Candidature de la RDC au Conseil de sécurité : Félix Tshisekedi à contre-courant de l’Union africaine ?

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Pourquoi la République Démocratique du Congo, pays actuellement à la tête de l’Union africaine, refuse-t-elle de se plier à la décision de cette dernière ayant préféré la candidature de Libreville à celle de Kinshasa pour siéger en qualité de membre non-permanent du Conseil de sécurité des Nations Unies pour les exercices 2022 et 2023 ? Samedi 29 mai 2021, le Chef de l’Etat congolais, Félix Tshisekedi a officiellement annoncé, aux membres du corps diplomatique accrédité à Kinshasa, la candidature de son pays au poste de membre non-permanent du Conseil de sécurité des Nations Unies. Aux allures de pré-campagne, les axes de la vision de la RDC ont été portés à la connaissance des représentants des pays membres des Nations Unies accrédités à Kinshasa. 

Cette annonce, relevant de l’affirmation de la souveraineté de la RDC, traduit un paradoxe stratégique, voire une inconséquence diplomatique, qui attestent une faible marge d’influence de Kinshasa au sein de l’organisation continentale qu’il dirige par le fait de rotation depuis février dernier pour un mandat d’une année. En effet, début mars 2021, l’Union africaine a organisé l’élection des pays devant représenter le continent au conseil de sécurité pour deux années (2022 et 2023). Ce, en remplacement de la Tunisie et du Niger dont le mandat arrive à son terme à la fin de cette année.

Il en ressort que le Gabon et le Ghana ont été élus à cet effet. Le Gabon a été élu pour le compte de l’Afrique centrale. Il était en compétition avec, d’une part, le Tchad, qui a retiré sa candidature pour rallier celle de Libreville, et, d’autre part, la RDC, dont le cinquième Président a dit, à son investiture, souhaiter « impulser une meilleure présence de notre pays dans les instances internationales, à la hauteur de notre vocation naturelle. »   

A défaut d’avoir persuadé ses pairs de soutenir sa candidature, Félix Tshisekedi ferait œuvre utile d’éviter à l’Afrique l’image d’un continent (encore) divisé. En effet, ceci contraste avec l’ambition d’ « Union » des pays africains qu’affirme l’organisation continentale. Ce, une année après l’ignominieuse bataille diplomatique ayant opposé, en juin 2020 pour la même cause d’un poste au conseil de sécurité, Djibouti, non élu par l’Union africaine, et le Kenya, élu par les pays de l’organisation panafricaine. A l’issue du vote à l’Assemblée générale des Nations Unies, le Kenya s’en est sorti la tête haute.

Pour siéger au conseil de sécurité, la RDC devrait remuer ciel et terre pour « affaiblir » la dynamique d’unité des pays africains constituant près d’un tiers de l’Assemblée générale des Nations Unies, et, en plus, de mobiliser des soutiens des pays non-africains. Ceci est d’autant plus bouleversant que les objectifs de l’Union africaine, dont la RDC doit favoriser l’atteinte, consistent, entre autres, de « réaliser une plus grande unité et solidarité entre les pays africains (…) ».

La diplomatie congolaise aura plus à gagner de ne pas prêter le flanc et de veiller à préserver l’image de noblesse pendant qu’elle dirige l’Union africaine. Elle a intérêt de ne pas s’exposer aux effets pervers d’une confrontation électorale à l’issue incertaine à l’Assemblée générale des Nations Unies. Aux ambitions de positionnement élevé au sein des organisations intergouvernementales notamment africaines, la RDC devrait élargir le cercle de ses alliés par un travail méthodique fondé sur la cohérence entre la vision du Chef de l’Etat, une organisation optimale pour notamment la planification et mobilisation des ressources nécessaires de divers ordres, et une gestion rigoureuse du temps stratégique dans la phase de mise en œuvre. Il y va, par exemple, du succès de la bataille en cours pour l’élection du candidat de la RDC au poste de secrétaire exécutif de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC).  

JJ MWENU

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