Plus d'un mois déjà depuis que Justicia ASBL avait tiré la sonnette d'alarme sur l'exfiltration de l'ancien président de la commission électorale nationale indépendante (CENI), Daniel Ngoy Mulunda, de la Zambie vers Kinshasa par les services de sécurité de Lusaka en complicité avec ceux de Kinshasa. Sa famille, qui s'inquiète de son état de santé, d'autant plus qu'il n'a plus accès à ses médicaments, lui, qui souffre de conditions hygiéno-diététiques inadmissibles, selon ses proches, fait appelle notamment aux ambassadeurs accrédités en RDC, à la Cenco et à l'ECC et aux organisations des droits de l'homme de faire pression à Kinshasa pour obtenir sa libération «immédiate et garantir sa sécurité ».
Sa femme, qui s'est exprimée dans un communiqué, jeudi 4 février 2025, relatant ce qu'elle qualifie d'enlèvement et déportation de son mari à Kinshasa, décrit la violation flagrante de l'article 33 de la convention de 1951 sur les réfugiés, interdisant le rapatriement d'un réfugié vers le pays où sa vie ou sa liberté serait menacée.
«...Il y a environ deux mois, le Révérend Pasteur Daniel Ngoy Mulunda-Nyanga a été enlevé de son domicile à Lusaka, le mercredi 18 décembre 2024, par les services de renseignement zambiens, dirigés par le commandant Ngulube, et les renseignements militaires congolais, en connivence avec le chef de la Maison militaire du président de la République Démocratique du Congo. Son enlèvement et sa déportation vers la République Démocratique du Congo, d'abord à Mbuji Mayi puis à Kinshasa, violent de manière flagrante l'article 33 de la Convention de 1951 sur les réfugiés, qui interdit toute expulsion ou tout rapatriement d'un réfugié vers un pays où sa vie ou sa liberté serait menacée. Rappelons que le Gouvernement de la RDC a levé, depuis plusieurs mois, le moratoire sur la peine de mort, et le ministre de la Justice fait, depuis lors, le tour des médias pour confirmer la menace d'exécutions», peut-on lire dans le communiqué.
Elle déplore également la privation au fondateur de la nouvelle église méthodiste congolaise d'avoir accès ni à ses avocats ni à ses parents âgés. Shimba Mulunda et toute sa famille craignent que ce dernier, détenu dans le secret dans un état de santé critique, y perde la vie «en raison des exactions sommaires et des assassinats ciblés, particulièrement dans les lieux de détention, auxquels se livre, selon plusieurs dénonciations, le régime de Kinshasa ».
«Le Révérend Pasteur Daniel Ngoy Mulunda-Nyanga est un homme dont la notoriété nationale et internationale n’est plus à démontrer. Ancien secrétaire exécutif chargé des affaires internationales de la Conférence des Églises de toute l'Afrique (CETA), il a travaillé aux côtés de personnalités telles que l'évêque Desmond Tutu. Il fut également ancien président de la Commission électorale nationale indépendante en RDC, président du PAREC (une ONG œuvrant pour la paix) et fondateur de la Nouvelle Église Méthodiste Congolaise. Son engagement en faveur de la paix, du dialogue constructif et des droits humains lui a valu plusieurs reconnaissances à l’échelle internationale», témoignent-elles.
Justicia ASBL, une organisation de promotion et de protection des droits de l'homme, du droit humanitaire et du développement, avait déploré un «kidnapping » de Ngoy Mulunda, dont il a exigé la libération sans condition.
L'ancien président de la centrale électorale nommé en 2011, avait été condamné à trois ans de prison par le tribunal de grande instance de Lubumbashi pour des infractions “d'incitation à la haine tribale, propagation des faux bruits et atteinte à la sûreté de l'État”. Après son acquittement en septembre 2022, le pasteur Daniel Ngoy Mulunda s'est rendu à Zambie, où il a vécu sous statut d'un réfugié.
Samyr LUKOMBO