21e anniversaire de la guerre de Kisangani : Denis Mukwege publie une note de plaidoyer pour l’adoption d’une “stratégie nationale holistique de justice transitionnelle”

Les tombes des victimes de la guerre de six jours à Kisangani/Ph ACTUALITE.CD

Il y a 21 ans, la ville de Kisangani était secouée par la guerre entre les armées ougandaise et rwandaise pendant six jours, faisant plus de 1000 morts et 3 000 blessés et des dégâts matériels inestimables. Les victimes de ces atrocités sont restées majoritairement sans assistance ou indemnisation jusqu’à ce jour. C’est dans ce cadre que le Prix Nobel de la Paix, Denis Mukwege, mène de plaidoyer pour une justice transitionnelle pour les crimes imprescriptibles commis dans l’est du pays notamment par des forces armées étrangères.

Les crimes commis à Kisangani par les forces ougandaises et rwandaises figurent parmi plus de 600 crimes graves répertoriés dans le Rapport Mapping de l’ONU publié il y a plus de 10 ans.  Ce samedi 5 juin, Dr Mukwege a publié une note de plaidoyer en vue d’adopter une “stratégie nationale holistique de justice transitionnelle”.

“Outre le travail de cartographie  et de documentation méthodique de 617 incidents violents commis pendant l’un des chapitres les plus tragiques de l’histoire moderne du pays, au cours duquel les femmes et les enfants ont payé un très lourd tribut, les experts onusiens ont estimé que le système judiciaire congolais ne dispose pas des moyens nécessaires pour relever les défis liés à la répression des crimes internationaux. De plus, ils ont formulé une série des recommandations à l’attention des autorités congolaises pour briser le cycle de la violence et de l’impunité. Ces recommandations soutiennent la nécessité de recourir aux mécanismes judiciaires et non-judiciaires de la justice transitionnelle, qui sont complémentaires”, dit la note de plaidoyer du Prix Nobel de la Paix.

La stratégie "holistique" prend en compte la réparation en faveur des victimes et les réformes des services de sécurité afin d’éviter la commission des crimes.

“Cette stratégie priorise les garanties de non renouvellement des atrocités telles une profonde réforme du secteur de la sécurité et les poursuites judiciaires contre les auteurs des crimes les plus graves par des mécanismes d’enquête et de jugement internationaux ou internationalisés. Elle insiste en outre sur l’importance de fournir des réparations aux victimes et aux communautés affectées et sur la nécessité de mettre en place des mécanismes de recherche de la vérité, qui sont les préalables indispensables à la réconciliation et à l’instauration de la paix durable”, dit Dr Mukwege.

L’initiateur de la Fondation Panzi appelle toutes les forces vives à s’approprier “le contenu de cette stratégie pour réclamer au gouvernement congolais et à la communauté internationale, l’établissement d’un Tribunal Pénal International pour la RDC le respect de leurs droits à la justice, à la vérité, à des réparations et à des garanties de non répétition”. 

“Aucune immunité, aucun compromis ni « realpolitik » ne peut être invoqué pour éluder les responsabilités des auteurs de ces crimes et de leurs commanditaires”, soutient Denis Mukwege.