Occupation d'Uvira par l'AFC/M23: Kinshasa accuse Kigali et appelle les facilitateurs à restaurer la crédibilité des initiatives diplomatiques de paix en cours

La ville d'Uvira
La ville d'Uvira

Considérée comme une ville stratégique dans le dispositif sécuritaire du gouvernement congolais, la ville d’Uvira, dans la province du Sud-Kivu, est désormais passée sous le contrôle de la rébellion de l’AFC/M23, renforçant davantage son influence et sa mainmise dans les provinces du Nord et du Sud-Kivu. Il s’agit d’un verrou essentiel susceptible d’ouvrir la voie à l’AFC/M23 vers l’espace Grand Katanga, considéré comme le poumon économique du pays.

Dans cette offensive, une fois de plus, Kinshasa pointe du doigt la responsabilité du Rwanda aux côtés du mouvement rebelle dans le seul objectif de saboter les initiatives diplomatiques en cours sous l’égide des États-Unis d’Amérique, de l’État du Qatar et de l’Union africaine. Pour rétablir la crédibilité de ces processus diplomatiques, le gouvernement congolais invite ses partenaires à prendre des mesures urgentes et coordonnées vis-à-vis de Kigali, afin de faire cesser les hostilités dans l’Est de la RDC.

" La situation à Uvira marque un tournant grave : il s’agit d’un choix délibéré du président Kagame de tourner le dos aux Accords de Washington moins d’une semaine après leur signature, sapant ainsi de manière intentionnelle les efforts consentis par le Président Donald J. Trump pour ramener la paix. Le Gouvernement de la RDC appelle en conséquence les facilitateurs des processus de Washington et de Doha ainsi que la médiation africaine à utiliser pleinement l’ensemble de leur arsenal politique et diplomatique pour restaurer la crédibilité de ces trois processus. Les facilitateurs doivent adopter des mesures urgentes, fermes et coordonnées pour faire cesser les hostilités, rétablir le respect des accords et empêcher l’effondrement total du cadre de paix patiemment construit ", dit le gouvernement congolais dans un communiqué rendu public mercredi 10 décembre, jour de l'officialisation de l'occupation de la ville par l’AFC/M23. 

Dans le même document, le gouvernement a attiré l’attention du Conseil de sécurité de l’ONU, l’appelant à faire respecter sa propre résolution exigeant le respect de l’intégrité territoriale de la RDC et le retrait des troupes rwandaises du sol congolais. Malgré l’attitude de Kigali, Kinshasa affirme rester attaché aux initiatives diplomatiques en cours.

" Dans le même esprit, le gouvernement appelle le Conseil de sécurité des Nations Unies à prendre des mesures rapides et résolues pour garantir l’application effective de sa résolution 2773 (2025), en particulier en ce qui concerne la protection des civils, la cessation des hostilités et la fin de tout soutien étatique aux groupes armés. Le gouvernement demeure engagé au respect des accords, mais ne renoncera jamais à son droit légitime à la sécurité, à la protection de sa population et à la défense de l’intégrité de son territoire ", ajoute le communiqué du gouvernement de la RDC. 

La détérioration de la situation sécuritaire dans l’Est de la RDC a coïncidé avec l’entérinement des accords de Washington signés entre Kinshasa et Kigali sous les auspices des États-Unis d’Amérique. Alors que ces accords étaient censés valider et encourager le cessez-le-feu souhaité par les médiateurs et plusieurs partenaires de la RDC et du Rwanda, la situation s’est au contraire dégradée, marquée par des accusations mutuelles entre les deux États quant à la responsabilité de la détérioration de la situation sécuritaire actuelle. 

Après l’occupation de Bukavu en février 2025, le gouvernement de Kinshasa avait désigné la Uvira comme siège provisoire des institutions dans les zones encore sous contrôle gouvernemental dans la province du Sud-Kivu. L’AFC/M23, soutenu par le Rwanda et son armée, ayant désormais pris le contrôle d’Uvira, inflige, selon le chef de la diplomatie burundaise, une "gifle " à Washington, seulement quelques jours après la signature des accords censés ramener la paix dans la région des Grands Lacs.

Face à l’évolution de la situation sur le terrain, la médiation qatarie envisage d’ouvrir un nouveau round de discussions entre Kinshasa et l’AFC/M23. L’annonce en a été faite par les autorités du mouvement rebelle.

Clément MUAMBA