Il est vrai que la Constitution française a inspiré, à bien d'égards, le constituant congolais. Mais il est encore beaucoup vrai que le constituant congolais s'en écarte sur un certain nombre des points. Tel est le cas au sujet du statut et des droits des anciens Présidents de la République.
La Constitution française du 4 octobre 1958 dispose en son article 6 alinéa 2 ce qui suit : "Nul ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs". L'adjectif "consécutif" employé par le constituant français résout un problème de droit : après deux mandats, on tait s'efface, et après, on peut prétendre revenir et se représenter aux élections présidentielles après au moins un mandat présidentiel exercé par son successeur. Cet adjectif "consécutif" qui n'existe nulle part dans la Constitution congolaise. Par conséquent, il serait maladroit d'interroger la Constitution française de 1958 dans le but de résoudre un question de droit constitutionnel congolais.
Je dis que le sénateur à vie n'est pas un sénateur. Il siège au Sénat, avec un statut particulier, mais n'est pas sénateur au sens classique de la notion.
Tenez :
1. La souveraineté nationale appartient au peuple qui l'exerce directement par voie de référendum ou indirectement par ses représentants (Art. 5 Constitution). Les représentants du peuple composent le Parlement. Il s'agit des députés nationaux (Assemblée Nationale) et des Sénateurs (Sénat). Le sénateur représente sa province mais son mandat est national (Art. 104 Constitution).
Question : quelle est la province que représente un sénateur à vie ?
2. Le sénateur est élu au second degré par les assemblées provinciales.
Question : Qui a élu le sénateur à vie ?
3. Le sénateur est élu pour un mandat de cinq ans.
Question : quel est le mandat du sénateur à vie ?
4. Le sénateur est élu avec deux suppléants.
Question : qui sont les suppléants du sénateur à vie ?
Cependant, puisqu'il siège au Sénat, toutes les incompatibilités liées au statut de sénateur sont directement liées au sénateur à vie. Par contre, si un sénateur "classique" peut renoncer au mandat de sénateur pour exercer une autre fonction dont le cumul incompatible avec le mandat de sénateur, le sénateur à vie, lui, ne peut renoncer à ce statut qui a un caractère viager.
Si, par contre, une opinion voudrait que, puisque la fonction de sénateur à vie serait un droit, et que tout bénéficiaire d'un droit à le droit d'y renoncer (comme le serait le raisonnement prêté en droit civil), la renonciation du statut de sénateur à vie ne peut avoir pour objectif de se représenter aux élections présidentielles. Telle est la volonté du constituant et un verrou.
Le droit est beau, mais le raisonnement en droit est difficile.
Grace MUWAWA L.
Avocat