RDC-Rwanda : pour Jonas Tshiombela, l’accord de paix de Washington pèche par son silence sur les victimes, la justice et la société civile

Donald Trump, président des USA au milieu des ministres des affaires étrangères de la RDC et du Rwanda à l'occasion de la signature de l'accord de paix entre les deux pays voisins à Washington
Donald Trump, président des USA, au milieu des ministres des affaires étrangères de la RDC et du Rwanda à l'occasion de la signature de l'accord de paix entre les deux pays voisins à Washington le 27 juin 2025

Des réactions fusent de partout après la signature, vendredi 27 juin, de l’accord de paix entre la RDC et le Rwanda à Washington sous l’égide de l’administration Trump. A Actualité.cd, Jonas Tshiombela, président de la Nouvelle société civile congolaise (NSCC), évoque un deal qui pèche “gravement” par son silence sur les victimes, la justice et la société civile.

« L’accord signé à Washington ignore totalement les victimes congolaises des crimes de guerre, des violences sexuelles, des déplacements forcés, et des pillages économiques. Pas une ligne sur la justice traditionnelle. Aucune mention de réparation. Zéro mot sur la vérité. Pire encore, aucune voix citoyenne, aucune organisation de la société civile, aucun survivant des atrocités n’a été intégré au mécanisme de surveillance mis en place », s'indigne Jonas Tshiombela, avant de souligner que cette démarche s’agit donc d’un processus diplomatique fermé, élitiste et technocratique, qui confisque la paix au lieu de la construire avec le peuple.

Pour Jonas Tshiombela, signer un accord de paix sans inclure les victimes et sans garantir des mécanismes de réparation, c'est légitimer l’impunité. 

« La paix ne peut être signée entre deux stylos et deux chaises diplomatiques. Elle se construit avec la vérité, la justice, la participation, et surtout, la reconnaissance des victimes. Tout accord qui nie cela est un faux départ, une illusion dangereuse, et une insulte à la mémoire des millions de Congolais tombés dans l’oubli de l’impunité. La RDC a l’obligation morale et historique de ne pas trahir ses morts. Signer un accord sans justice, c’est ouvrir la porte à la répétition du crime. Que le sang versé nous donne enfin la lucidité de bâtir un avenir digne de nos martyrs », soutient-il.

Le Président de la NSCC précise, par ailleurs, que la société civile reste sceptique et prudente face à ce pacte car plusieurs accords signés précédemment n'ont eu aucun résultat positif.

« Nous craignons que ceux qui ont pris les armes puissent intégrer l'armée ou service de l'État. Nous craignons que l'impunité se poursuive et que les bourreaux deviennent les chefs de victimes. La première notion devrait être celle de la justice, c’est de là qu'on pourra voir comment les choses pourront évoluer dans le sens définitif », fait-il remarquer.

Jonas Tshiombela propose donc d’assurer justice et réparation pour les victimes, avec reconnaissance de leurs souffrances. Il recommande d’impliquer la société civile, de garantir la transparence par des audiences publiques, et de prévoir un recours à la justice internationale en cas d’échec interne.

Cet accord de paix de Washington prévoit notamment, sur son aspect sécuritaire, le respect de l’intégrité territoriale des deux pays, la cessation des hostilités entre leurs armées, ou encore l’engagement mutuel de ne plus soutenir de groupes armés comme les FDLR ou le M23/AFC. Il inclut aussi la mise en place d’un mécanisme conjoint de coordination sécuritaire fondé sur le concept d’opérations adopté à Luanda en octobre 2024. Sur le plan économique, l’accord entend renforcer la coopération bilatérale autour de projets communs, notamment dans l’hydroélectricité, la gestion des parcs nationaux et la traçabilité des minerais. 

Gloria Kisenda (stagiaire)