Le président Félix Tshisekedi s’est exprimé ce samedi à Lubumbashi sur le débat autour de la révision de la Constitution, dénonçant les discours qu’il qualifie de manipulateurs et défendant la nécessité de réfléchir sur la loi fondamentale du pays.
Sur les discours opposés à la révision constitutionnelle :
« Le danger de certains discours qui sont même prononcés par des personnes qui, normalement, devraient être au milieu du village. Je suis très inquiet quand j’entends des ministres de Dieu sortir des énormités pour dire que les Congolais et Congolaises n’ont pas le droit de réfléchir sur le bien-fondé de leur Constitution. Quel est ce peuple qui n’a pas le droit de se remettre, à un moment donné de sa vie, en question et de redéfinir ses orientations ? »
Sur les accusations concernant un troisième mandat :
« Ce que j’ai dit à Kisangani n’avait absolument aucun lien avec un quelconque troisième mandat, mais vous avez entendu que cette fameuse opposition, qui n’a rien à proposer, qui avait mordu la poussière très sérieusement lors des élections, cherche à manipuler la population en disant non au troisième mandat. Qui leur a parlé de troisième mandat ? »
Sur les révisions proposées :
« Les états généraux de la justice ont proposé de réviser deux articles de notre Constitution. À entendre ces gens, nous ne devons pas réfléchir sur ces articles, ni améliorer notre justice, parce que, selon eux, les Congolais vont se fâcher et vont faire des émeutes. C’est une insulte à l’endroit de notre peuple, à l’intelligence et à la sagesse de notre peuple. »
Sur l’article 217 :
« Demander aux Congolais de ne pas revoir leur Constitution alors qu’il y a le fameux article 217 qui consacre la vente de notre souveraineté à des États africains ? Et nous n’avons pas le droit de revoir cela ? Il y a des hommes de Dieu qui ont osé prendre la parole pour défendre cette ignominie. Le pays est en danger. Je suis l’un des Congolais les mieux placés pour comprendre cela. »
Sur la formation d’une commission :
« Je vais réunir une commission de Congolais bien-pensants issus de plusieurs disciplines, dont l’objectif sera de revoir cette Constitution. Leurs propositions vous seront présentées, à vous, peuple congolais, d’abord à travers vos élus, et si cela est nécessaire, nous consulterons la population pour qu’elle décide d’elle-même si elle va s’arrêter à la vision ou carrément aller au changement de la Constitution. »
Sur son engagement :
« Je ne suis pas venu à la tête du Congo pour m’éterniser au pouvoir et pour faire souffrir mes compatriotes. Tout ce que je fais, tout ce à quoi je pense, c’est au bonheur de mes compatriotes, au développement de mon pays. Un jour, je vais devenir ex-président. Et je vais vivre dans ce pays, auprès des miens. Je voudrais circuler dans toutes les provinces avec ma famille et mes amis en toute paix, et c’est cela que je prépare pour nos générations futures. »
Sur qu’il appelle manipulations politiques et religieuses :
« Ceux qui vont vouloir manipuler notre population vont être exposés face à la justice et à des poursuites. Le débat est permis, et je l’accepte sans problème, mais la manipulation est interdite, surtout lorsqu’elle est destinée à la subversion, à monter un groupe de Congolais contre d’autres Congolais. Quand on est un homme d’Église, on est censé être un homme de paix. Quand on est homme politique, opposant fût-on, on est censé apporter des propositions de paix et de développement. On ne peut pas manipuler ses compatriotes pour les amener à se déchirer ou à s’entretuer. Ce sont des choses que je combats et que je combattrai toute ma vie. »
Le débat sur la révision de la Constitution en RDC est actuellement au cœur de l'actualité politique. Le président Félix Tshisekedi a annoncé la formation d'une commission nationale en 2025 pour élaborer une nouvelle Constitution, arguant que l'actuelle, adoptée en 2006, ne reflète plus les réalités du pays. Cette initiative suscite des inquiétudes quant à une possible modification des limites de mandats présidentiels, certains craignant une tentative de prolongation du pouvoir au-delà des deux mandats constitutionnels.
En réponse, des figures de l'opposition et de la société civile, telles que Delly Sesanga, Ados Ndombasi et Jean-Claude Katende, ont lancé un appel au "sursaut patriotique" contre le changement de la Constitution et un éventuel troisième mandat du président Tshisekedi. Ils invoquent l'article 64 de la Constitution pour légitimer leur opposition, affirmant que le président cherche à rompre le pacte de stabilité pour s'accrocher au pouvoir au-delà de ses deux mandats.
Parallèlement, le parti présidentiel, l'Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS), intensifie sa campagne en faveur d'une révision constitutionnelle. Le secrétaire général de l'UDPS, Augustin Kabuya, a défendu le projet de son parti en faveur d’une "nouvelle Constitution sécurisante et adaptée aux réalités" du pays, en hommage à Étienne Tshisekedi.
Ce débat polarise la classe politique congolaise, opposant ceux qui estiment nécessaire une adaptation de la loi fondamentale aux réalités actuelles du pays à ceux qui craignent une dérive autoritaire et une remise en cause des acquis démocratiques.
José Mukendi