RDC : à Kinshasa, des centres offrent l’opportunité d’initiation aux STEM pour les jeunes femmes

Kinshasa Digital Academy/séance de travail
Kinshasa Digital Academy/séance de travail. Photo d'illustration

En dehors des établissements scolaires, qui offrent des formations sur une durée minimum de 3 ans concernant les métiers liés au STEM, plusieurs centres connexes proposant un apprentissage accéléré ont été crées dans la capitale congolaise. Parmi eux, Kinshasa Digital Academy (KDA) et Ingenious City. 

Le 30 septembre 2021, la première cohorte de formation de la Kinshasa Digital Academy recevait des diplômes lors d'une cérémonie organisée en présence de plusieurs personnalités congolaises. Sur un total de 1300 candidatures reçues, seules 42 ont été retenus et ont pris part à une formation de près de 8 mois sur le développement web et mobile ainsi que le référencement digital.

Sur le nombre total de candidatures retenues, il y avait 16  filles soit 40%. Challim Musombo, chargée de médiation emploi explique les critères de sélection et le processus.

« KDA a été lancée en janvier 2020. Pour être accepté en tant que candidat, nous prenons en compte une très forte motivation, le fait de se rendre disponible à plein temps pour la formation, aimer le travail en équipe et surtout avoir un attrait réel pour le numérique. Les candidats ne paient aucun frais durant toute la période de formation. KDA offre une bourse de 5500$ qui sera repartie en pourcentages retirés sur le salaire du candidat, une fois engagé dans une entreprise » dit-elle. 

Dans les locaux de cet organisme situé dans la concession Utexafrica, des nouveaux candidats inscrits passent leurs journées, de 9h à 18h devant des ordinateurs. Si pour la première cohorte, il y a eu autant de candidates, la deuxième qui sera bientôt lancée dans différentes entreprises pour un stage professionnel, ne comprend qu’un effectif de 3 filles sur les 35 candidats. 

« Les jeunes femmes sont intéressées mais elles ont quelque réserve. Nous avons choisi de garder pour cette formation, la principale thématique, Développement web et mobile. C’est de la technologie. Peut-être que les jeunes filles considèrent cela comme un métier d’hommes et elles se montrent réticentes. » dit Mme Musombo, essayant d’expliquer ce nombre des filles.  

Parmi les 3 candidates, Olga Mujinga, une ancienne étudiante de l’Université catholique du Congo, Licenciée en économie propose de développer une application mobile destinée aux PME. 

« J’ai terminé mes études en économie. Je voulais accompagner les petites et moyennes entreprises (PME) à se développer parce j’ai constaté qu’elles n’avaient pas assez d’outils en termes d’accompagnement. Des nouvelles technologies peuvent permettre un bon suivi et la prise de décision sur les politiques d’entreprises pour accroitre leurs activités. Je me suis lancée dans la programmation pour créer des outils permettant aux entreprises de bien assurer leurs comptabilités, la survie de leurs entreprises et la gestion du personnel. J’ai déjà proposé deux projets réels, Kesho Congo et des sites internet » explique la jeune femme. 

"Les candidatures féminines sont vivement encouragées" 

Ingenious City est spécialisé dans la formation à l'entrepreneuriat spécifique aux entrepreneurs ou aspirants entrepreneurs de la RDC, à tous les stades du cycle de vie d'entreprise. Créé par des congolais et ouvert depuis mai 2018, Ingenious City fonctionne avec de nombreux partenaires dans tout le pays. 

« Les appels à candidatures se font via un questionnaire en ligne que nous partageons sur nos réseaux sociaux  via une campagne d’emails à notre base de données. Ce questionnaire nous permet d'évaluer la pertinence des projets. Un premier filtre effectué par plusieurs membres de l’équipe élimine les candidatures ne correspondant pas aux critères, un deuxième filtre est effectué par le biais de tests en ligne et les candidats ayant les meilleurs scores sont invités à un boot camp de 3 jours au cours duquel ils sont formés au pitch, conseillés par des mentors avant de faire face à un jury final qui choisit les futurs incubés sous base de critères prédéfinis» explique Shary Lima, incubation program manager.  

Au moins 30 % de candidatures reçues à chaque programme sont féminines. Les programmes d’incubations s’étalent sur une durée de 6 mois qui comprennent des formations à l'esprit d'entreprise, du mentorat, des masters class, des workshops et des formations en ligne sur les bases de la vie d’une entreprise (gestion, marketing, communication, finances, ressources humaines, vente et autres) 

« Nous sommes à la troisième cohorte pour Orange Corners, une initiative du Royaume des Pays-Bas. Généralement nous avons 20 candidats, à chaque formation. Pour cette fois, nous avons 18 candidats dont 8 sont des femmes (44%). Nous partageons les appels à candidatures à nos anciennes incubées, leur demandant de les partager à leur tour auprès des autres jeunes femmes, nous publions sur nos comptes de réseaux sociaux avec une mention spéciale ‘les candidatures féminines sont vivement encouragées’ pour permettre aux jeunes filles d’être nombreuses à postuler », a-t-elle ajouté. 

Des espaces dédiés à l’initiation des jeunes femmes dans les STEM

Avec Onu Femmes, Ingenious City propose des formations sous le programme Tujenge STEM, dédié essentiellement aux jeunes femmes. En 2020, 62 % des incubés étaient des jeunes femmes entre 18 et 35 ans. Medi Kimbeni Kebantima, ancienne étudiante en Ingénierie Électronique à l'ISTA avait proposé « KisiApp », une application mobile pouvant scanner les emballages des produits pharmaceutiques afin d’en déterminer l'authenticité ou faire une reconnaissance des faux médicaments. 

« J’avais découvert l’appel à candidatures d’Ingenious City en 2019 sur Twitter. J’y ai postulé, à ma grande surprise mon projet a été retenu. (…) Actuellement, j’ai décroché la sixième place au concours national de l’exposition des universités de la RDC, j’ai obtenu le prix Strong Ladies catégorie Sciences en 2021, je pourrais également présenter mon projet en novembre au concours Intello Moseka de Wallonie Bruxelles, j’espère pouvoir gagner ce concours », explique la jeune femme.

Au niveau de Kinshasa Digital Academy, le programme Mwasi Tech est un concept qui comprend des ateliers de plus ou moins 2 heures organisés pour pousser la jeune fille congolaise en générale et kinoise en particulier à s’intéresser au secteur du digital. Plusieurs thématiques sont abordées, notamment comment mettre un profil professionnel sur les médias sociaux. Les jeunes femmes sont invitées à s’inscrire à travers les campagnes de communication digitale et physique. La participation est gratuite. 

Lydia Muteba travaille actuellement en tant que référent digitale dans un media en ligne congolais. Elle a également participé à l’un des ateliers Mwasi Tech (autrefois Woman Boost your Business) en 2019, qui lui a offert l’opportunité d’être retenue candidate à la première cohorte certifiée en fin septembre.

Par ailleurs, pour inciter les jeunes femmes à s’intéresser à ces formations liées aux STEM, les formateurs ont suggéré aux femmes qui évoluent déjà depuis des années dans ce secteur à organiser des descentes sur terrain, dans les écoles et universités pour parler de ces métiers et servir de rôles modèles à la jeune génération.

Prisca Lokale