RDC: des dizaines de cas de violences sexuelles recensés à Kamako (Kasaï)

Illustration/Ph. ACTUALITE.CD

A Kamako, cité située à 150 km de Tshikapa (Kasaï), des dizaines de cas de violences sexuelles sont signalés avec l’accélération des expulsions de migrants congolais par l’Angola. Certains cas sont commis pendant le transfert mais d’autres se déroulent dans cette localité. 

« Je n’avais jamais vu ça. On a reçu dans notre centre 46 cas de violences sexuelles aggravées en trois mois, donc des patientes, femmes ou filles, qui se retrouvent avec des complications médicales à cause de la violence des assauts, explique le docteur Victor Mikobi, médecin spécialisé sur les violences sexuelles au centre de santé de référence Kamako État. On nous réfère les cas les plus graves mais au total sur tous les centres de santé depuis janvier, on en a recensé 122 ». 

En mars, plusieurs agences onusiennes, dont l’OIM, HCR et OCHA, ont fait une mission à Kamako, alertée par la hausse des expulsions en provenance d’Angola. Des milliers de Congolais vivant et travaillant sur le sol angolais sont expulsés avec brutalité. Parmi eux, les femmes et les filles sont les plus vulnérables. 

« Les filles et les femmes sont arrêtées partout où elles se trouveraient, sans des besoins nécessaires, détenues puis séparées de leurs enfants et maris, soumises à des traitements inhumains et dégradants, parfois violées et conduites dans les camions et camionnettes au même titre que les hommes », écrivent-elles dans un rapport encore préliminaire de leur mission, sans donner de chiffres. 

Fabien Sambussy, chef de mission de l’Organisation mondiale des migrations (OIM), confirme à ACTUALITE.CD que « certains  (de ces migrants) sont victimes d’abus ou de traitement inhumain et dégradants (vols d’effets personnels, violence, viols, séparations familiales, détention, etc…) ».

Mais ce que révèle le docteur Victor Mikobi, c’est qu’une majorité de ces violences sexuelles se déroulent sur le sol congolais. Sur les 46 victimes reçues dans son centre de santé, la plupart des victimes de viols, 14 ont accusé les forces de sécurité angolaises. 32 disent avoir été abusées une fois sur le sol congolais. 

« Côté congolais, ce sont aussi des viols en groupe, mais c’est plutôt le fait de civils. Ils proposent de l’argent aux femmes et aux  filles expulsées qui sont complètement démunies et ils abusent d’elles de manière violente et elles se retrouvent avec des complications gynécologiques », explique encore le médecin. 

La coordination de la société civile à Kamako appelle à ce que ces violences soient mieux documentées. « Il y a des migrants qui portent des traces de blessures. Il y a des femmes violées. Il faudrait accroître le monitoring pour avoir une idée de l’ampleur de ces violences. Mais ces refoulements se font dans des conditions inhumaines », confirme son président, l’abbé Abbé Trudon Keshilemba.  

« Nous avons plusieurs fois protesté contre ces abus, côté angolais. Coté congolais, on nous a signalé des cas de prostitution qui ont dégénéré », explique le gouverneur du Kasai, Dieudonné Pieme Tutokot. « Le parquet général a ouvert une enquête et nous attendons les résultats pour comprendre quelle est la motivation de ce forfait ».

Lire: RDC-Kamako: le dilemme des autorités du Kasaï face au flux des refoulés congolais d'Angola

        “Kamako devient un camp de migrants à ciel ouvert” (OIM) 

Sonia Rolley