Dr J. Peter Pham a été nommé envoyé spécial des États-Unis pour la région des Grands Lacs en Afrique. L’annonce a été faite ce vendredi 9 novembre 2018 par le Département d’Etat américain.
Jusque-là, vice-président et directeur du bureau Afrique du Atlantic Council, le puissant think tank américain, spécialisé dans les relations internationales, il sera responsable de la coordination de la mise en œuvre de la politique américaine en Afrique Centrale.
Si sa nomination a été saluée par une partie de l’opposition congolaise et certains analystes américains qui s'intéressent au Congo, certains membres de la société civile congolaise restent prudents eu égard aux positions défendues, au début des années 2000, par Peter Pham.
Dans un article publié dans le New York Times en novembre 2012, il proposait le démembrement de la RDC : « Le Congo est trop gros pour réussir. C'est une entité artificielle dont les éléments constitutifs partagent le malheur d'avoir été saisis par l'explorateur Henry Morton Stanley au nom d'un monarque belge rapace du XIXe siècle ».
Il considérait le mal congolais comme étant chronique et, pour lui, la seule solution ne pouvait être que sa balkanisation au profit des entités plus petites : « Plutôt que d’édifier une nation, c’est le contraire qui est nécessaire pour mettre fin à la violence au Congo : diviser un État en faillite chronique en unités organiques plus petites dont les membres partagent un large consensus ou ont au moins des intérêts communs en matière de sécurité individuelle et collective ».
Pour lui, l’Occident devrait mettre de côté ce qu’il appelle un dogmatisme idéologique au profit d’un pragmatisme face à un pays qu’il qualifiait d’artificiel : « Si le Congo arrivait à être éclaté en entités plus petites, la communauté internationale pourrait consacrer ses ressources de plus en plus rares à l'aide humanitaire et au développement, plutôt que d'essayer, comme le Conseil de sécurité des Nations Unies l'a promis, de préserver «la souveraineté, l'indépendance, l'unité, la sécurité, l’intégrité territoriale d'un État fictif qui n'a de valeur que pour les élites politiques qui se sont hissées au sommet afin de piller les ressources du Congo et de financer les réseaux de mécénat qui leur assurent de rester au pouvoir ».
Dans le même article, il tentait également de trouver une explication au soutien du Rwanda au M23 qu’il présentait comme une rébellion particulière qui pouvait offrir la sécurité aux populations sous son contrôle.
Depuis l’officialisation de sa nomination comme successeur de Tom Perriello, cette tribune circule sur les réseaux sociaux et provoque un tollé.
Pour le mouvement citoyen Lutte pour le Changement (LUCHA, la nomination de Dr Peter Pham à ce poste « dénote au mieux d’une grave maladresse de la part de l’administration Trump, au pire d’un endossement public de ses idées ».
De son côté, Jean-Claude Katende, président de l’ONG ASADHO, se montre plus offensif : « Si le nouvel envoyé des USA croit que le Congo est un pays à diviser, il sera surpris par notre détermination à garder le Congo uni ».
Du côté des autorités congolaises, on ne s’avance pas beaucoup. La Majorité Présidentielle dit avoir pris acte de la nomination, sans plus.
« Nous ne pouvons que prendre acte dans la mesure où il vient remplacer celui qui est parti. Nous n’avons pas une réaction particulière. Nous ne pouvons que souhaiter dans la mesure du possible qu’il puisse mener son action dans l’intérêt de notre pays et ensuite de toute la région », a déclaré André-Alain Atundu Liongo, porte-parole de la MP, répondant à une question au cours de sa conférence de presse de ce samedi 10 novembre.