"La conférence sur la paix, la réconciliation et le développement du Kasaï était une mascarade", selon la professeure Joséphine Bitota

Une cinquantaine de miliciens Kamuina Nsapu rendus aux autorités militaires à Kananga.

Intervenant à l'atelier de réflexion sur la réconciliation dans l'espace Kasaï, la professeure Joséphine Bitota, rectrice de l'Université du Kasaï (UKA), a planché sur la responsabilité de l'État dans le drame du Kasaï.

Joséphine Bitota critique la conférence sur la paix, la réconciliation et le développement du Kasaï, organisée en septembre 2018 sur l’initiative de Joseph Kabila.

"On peut dire que c'était une mascarade pour laquelle l'État a déboursé des sommes énormes. Cette conférence a été animée en grande partie par des experts venus d'ailleurs avec des théories bien ficelées, écartant des gens sur terrain qui pouvaient, à partir du vécu, apporter des éléments importants dans la consolidation de la paix au Kasaï. Les mauvaises langues disent même que ce n'était qu'une occasion de sortir l'argent de la caisse de l'État et se le partager", déclare la professeure.

Joséphine Bitota qualifie de précaire le calme qui règne dans le Kasaï.

"Il n'y a pas de paix au Kasaï. Les violences peuvent resurgir à tout moment car les plaies saignent encore et aucun mécanisme n'est toujours mis en place pour panser et cicatriser ces plaies", ajoute-t-elle craignant en même temps de nouvelles violences.

"Les autorités ont copié des expériences malheureuses de l'Est du pays qui ont montré leurs limites par l'octroi des grades aux miliciens dans l'armée et dans la police. En remettant des dons et argent à certains chefs miliciens du Kasaï, les autorités ont inculqué un effet de contagion chez les autres chefs miliciens qui se sentent lésés et sont prêts à faire parler les armes pour bénéficier des mêmes faveurs", dit-elle.

Pour la paix au Kasaï, Bitota propose la convocation de nouvelles assises pouvant conduire à la réconciliation. Ces assises devraient se tenir non seulement à Kananga mais aussi dans des territoires et secteurs de l'espace Kasaï.

"Il faudrait y mettre des moyens et prendre un temps suffisamment long de préparation. Aller jusqu'au fond des villages pour dialoguer avec les gens et écouter leurs revendications et leurs doléances", propose-t-elle.

Cette intervention a été faite dans le cadre de l'atelier de réflexion sur la réconciliation dans l'espace Kasaï qu'organise, à Kananga, le Haut-Commissariat de l'ONU aux droits de l'homme.

Lire aussi : Kananga : le Haut Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme organise un atelier sur la réconciliation dans l'espace Kasaï

Sosthène Kambidi