'il voulait se rendre à Lubumbashi. Officiellement placé sous mandat d’arrêt provisoire le lundi 11 septembre, il avait été transféré ce jeudi 14 septembre à la prison de Makala. Son placement en détention préventive a été confirmé ce vendredi 15 septembre, pour une durée de 15 jours. Ses avocats ont fait appel.

Les autorités congolaises lui reprochent la « propagation de faux bruits » et la « diffusion de fausses informations », à la suite d'un article publié le 31 août sur le site web de Jeune Afrique, non signé de lui, concernant le meurtre de l’ancien ministre et député congolais Chérubin Okende.

Clément MUAMBA