Depuis trois semaines, les cours sont suspendus dans la quasi-totalité des écoles de Lubero centre à la suite de l’avancée des rebelles du M23. La reprise des activités scolaires dans cette contrée demeure un défi majeur malgré l'appel lancé en début de week-end dernier par l'administrateur militaire du territoire de Lubero, le colonel Kiwewa Mitela Alain, exhortant les acteurs éducatifs à relancer les cours dès le lundi 3 mars 2025.
La majorité des élèves sont restés à la maison et peu d'enseignants se sont rendus dans leurs établissements. Les sous-divisions Lubero 1 et 2, en particulier, peinent à redémarrer les activités scolaires en raison de l'insécurité croissante dans la région.
Justin Myeha, proviseur de l'Institut Ufahamu, une école conventionnée protestante de la 8e CEPAC à Lubero, a exprimé ses inquiétudes concernant la situation sécuritaire, qui ne permet pas une reprise normale des cours.
« Nous y sommes allés, nous avons ouvert toutes les classes, mais malheureusement, les enfants ne se sont pas présentés. Nous pensons que le message de l'autorité territoriale n'a peut-être pas atteint toutes les couches de la population. De plus, certains parents continuent à éprouver des craintes et s'inquiètent de la sécurité de leurs enfants. Ils se demandent s'il est vraiment judicieux d'envoyer leurs enfants à l'école dans un contexte sécuritaire aussi tendu.», a-t-il déclaré.
Un parent d'élève, qui a souhaité garder l'anonymat, a confié à ACTUALITE.CD que la levée de la suspension des cours était prématurée tant que les causes de la situation sécuritaire ne sont pas résolues. Il a suggéré que les autorités effectuent une évaluation approfondie avant de décider de la reprise des cours.
«Pour ma part, je pense qu'il n'est pas prudent d'appeler à la reprise des cours sans d'abord évaluer la situation. Sommes-nous sûrs qu'il n'y a aucun danger pour les enfants si nous les envoyons à l'école ? Nous ne risquons pas de les exposer à un danger qui pourrait les contraindre à rentrer précipitamment ? Ce n'est qu'après une telle évaluation que l'on pourra envisager la reprise des cours. Nous constatons que l'ennemi est toujours à moins de 20 km, parfois même à moins de 15 km, et nous avons appris ce week-end qu'il avance vers Kasugho. Quelle garantie pouvons-nous avoir pour être rassurés quant à la sécurité de nos enfants ? », s'interroge-t-il.
Plus d'une trentaine d'établissements scolaires restent fermés à Lubero, notamment dans les localités côtières du lac Edouard. Les élèves et enseignants ont fui les zones touchées par les groupes armés, et une grande partie d'entre eux a trouvé refuge à Butembo ou dans des localités voisines comme Mbingi. Les affrontements entre les Forces armées de la RDC et les rebelles du M23 ont provoqué un déplacement massif de la population, rendant difficile la reprise des activités scolaires dans cette région.
Un enseignant ayant fui la violence a témoigné de la situation difficile dans laquelle vivent les déplacés, notamment les enfants et leurs parents.
« Les enfants ramassent des fruits et des aliments pour survivre. Nous appelons les organisations humanitaires à venir en aide à ces populations qui vivent dans la précarité. Si la situation sécuritaire ne s'améliore pas, nous craignons que cette année scolaire soit blanche », a-t-il déclaré.
Il a également exhorté les autorités militaires à renforcer leur présence dans la région pour rétablir l'ordre et protéger les civils.
Nos tentatives pour joindre les sous-proved (chefs des services éducatifs) des sous-divisions Lubero 1 et 2 n'ont pas abouti. Cependant, selon des sources locales, plusieurs habitants ont fui des zones comme Kipese, Lubero-centre, Kimbulu et leurs environs en raison des combats entre la coalition M23-AFC et les militaires, ainsi que des pillages effectués par des militaires en fuite.
Malgré la situation difficile à Lubero, le directeur provincial a.i de la province éducationnelle du Nord-Kivu a rassuré la population quant à la continuité des examens nationaux. « Les élèves des zones affectées par la guerre prendront part aux examens nationaux, notamment l'Examen d'État (EXETAT), le Test National de Fin d'Études Primaires (TENAFEP) et le Test National de Sélection, d'Orientation Scolaire et Professionnelle (TENASOSP) », a-t-il déclaré.
Il a également précisé que le calendrier scolaire sera maintenu jusqu'en juillet 2025, et que les élèves continueront à étudier malgré les perturbations causées par le conflit.
Josué Mutanava, à Goma